Dans la dépréciation de l'école algérienne, l'enseignement, plus que la famille, est souvent mis à l'index, fustigé, s'il n'est pas carrément objet de critiques acerbes, focalisant les «ratés», que la société a eu à endurer depuis de nombreuses années. Ce secteur sensible et stratégique, qui est perçu comme le transmetteur du savoir, des connaissances et des valeurs, est malade et il le sait. Les différentes réformes engagées, dans l'instruction publique, ont paru déphasées par rapport aux évolutions et aux progrès constatés ici et là. Marqué par des crises à répétition, ce secteur, pris en otage, a aussi pâti des coups de boutoir qui l'ont affaibli de l'intérieur. Car par-delà les programmes contestés, l'école souffre des effectifs pléthoriques, dans des classes surchargées, devenues exiguës, des formateurs pas toujours bien formés, au double plan professionnel et pédagogique. Soumise aussi à la bureaucratie, à la tricherie et récemment au phénomène de la violence. Bref, l'école n'a jamais évolué dans un cadre adéquat, serein, pédagogique, loin de l'idéologie, parasitée, de surcroît, par le corporatisme enseignant, incarné par le syndicat, partie prenante de la crise, qui doit savoir que si l'école est malade de la société, la société est plus encore malade de son école. Et pour paraphraser un auteur célèbre : «Le salaire de l'école, ça vient plus tard. Le salaire de l'école, ce sera un salaire, justement ?» Que penser d'une école, où le postulat légitime de l'égalité des chances se dégrade en distribution illégitime d'égalités au rabais, qui ne peuvent donner que des diplômes dévalorisés ! Evoluant dans ce contexte perturbé, l'école pouvait-elle jouer son rôle pleinement et répondre aux attentes, sans répondre aux normes universelles, dévolues à cette noble institution, fondées sur l'effort, le travail, le mérite et la sélection. L'école, au contraire, a dû subir, la mort dans l'âme, des facteurs négatifs de plein fouet, sous l'œil laxiste ou impuissant de l'enseignant, souvent sans entregent ni autorité. Se peut-il, dans cette atmosphère, pouvoir compléter le supposé rôle de la famille qui, avouons-le, ne brille pas, particulièrement par son apport positif. Pourtant, il est avéré que la famille est une école de droiture, d'équilibre, de force et de progression, ceux qui s'y soustraient s'engagent infailliblement dans la voie du mal et de la perdition. Les plus fortunés des parents n'adhérant plus à cette «transmetteuse de savoir», que ne perçoivent plus leurs enfants, partent le chercher ailleurs, dans des écoles privées censées assurer la réussite. Mais les autres ? Ceux qui n'ont pas les moyens pour sauter le pas ? Le mal de l'école, tout le monde en parle, a fortiori les concernés, c'est-à-dire la famille de l'éducation, mais personne ne s'est résolu à mener une action hardie et courageuse visant un sursaut salutaire pour la relance du secteur. Ceci dit, le mal ne doit pas incomber à l'école seule. Son recul et ses malheurs sont aussi liés à une certaine mue de la société marquée par la démission des parents, vis-à-vis de leurs enfants, en raison d'une chute brutale de l'autorité parentale. Le bouleversement d'échelles et de valeurs a fait que la cellule familiale ne prodigue que rarement les valeurs éducationnelles, morales et civiques, comme elle le faisait admirablement par le passé. Autres temps, autres mœurs. L'arrogant empire de l'argent a aussi mis son grain de sel en fissurant et en effondrant les idéaux collectifs. Mais que l'on ne se détrompe pas. Avec de l'argent, on peut tout acheter sauf une conduite. Que faire dans un monde où l'image scintille et l'écrit se ternit où le virtuel est maître. Le téléphone portable, les réseaux sociaux ont changé les habitudes, cassé les anciennes certitudes et les valeureuses solidarités. En définitive, ce qui nous hante a un spectre commun. Celui qui nous réduit à plaider pour les droits, sans les devoirs pour l'orientation sans la sélection, pour l'indulgence, voire le laxisme contre la sanction... Renouer avec les vraies valeurs devient impératif...