Devenue le premier fournisseur de l’Europe en gaz naturel à la place de la Russie, la Norvège a douché hier les espoirs d’une majorité de pays européens qui souhaitent un plafonnement du prix des importations de gaz pour alléger leur facture énergétique.
A l’issue d’un entretien téléphonique – le deuxième en quelques jours – avec la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, le Premier ministre norvégien, Jonas Gahr Støre, s’est dit «sceptique» face à cette idée. «Nous sommes d’accord pour avoir un dialogue encore plus étroit avec l’UE à l’avenir concernant les différentes propositions qui sont sur la table», a-t-il dit dans un communiqué. «Nous abordons les discussions avec l’esprit ouvert, mais nous sommes sceptiques à l’égard d’un prix maximum pour le gaz», a-t-il ajouté.
Au milieu des mesures d’urgence évoquées vendredi par les ministres européens de l’Energie pour enrayer la flambée des factures de gaz et d’électricité, certains ont évoqué un plafonnement du prix des importations de gaz dans l’UE. Si la Commission européenne a proposé de plafonner le prix du gaz en provenance de Russie, plusieurs Etats comme l’Italie relèvent que celui-ci ne représente plus que 9% des importations européennes et préconisent un plafonnement complet des prix du gaz acheté par l’UE. Elle-même défavorable à cette idée qui pourrait pousser les fournisseurs de gaz naturel liquéfié (GNL) à aller voir ailleurs, la Commission doit rendre cette semaine son projet de texte législatif contenant toutes les mesures d’urgence sur l’énergie. La Norvège, qui a largement tiré parti de la flambée des cours, s’est jusqu’à présent montrée discrète sur la question d’un plafonnement.
Soulignant l’importance du prix comme mécanisme d’ajustement de l’offre et de la demande, Oslo renvoie la balle aux groupes pétroliers et rappelle que les clients européens ont eux-mêmes insisté dans le passé pour des contrats au comptant (aux prix variables) plutôt que des contrats à long terme donnant plus de visibilité. «Un prix maximum ne changera rien au problème fondamental, à savoir qu’il y a trop peu de gaz en Europe», a estimé M. Støre hier.
Conséquence de la guerre en Ukraine, le pays scandinave a récemment supplanté la Russie au rang de premier fournisseur de gaz vers l’Europe grâce à une hausse de 8% de ses propres livraisons et, surtout, à la chute des livraisons russes. Envolée des prix et hausse de la production contribuent à remplir les caisses de l’Etat norvégien.
Ses revenus pétrogaziers pourraient atteindre 1500 milliards de couronnes (150 milliards d’euros) en 2022 – et 1900 milliards l’an prochain –, pulvérisant le record établi l’an dernier (830 milliards), d’après les calculs de la banque Nordea Markets. «La plus importante contribution que la Norvège puisse apporter dans la situation actuelle est de maintenir une production élevée de gaz à l’avenir», martèle le ministre norvégien du Pétrole et de l’Energie, Terje Aasland.