En Algérie, le mois de Ramadhan de l’année 2024 a été assez révélateur du degré de dérèglement du secteur de l’audiovisuel. La déferlante publicitaire sur le petit écran avait irrité téléspectateurs et pouvoirs publics.
Des coupures publicitaires prolongées, d’une durée de presque 45 minutes en prime time, ont d’ailleurs suscité la réaction, à deux reprises, de l’Autorité nationale indépendante de régulation de l’audiovisuel (Anira). Celle-ci avait alors décidé de sanctionner les chaînes Echorouk TV, El Hayat, El Bilad, Ennahar TV, Samira TV et El Heddaf, tout en menaçant de suspendre les émissions incriminées en application du décret exécutif n°16-222 du 11 août 2016. Un texte réglementaire jugé «désuet» par des responsables de chaînes de télévision qui, en mars dernier, avaient appelé à rendre public le nouveau cahier des charges. C’est chose faite.
Le décret exécutif n° 24-250 du 23 juillet 2024 fixant les dispositions du cahier des charges générales imposables aux services de communication audiovisuelle a été publié au dernier numéro du Journal officiel (n°53). Sur le plan de la réclame, le nouveau texte intègre la notion de placement de produit et se penche sur le phénomène de bradage des tarifs publicitaires en annonçant un prix minimum déterminé par l’ANIRA.
L’article 48 du décret stipule, en effet que «les messages publicitaires sont diffusés en langues nationales et officielles (…) et peuvent être diffusés dans une langue étrangère lorsque l’usage des marques comportant des expressions et des mentions qui, dans une langue étrangère, sont nécessaires, dans les génériques ou les descriptifs des produits ou services concernés à l’intérieur du territoire national.
Le texte stipule, en outre, que le contenu des messages publicitaires diffusés (Art.51) doit être véridique, loyal et décent.» A ce titre, il doit, entre autres, «respecter les valeurs nationales, la dignité humaine ; être dénué de toute vulgarité et ne pas contrevenir à la morale et à l’éthique générale ; dénué d’incitations à des comportements nocifs pour la santé ou l’environnement et être dénué des scènes de violence et de toute incitation portant atteinte à la sécurité des personnes et des biens». Il est également stipulé (Art. 54.) qu’il est interdit de diffuser des messages publicitaires, de parrainer ou de placer un produit ou un programme de télé-achat relatif aux produits, services ou activités se rapportant aux armes à feu et aux munitions ainsi qu’aux armes blanches, notamment celles fabriquées sous forme de jouets. Idem pour les produits dont la possession et la consommation sont interdites ou services ou activités interdits par la législation et la réglementation en vigueur, tels que les substances du tabac, les boissons alcoolisées et toute autre substance spécifiée et classée nocive pour la santé.
Les tarifs de la pub fixés par l’ANIRA
La diffusion des messages publicitaires (Art.55) relatifs aux produits pharmaceutiques et aux fournitures médicales à usage médical humain ou ceux contenant des allégations de prévention ou de traitement des maladies humaines ou aux compléments alimentaires est, désormais, soumise à une autorisation préalable délivrée par les autorités compétentes. Cet article vient ainsi conforter une revendication longtemps défendue par les praticiens de la santé. S’agissant des interruptions publicitaires, une période d’au moins quinze minutes doit s’écouler entre deux interruptions successives à l’intérieur d’un même programme, selon l’article 58. Alors que le temps consacré à la diffusion des messages publicitaires (Art. 59) ne peut dépasser huit minutes/par heure de diffusion en sa globalité. Le décret de 2016 à six minutes par heure d’antenne en moyenne dans l’année, limite chaque séquence de messages publicitaires à trois minutes, au maximum.
Le présent décret donne, toutefois, dérogation aux chaînes de télévision durant le mois de Ramadhan en portant cette durée exceptionnellement à dix minutes par heure au maximum. Par ailleurs, dans le cadre du respect des règles de la concurrence, de la transparence et de l’égalité entre les annonceurs, tout service de communication audiovisuelle et/ou service de communication audiovisuelle en ligne «est tenu d’établir une tarification des messages et des spots publicitaires diffusés et de les communiquer aux annonceurs», stipule l’article 65.
Il doit, de ce fait, prendre en considération le prix minimum fixé par l’ANIRA lors de la détermination de sa tarification du message et du spot publicitaire. Dans le chapitre consacré au personnel des chaînes de télévision, le décret fait obligation aux propriétaires d’employer des journalistes détenteurs de la carte nationale de journaliste professionnel dont le nombre ne doit pas être inférieur à la moitié de l’équipe rédactionnelle. Par ailleurs, la liste est transmise à l’Autorité nationale indépendante de régulation de l’audiovisuel.