Akli Gasmi explore le champ historique des regroupements de la population civile algérienne à travers l’emprise de son expérience personnelle et celle de sa communauté villageoise.
Oulkhou, toponyme évocateur d’un pan de l’histoire de la Révolution algérienne, largement évoqué par une kyrielle d’historiens, cependant qui reste substantiellement méconnu d’une grande proportion des nouvelles générations : les regroupements de la population civile algérienne dans des camps dépourvus, ne serait-ce, d’une once d’humanisme et dont le dessein inavoué était la rupture du lien ombilical qui liait la population à la Révolution algérienne.
Peu portée sur l’histoire en général et celle du combat libérateur pour l’émancipation du peuple algérien de la bride coloniale en particulier, la jeunesse algérienne doit se pencher sérieusement sur la lecture des ouvrages historiques qui ont été écrits par des auteurs à la proximité directe avec les faits relatés et qui sont issus du creuset essentiel de la terre algérienne, ayant été des témoins directs des exactions commises par le colonisateur français à l’encontre du peuple algérien. N’est-ce pas l’historien français, Charles André Julien, qui eut cette sentence, «Malheur aux peuples dont l’histoire a été écrite par leurs ennemis !»
Ô combien révélatrice du fossé béant qui sépare l’écriture de l’histoire de l’Algérie entre les auteurs issus de la colonisation majoritairement des missionnaires, talonnant l’armée française sur la route sanguinaire de son œuvre criminelle ; et les historiens algériens qui ont rarement eu droit au chapitre dans cette prédominance mémorielle en faveur des historiens de la colonisation et c’est dans cette noble perspective à la fois historique et pédagogique que l’auteur Akli Gasmi a inscrit son œuvre : historique de par sa volonté juste de mettre en relief la criminelle entreprise française qui, dans sa volonté, manifeste de séparer les combattants de l’ALN de sa matrice naturelle, le peuple eut recours à un stratagème d’une ruse sophistiquée : Les regroupements des populations, euphémisme sordide des camps de concentration si cher à l’armée française.
Et tel un chercheur d’os par analogie au roman du grand auteur algérien Tahar Djaout, lui -même issu du village Oulkhou et proche ami de l’auteur, qu’Akli Gasmi explore le champ historique des Regroupements de la population civile algérienne à travers l’emprise de son expérience personnelle et celle de sa communauté villageoise.
Oulkhou : Une histoire, un village
Akli Gasmi, enfant du village d’Ouklou et adolescent au temps de la déportation de la population de son village dans un camp de regroupement, est un témoin vivant et à la mémoire alerte de cette période on ne peut plus tragique et à pierre fendre des nuits glaciales de la présence française en Algérie. Néanmoins, les strates épaisses de la glace noire, à la glissade prompte à l’amnésie et au reniement, que le colonisateur français a entretenu des décades durant afin d’inhiber dans l’âme de la population colonisée tout sursaut de liberté, n'a pas entamé guère la mémoire vive de l’adolescent Akli Gasmi qui portera plus tard son projet d’écriture pour témoigner sur l’une des périodes charnières du combat libérateur (1957-1962).
Une période qui a vu l’acharnement de l’armée française à en finir avec la Révolution algérienne de par des d’opérations militaires de grande envergure ; et en saillie de toutes les viles manœuvres, les camps de regroupement. Et bien que la vie dans les camps de regroupement ne fut pas sans mauvais traitements allant de la torture physique et aux intimidations psychologiques pour amener à la population à la reddition et de surcroît entraîner sur sillage celle des combattants de l’ALN, le mot d’ordre érigé en immuable sacerdoce parmi les internés : ne jamais prêter le flanc au découragement et continuer la lutte jusqu’à la délivrance de la bride coloniale ! Le sermon crié dans le for intérieur de la population villageoise raisonna au-delà des murs du camp et se mua en ardent comburant dans l’âtre des maquis de l’ALN.
Oulkhou, un village de regroupement : un livre autobiographique et une thérapie contre l’oubli Ali Gasmi, dans son livre, a non seulement raconté les moments affligeants qu’il avait passés dans le camp de regroupement et qui ont été du même acabit que les autres centres de concentration des populations des autres villages, pour dire que le choix de son village comme titre du livre ne répondait qu'à une perspective représentant un cas parmi d’autres villages qui ont subi les mêmes exactions et ses innombrables appendices de souffrance.
Le livre de Akli Gasmi, enseignant à la retraite et ancien inspecteur de l’éducation nationale, né dans la région d’Azzefoune, pays qui a tant donné à la Révolution algérienne et l’un des fers de lance de la Wilaya III historique, a aussi acté dans son livre le rôle d’un thérapeute et pour sa propre personne pour exaucer les démons des terribles moments qu’il avait passés dans le camp de regroupement et contre l’oubli qui se répand comme un puissant vent Gibli en ces temps qui courent. Arezki Hatem