Pour Washington : Le «comportement coercitif» de Pékin représente un défi pour la paix en Asie-Pacifique

11/12/2024 mis à jour: 13:58
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Le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin - Photo : D. R.

Lloyd Austin, qui effectue sa 13e et probablement dernière visite en Asie en tant que secrétaire à la Défense, avant le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche en janvier, a par ailleurs affirmé que «l’engagement élargi des Etats-Unis en matière de dissuasion à l’égard du Japon et de la République de Corée (Corée du Sud, ndlr) est inébranlable».

Le secrétaire américain à la Défense, Lloyd Austin, a critiqué hier le «comportement coercitif» de la Chine lors d’une rencontre avec son homologue japonais à Tokyo, après que Taïwan a affirmé être face à un déploiement naval chinois massif près de ses eaux, rapporte l’AFP. «Maintenant, nous sommes lucides concernant les défis pour la paix et la stabilité dans cette région (Asie-Pacifique) et dans le monde.

Cela inclut le comportement coercitif de la République populaire de Chine en mer de Chine orientale, méridionale et ailleurs dans la région», a-t-il déclaré. Taïwan a affirmé le même jour que la Chine a procédé à un déploiement naval massif à proximité de ses eaux, y compris dans les zones citées par Lloyd Austin, un responsable sécuritaire évoquant «près de 90» navires. Soit un chiffre «plus élevé» que lors des manœuvres d’envergure déclenchées par Pékin en août 2022, alors en riposte à la visite à Taipei de Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants des Etats-Unis de l’époque, a souligné une porte-parole du ministère taïwanais de la Défense.

Lloyd Austin n’a cependant pas mentionné directement Taïwan, que la Chine considère comme l’une de ses provinces à faire revenir un jour dans son giron, sans exclure de recourir à la force pour y parvenir. A Tokyo, il a également pointé du doigt «l’imprudente guerre choisie de la Russie en Ukraine» et «le soutien de République démocratique populaire de Corée (Corée du Nord, ndlr) à la guerre de Moscou, autant que ses autres activités déstabilisatrices et provocatrices».

Lloyd Austin, qui effectue sa 13e et probablement dernière visite en Asie en tant que secrétaire à la Défense, avant le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche en janvier, a par ailleurs affirmé que «l’engagement élargi des Etats-Unis en matière de dissuasion à l’égard du Japon et de la République de Corée (Corée du Sud, ndlr) est inébranlable». «Nous affrontons ces défis avec confiance et détermination et nous restons engagés à faire avancer notre historique coopération trilatérale», a-t-il poursuivi. 

Le président américain élu, Donald Trump, a prévu de remplacer Lloyd Austin par Pete Hegseth, ancien militaire et présentateur sur la chaîne Fox News. Le ministre japonais de la Défense, Gen Nakatani, a de son côté estimé que la situation sécuritaire dans la région devenait «de plus en plus grave», remerciant L. Austin pour son engagement en matière de «dissuasion» dans le cadre de l’alliance entre le Japon et les Etats-Unis. 

Le Premier ministre japonais, Shigeru Ishiba, a déclaré en novembre dernier qu’il aurait des «discussions franches» avec D. Trump, affirmant que la coopération était essentielle pour garantir une zone Asie-Pacifique «libre et ouverte».

L’autre front de guerre

En parallèle, Washington et Pékin sont engagés dans une guerre commerciale. Ainsi, le président chinois, Xi Jinping, a averti hier qu’une telle guerre ne ferait «aucun gagnant», alors que l’offensive douanière promise par Donald Trump incite déjà les entreprises à gonfler leurs stocks, dopant pour l’heure les exportations du géant asiatique. Pékin se prépare au retour du magnat républicain en janvier à la Maison-Blanche.

Son premier mandat avait déjà été marqué par un bras de fer commercial avec la Chine, accusée de vol de propriété intellectuelle et d’autres pratiques «déloyales». Donald Trump promet d’imposer des droits de douane encore plus élevés sur les importations chinoises après son investiture, au risque de gripper un moteur crucial de la croissance de la deuxième économie mondiale, déjà plombée par une crise immobilière persistante et une consommation atone.

«Les guerres douanières, les guerres commerciales et les guerres de technologies vont à l’encontre des tendances historiques et des règles économiques, et il n’y aura aucun gagnant», a réagi Xi Jinping, selon la télévision d’Etat CCTV. Il s’exprimait lors d’une rencontre à Pékin avec les chefs de plusieurs institutions financières multilatérales. Il a indiqué que son pays garde «une confiance totale» dans sa capacité à atteindre son objectif de croissance du PIB en 2024. Cette déclaration du président chinois intervient peu après la publication de données officielles témoignant d’une progression continue des exportations chinoises en novembre.

Les ventes de produits et services à l’étranger ont gonflé de 6,7% sur un an, selon les chiffres en dollars publiés par les Douanes chinoises : une hausse toujours solide, bien qu’inférieure aux prévisions d’analystes sondés par Bloomberg (+8,7%), et très en-deçà de la performance d’octobre (+12,7%). L’intensification attendue des tensions commerciales avec Washington inquiète Pékin : l’économie mondiale fait face à des défis croissants en raison d’une tendance à la «démondialisation», a averti lundi le Premier ministre, Li Qiang.

Soucieux de prendre les devants, le gouvernement chinois a dévoilé en novembre une série de mesures pour stimuler le commerce, dont l’extension de l’assurance-crédit à l’exportation ou la facilitation des règlements commerciaux transfrontaliers. Depuis le premier mandat de Donald Trump, la Chine a toutefois restreint la part de ses exportations vers les Etats-Unis, réduisant potentiellement l’impact d’une nouvelle confrontation commerciale.

Le baromètre d’une consommation intérieure est toujours terne, le géant asiatique a enregistré en novembre un nouveau repli inattendu de ses importations. Elles ont chuté de 3,9% sur un an, exprimées en dollars, selon les données des Douanes publiées hier, accentuant la baisse observée en octobre (-2,3%) et à rebours du léger rebond de 0,9% attendu par les marchés.

Devant cette conjoncture morose, qu’une guerre douanière pourrait encore assombrir davantage, le bureau politique du Parti communiste, organe-clé du pouvoir, a ouvert la voie lundi à «un assouplissement approprié de la politique monétaire». La Conférence centrale sur le travail économique, réunion cruciale dont Pékin s’apprête à donner le coup d’envoi, pourrait poser cette semaine les jalons de nouvelles mesures de relance. Des signaux très attendus par les milieux économiques, déçus ces derniers mois par l’absence de soutien financier direct aux ménages pour les encourager à consommer.

 

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