Président du Forum pharmaceutique africain, membre du conseil de la Fédération internationale pharmaceutique (FIP), consultant pharmaceutique international et défenseur de l’accès aux médicaments de qualité en Afrique et des bonnes pratiques de fabrication de l’OMS, Prosper Hiag revient, dans cet entretien, sur l’importance de la coopération Sud-Sud pour aider au renforcement des capacités de production et au développement de l’industrie pharmaceutique en Afrique et le développement social et durable. L’Algérie a, selon lui, une place particulière dans cette dynamique de la chaîne de valeurs du médicament, en mettant l’accent sur l’éthique pharmaceutique, et de la déontologie.
Entretien réalisé par Djamila Kourta
- Vous avez insisté, lors de votre intervention, sur l’importance de la coopération qu’elle soit bilatérale ou régionale pour le développement de l’industrie pharmaceutique en Afrique. Comment faire pour que cette coopération soit efficace et prospère ?
La coopération est nécessaire et fait partie intégrante de la solidarité internationale. Nous avons besoin d’aller les uns vers les autres, de se connaître et partager ce que nous faisons. Elle nous permet de mettre en place des échanges positifs en win-win. Nous avons des attentes et cette coopération peut intervenir sur une base bilatérale, régionale, intra-régionale ou inter-régionale. Nous avons des attentes et en face nous avons un pays qui s’est rapidement développé dans le domaine de la pharmacie et de manière exponentielle. Cette coopération peut contribuer à la transformation structurelle de notre continent et aider à atténuer des inégalités qui se creusent entre les pays.
L’expérience algérienne doit être suivie, car il n’y a pas de pays dans la région ayant connu ce sursaut dans le domaine de la pharmacie, que ce soit à l’université, au conseil de l’Ordre et au ministère de l’Industrie pharmaceutique. Il y a d’abord un pharmacien à la tête du ministère de l’Industrie pharmaceutique, une faculté de pharmacie forte avec un nouveau doyen, la mise en place d’une réglementation pharmaceutique à tous les niveaux, une production locale de médicaments importante avec la fabrication de vaccins et une organisations structurée.
- L’Afrique fait face à de nombreux défis dans le domaine de l’industrie pharmaceutique. Quelles solutions préconisez-vous pour affronter ces défis ?
J’insiste pour dire que l’Algérie a une place particulière dans ce domaine au niveau du continent au vu de son expérience qu’il faut montrer pour être suivie par les autres pays de la région. Il est vrai que tout cela revient à une volonté politique qui doit se traduire sur le terrain par des actions d’envergure pour assurer un environnement favorable justement à cette coopération. Par ailleurs, nous, les pharmaciens de l’industrie pharmaceutique, devons discuter et montrer l’exemple et le chemin à suivre pour sa réussite.
La mise en place d’une réglementation forte est la première condition à tout développement d’une vraie industrie pharmaceutique et avoir un meilleur produit, car il s’agit d’un problème de valeur. Placer le pharmacien au centre de toute l’activité est remarquable. L’obligation de l’inscription au tableau de l’Ordre mis en place par le Conseil national de l’Ordre des pharmaciens algériens est l’une des mesures à généraliser.
Ce qui nous permettra d’avancer dans cette coopération avec la convergence des initiatives. Il est donc question d’étendre et améliorer la disponibilité de bons médicaments produits par les Africains pour des Africains, l’Algérie est au centre de cette question. Je dois souligner également qu’on ne peut pas espérer le développement de l’industrie pharmaceutique dans la région sans une bonne formation et suffisamment de techniciens et de pharmaciens industriels. Aujourd’hui, il est temps de créer un Institut africain de pharmacie industrielle pour avoir un même niveau de formation qui pourra être abrité par l’Algérie qui a les moyens. Je l’ai déjà proposé à l’ancien président de l’Ordre des pharmacien, Lotfi Benbahmed, actuellement ministre de l’Industrie pharmaceutique.
Le marché Pharma Africain doit retrouver son leadership sur le marché mondial pharmaceutique. Il ne faut oublier que la pandémie de Covid-19 a mis l’Afrique à rude épreuve au vu de sa forte dépendance vis-à-vis de l’extérieur. Aujourd’hui, il est important de conjuguer les efforts pour assurer une sécurité sanitaire.
- Le premier Salon El Djazair Healthecare s’inscrit justement dans cette action de développement de la coopération. Qu’en pensez-vous ?
Les besoins en termes d’accès aux médicaments de qualité sont importants. Ce Salon est nécessaire pour faire connaître les compétences et développer les échanges entre les différents pays. C’est pourquoi, il est important de reproduire ce type de manifestation dans d’autres pays et cette industrie pharmaceutique algérienne doit être plus connue et plus promue. L’Algérie doit être plus visible au niveau du continent en terme d’industrie pharmaceutique. Ce pays fait de belles choses qu’on ne connaît pas, mais ne le faites pas que pour vous, pensez au reste du continent.
- La Fédération algérienne de pharmacie fait partie de la Fédération internationale pharmaceutique (FIP) mais pas l’Ordre des pharmaciens. Pourquoi ?
Je pense que cette question doit être posée au président du conseil de l’Ordre des pharmaciens algériens, d’autant que le CNOP était déjà membre. Je pense que le conseil de l’Ordre doit réintégrer la FIP, car il a un rôle important à jouer. Je demande au président du CNOP, M. Mettioui, de revenir à la FIP dont les objectifs de cette dernière sont de promouvoir le partenariat, le dialogue, la compréhension et l’activité dans les questions relatives à la pratique de la pharmacie et des sciences pharmaceutiques en Afrique. Il est aussi question de l’amélioration des services pharmaceutiques et de la santé publique en se concentrant sur des besoins locaux et régionaux distincts.