Politique migratoire : La grande supercherie du makhzen

11/01/2023 mis à jour: 08:01
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Le constat et les conclusions sont accablants : c’est une politique de pressions européennes et de chantage marocain.

«L’objectif de Madar est de faciliter les collaborations de recherche et de soutenir des projets qui s’appuient sur l’expertise régionale de chercheurs britanniques et maghrébins qui travaillent dans les domaines des arts, des sciences humaines et des sciences sociales et politiques», explique l’équipe du projet. 

L’étude s’appuie sur les derniers faits d’actualité pour apporter un diagnostic complet de la situation migratoire au Maroc.  

Pour rappel, le 24 juin dernier, 23 Soudanais ont été tués à Nador au moment où près de 2000 migrants subsahariens tentaient de passer à Melilla par la force.

Pour jeter la poudre aux yeux de la communauté internationale et s’allier des gouvernements étrangers à sa cause «farfelue» du Sahara occidental, le Maroc a adopté en 2014 une stratégie nationale d’immigration et d’asile. Une politique qui n’a duré qu’entre 2014 et 2017. S’ensuivent alors, en 2018 précisément, les politiques répressives à l’encontre des personnes migrantes.

Cette tension entre la permanence de ces politiques de contrôle des frontières et une tentative nationale pour une politique migratoire différente, malgré ses limites, montre la complexité des enjeux liés à la mobilité au Maroc comme dans le reste du Maghreb. Sous pressions par des pays européens, «les initiatives marocaines en matière d’immigration sont prises en tenaille par les injonctions européennes comprises dans le Partenariat pour la mobilité (PPM), signé entre le Maroc et l’UE en 2013. L’imbrication des enjeux diplomatiques et sécuritaires avec des enjeux nationaux de protection, d’intégration et d’installation des personnes en migration ne facilite pas, pour un pays du Sud comme le Maroc, la mise en œuvre d’une politique migratoire souveraine, détachée des enjeux diplomatiques qui débordent les questions», souligne le rapport.

Prenant en compte cette realpolitik, le Maroc assume officiellement son rôle dans la gestion externalisée des frontières de l’UE dans le cadre de sa doctrine de «responsabilité partagée». En contrepartie, le Maroc fait de ce dossier une des cartes de négociation autour d’autres questions stratégiques pour Rabat, comme le dossier du Sahara occidental, les accords de libre-échange agricoles ou ceux de l’accès des bateaux de pêche européens aux eaux marocaines.

Les experts de Madar se basent sur les déclarations de la chercheuse Ana Uze-lac, pour expliquer cet embrouillamini politique et les intérêts obscurs du makhzen : «Les politiques de l’UE vis-à-vis de l’Afrique du Nord, notamment de la Tunisie et du Maroc, s’articulaient autour de deux grands paradigmes : la libéralisation des échanges (découlant des accords de libre-échange et d’association aux résultats asymétriques) et la réduction des migrations, qu’elles soient régulières ou irrégulières.» Ces deux agendas politiques étaient souvent incohérents.

C’est dire clairement que «l’agenda européen est dominé désormais par la gestion des migrations (et donc) au chantage européen des visas contre un accord global de réadmission, le Maroc brandit la carte du contrôle des frontières européennes»

Il est bon de rappeler qu’«ils sont 1360 Soudanais et 450 Sud-Soudanais à avoir atteint le Maroc», selon le Haut-Commissariat des réfugiés (HCR) à Rabat. Ces déplacés ont fui l’enfer libyen pour entrer au Maroc. Leur objectif : atteindre l’Europe depuis les côtes nord ou sud du Maroc. 

En conclusion, selon la même étude, «les politiques migratoires marocaines, espagnoles et européennes s’accordent à transformer le Maroc en terre d’immobilité pour les migrants. Malgré la faiblesse de ces flux, les migrants au Maroc font face à la violence aux frontières, aux déplacements forcés, à l’enfermement périodique et aux stratégies d’épuisement physique et psychologique, depuis 2002». 

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