Rapport de la Cnuced sur le transport maritime mondial : Les conflits géopolitiques menacent les chaînes d’approvisionnement

27/10/2024 mis à jour: 13:26
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A la mi-2024, le trafic passant par le canal de Panama et le canal de Suez a chuté de plus de 50% - Photo : D. R.

L’agence onusienne appelle à remédier aux perturbations entravant les points d’étranglement maritimes, à investir dans un transport maritime à faible émission de carbone, à améliorer l’efficacité et l’adaptation des ports…

ONU commerce et développement, anciennement Cnuced, a alerté dans son dernier rapport sur les transports maritimes sur les fortes tensions exercées sur les principaux passages maritimes dans le monde. Ces tensions menacent de plus en plus l’économie mondiale, la sécurité alimentaire et l’approvisionnement en énergie.

L’étude sur les transports maritimes 2024 constate qu’une combinaison de facteurs géopolitiques, d’impacts climatiques et de conflits a ébranlé le commerce mondial, menaçant le fonctionnement des chaînes d’approvisionnement maritimes à travers le canal de Panama (reliant les océans Pacifique et Atlantique), la mer Rouge et le canal de Suez (passage reliant la Méditerranée à l’océan Indien), ainsi que la mer Noire (plaque tournante pour le transport de céréales).

Alors que la croissance du transport maritime avait connu en 2023 un mieux par rapport à 2022 en affichant 2,4%, pour l’année 2024, la croissance est plus modeste avec 2% seulement. Ce taux de croissance est tiré, selon le rapport de la Cnuced, par la demande de marchandises en vrac comme le minerai de fer, le charbon et les céréales, ainsi que par les marchandises conteneurisées.

Le rapport affiche toutefois des inquiétudes quant à l’avenir. «Ces chiffres masquent des défis plus profonds. Le commerce conteneurisé qui n’a augmenté que de 0,3% en 2023 devrait rebondir de 3,5% en 2024, mais la croissance à long terme dépendra de la manière dont l’industrie s’adaptera aux perturbations actuelles, telles que la guerre en Ukraine et les tensions géopolitiques croissantes au Moyen-Orient», indique l’étude. Cette dernière fait état d’importantes perturbations entraînant des réacheminements de navires et des coûts plus élevés.

A la mi-2024, le trafic passant par le canal de Panama et le canal de Suez a chuté de plus de 50%. «Cette baisse s’explique par les faibles niveaux d’eau du canal de Panama dus au climat sec et à l’éclatement d’un conflit affectant la région de la mer Rouge, avec de graves répercussions sur le canal de Suez.» Le rapport souligne que le tonnage des navires transitant par le golfe d’Aden et le canal de Suez a chuté respectivement de 76 et de 70% par rapport à la fin de l’année 2023.

L’allongement des routes maritimes a provoqué une explosion de réacheminement des cargaisons autour du cap de Bonne-Espérance, avec une augmentation de 89% de la capacité d’arrivée des navires. «Bien que cela permette de maintenir le flux de marchandises, les coûts, les retards et les émissions de carbone s’en trouvent considérablement accrus», regrette la Cnuced en indiquant qu’un porte-conteneurs transportant 20 000 à 24 000 équivalent vingt pieds sur l’itinéraire Extrême-Orient-Europe encourt 400 000 dollars supplémentaires en coûts d’émissions par voyage lorsqu’il contourne l’Afrique au lieu d’emprunter le canal de Suez.

Le détournement des navires en hausse

Les itinéraires maritimes plus longs ont entraîné, selon la même source, une augmentation de la congestion portuaire, de la consommation de carburant, des salaires des équipages, des primes d’assurance et des risques de piraterie. «A la mi-2024, le détournement des navires de la mer Rouge et du canal de Panama avait augmenté la demande mondiale de navires de 3% et la demande de porte-conteneurs de 12% par rapport à ce qu’elle aurait été en l’absence de ces perturbations», explique la Cnuced.

Une situation mettant à rude épreuve les chaînes d’approvisionnement et provoquant une congestion sans équivalent sur les principaux ports faisant face à une demande accrue de services de transbordement. Dans le cas de la poursuite des perturbations sur le transport maritime, les prix mondiaux à la consommation pourraient augmenter de 0,6% vers la fin de l’année 2025 et de 0,9% pour les pays les moins avancés avec une hausse des prix des produits alimentaires transformés de 1,3%.

Les petits Etats insulaires s’en trouvent à leur tour plus isolés avec une diminution de leur connectivité maritime dix fois plus qu’auparavant. Le rapport de la Cnuced «préconise des efforts coordonnés pour naviguer, s’adapter et prospérer dans cet environnement complexe».

Dans une série de recommandations, l’agence onusienne appelle à remédier aux perturbations entravant les points d’étranglement maritimes, à investir dans un transport maritime à faible émission de carbone, à améliorer l’efficacité et l’adaptation des ports, à intégrer la facilitation des échanges commerciaux et à lutter contre l’immatriculation frauduleuse des navires. Le même rapport préconise, en outre, de suivre l’évolution du marché du fret, ainsi que l’évaluation des tendances des tarifs de transport maritime et de leur impact sur les économies vulnérables. 

 

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