Débroussaillage, pâturage sur brûlis : des femmes venues des quatre coins du monde se sont rassemblées au début du mois de février dans le nord du Portugal pour s’entraîner à l’usage traditionnel du feu et renouveler l’approche de la lutte anti-incendie, dans un pays toujours traumatisé par les feux meurtriers de 2017.
Pour cette première édition organisée en Europe du «Women’s TREX – Traditional fire training exchange», une initiative créée aux Etats-Unis en 2016, une quarantaine de pompières ou chercheuses d’une vingtaine de nationalités se sont retrouvées à Paredes de Coura, au Portugal, non loin de la frontière espagnole.
«Ces rencontres ont pour but de créer des réseaux de soutien et des moments d’apprentissage pour des gens très différents venus du monde entier», explique à l’AFP sa responsable, Lenya Quinn-Davidson, également directrice du programme de feux de forêt de l’Université de Californie (UCLA). «C’est difficile de travailler dans ce milieu, surtout quand on ne rentre pas dans le moule habituel», poursuit-elle, casque rouge sur la tête et vêtue d’une veste ignifuge jaune.
«Pendant très longtemps, la gestion du feu a été dominée uniquement par les hommes, et en général par une petite portion d’hommes, précise-t-elle. Donc nous cherchons à rassembler plein de gens différents et des idées innovantes pour résoudre des problèmes et nous reconnecter avec la terre et avec le feu en tant qu’outil.» Les participantes à cette initiative accueillie par l’Agence gouvernementale portugaise pour la gestion des feux de forêt (AGIF) ont échangé connaissances et expériences, et passé plusieurs jours à faire des exercices pratiques sur les hauteurs de la ville.
Un feu plus écologique
Dans cette localité le relief irrégulier combiné à des étendues de forêts et de maquis délaissés rendent les incendies difficiles à combattre. Mais depuis 2017, les autorités ont à cœur de diffuser une nouvelle approche, rompant avec les politiques de feu-zéro, peu pertinentes en termes de biodiversité et de dynamique forestière. «Ce que ces femmes apprennent ici, c’est essentiellement l’utilisation du feu traditionnel.
Le feu qu’utilisaient nos ancêtres pour le renouvellement des pâturages et aussi comme moyen pour contrôler les matières combustibles qui peuvent s’enflammer lors des incendies d’été», précise la coordinatrice de l’AGIF pour le nord du Portugal, Cristina Azurara.Munies d’un brûleur à essence, elles arpentent un paysage de maquis avec quelques effleurements de roche granitique afin de mettre le feu à de la végétation épineuse sur une étendue qui deviendra une zone de pâturage pour le bétail de la région. «C’est un feu plus écologique», décrit Emmanuel Oliveira, spécialiste des feux ruraux auprès de la municipalité locale.
«Les impacts sur le sol sont bien inférieurs et, au niveau de la végétation, il nous permet de créer une plus grande biodiversité des paysages», détaille le formateur.Après les incendies meurtriers de 2017, qui ont fait plus d’une centaine de morts, le Portugal a multiplié par dix l’investissement dans la prévention et doublé son budget de lutte contre les feux de forêt.
Le pays ibérique est ainsi parvenu à diminuer la surface brûlée chaque année sur la période 2018-2022 à environ un tiers de ce qu’elle était sur les cinq années précédentes, selon des données de l’AGIF.