Un nouveau round de négociations entre le Hamas et Israël, sous la supervision américaine, pour un cessez-le-feu et la libération des otages israéliens et les prisonniers palestiniens s’ouvre cette semaine au Qatar, en présence des médiateurs qataris, égyptiens ainsi que les représentants de Tel-Aviv, auquel prendront part aussi le chef de la CIA, Bill Burns, et celui du Mossad, David Barnea, qui s’envoleront en ce début de semaine vers Doha. Transmise mercredi dernier, la réponse du Hamas à la proposition américano-israélienne semble avoir suscité de «l’optimisme» quant à l’aboutissement à un accord final, alors que les manœuvres dilatoires de l’Etat hébreu et quelques points divergents plombent encore les négociations, et ce, malgré le recul du Hamas sur certaines de ses positions.
Pendant que l’armée israélienne intensifie ses raids de jour comme de nuit, ciblant de nombreuses zones du sud, du centre et du nord de Ghaza, les négociations pour un cessez-le-feu et la libération des otages ainsi que celle des prisonniers palestiniens se poursuivent à Doha, la capitale qatarie, entre les représentants du Hamas et du gouvernement israélien, par l’intermédiaire du Qatar et de l’Egypte et sous la supervision de Washington.
Pour de nombreux médias américains et israéliens, contrairement aux précédentes, cette phase est qualifiée «d’optimiste» même si Israël campe encore sur certains points de l’accord portant sur le choix des prisonniers palestiniens à libérer ou encore sur le refus de donner des garanties sur l’arrêt total de la guerre. Cet «optimisme» vient de la réponse actualisée du Hamas à la proposition israélienne, remise mercredi dernier par l’Egypte et le Qatar et annoncée par le Mossad à travers un communiqué, repris par les médias de l’Etat hébreu.
Selon le site américain bien informé Axios, citant deux «hauts responsables israéliens» sans les nommer, «la réponse actualisée du Hamas était constructive et ouvrait la porte à des négociations plus détaillées qui pourraient aboutir à un accord», alors que le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken a parlé «de nombreux changements» dans la position du Hamas qui, selon lui, «allaient au-delà de ses positions précédentes». L’option israélienne relative à un accord partiel, qui permet la libération des otages par le Hamas et la poursuite de la guerre à Tel-Aviv, s’est heurtée à l’intransigeance de la résistance.
Et sous la pression de l’administration américaine, des médiateurs, des familles des otages et de l’opposition israélienne, Netanyahu est revenu sur sa position. Restait à en découdre avec l’article 8 de l’accord qui concerne la mise en œuvre de la première étape afin d’arrêter les conditions exactes de la deuxième étape, qui doit aboutir à un cessez-le feu durable à Ghaza.
Pour le Hamas, «ces négociations doivent porter uniquement sur le nombre et l’identité des prisonniers palestiniens qui seront libérés des prisons israéliennes en échange de chaque soldat israélien ou otage masculin vivant détenu à Ghaza. De son côté, Israël souhaite avoir la possibilité de soulever la question de la démilitarisation de Ghaza et d’autres questions», ont indiqué de nombreux médias américains.
Citant des sources proches du dossier, le site Axios est plus explicite. «Les responsables américains ont rédigé un nouveau texte pour l’article 8 afin de combler le fossé entre Israël et le Hamas et font pression sur le Qatar et l’Egypte pour qu’ils fassent pression sur le Hamas pour qu’il accepte la nouvelle proposition», écrit-il, en ajoutant que d’autres sources avec lesquelles il s’est entretenu lui ont affirmé que «si le Hamas acceptait le nouveau langage présenté par les Etats-Unis, cela permettrait de conclure l’accord».
La réponse «optimiste» du Hamas à la proposition américaine
La nouvelle proposition américaine porte sur un accord en trois phases qui pourrait aboutir à la libération des 120 otages restants détenus par le Hamas et à un «cessez-le-feu durable» à Ghaza. La réponse du Hamas a été transmise à Israël mercredi dernier. Pour des médias israéliens, «l’équipe de négociation israélienne a immédiatement commencé à étudier la réponse et a constaté qu’elle était bien meilleure que la réponse initiale envoyée par le Hamas le 12 juin».
Citant «de hauts responsables» de l’Etat hébreu, Axios affirme que cette réponse «permet de parvenir à un accord sur les articles 8 et 14, source des principales divergences entre les parties», avant de rappeler la déclaration d’un autre haut responsable : «Des progrès importants ont été réalisés, mais il reste encore un long chemin à parcourir et de sérieux défis à relever», soulignant au passage qu’il faudra plusieurs semaines pour parvenir à un accord.
La présence de Bill Burns à Doha, durant cette semaine, du Premier ministre du Qatar, du chef du Mossad et de celui des services du renseignement égyptiens est considéré comme «une avancée importante dans les négociations», surtout si les médiateurs arrivent à dépasser le point lié à l’exigence du Hamas d’un engagement écrit par les Etats-unis, l’Egypte et le Qatar, sur le fait que les négociations sur la deuxième phase de l’accord puissent se poursuivre sans limite de temps pendant que la première phase est en cours.
Selon Axios, les responsables israéliens et américains ont déclaré que Tel-Aviv estime qu’il s’agit d’un problème qui peut et doit être résolu afin de procéder à des négociations détaillées sur la mise en œuvre de l’accord. Vendredi dernier, le directeur du Mossad, David Barnea, «s’est rendu au Qatar et à rencontré le Premier ministre qatari», écrit Axios, en reprenant les propos de «deux hauts responsables» israéliens, ajoutant : «Barnea avait transmis un message aux médiateurs de l’accord selon lequel Israël n’accepte pas la demande du Hamas d’un engagement écrit concernant les négociations pour la deuxième phase de l’accord.»
Cependant, le bureau de Netanyahu a indiqué dans un communiqué que «les négociateurs israéliens se rendraient à Doha la semaine prochaine pour poursuivre les discussions». Jeu de pression, de coulisse ou juste des manœuvres pour gagner du temps ?
La question se pose surtout que de hauts responsables israéliens ont déclaré aux médias américains que «le fossé qui subsiste entre les parties concernant le cadre de l’accord se concentre sur l’article 14 de la proposition israélienne, lié à la durée des négociations que le Hamas et Israël sont censés entamer lors de la première étape de l’accord afin de s’entendre sur les termes de la deuxième phase de l’accord».
L’«engagement verbal et des garanties écrites» que le Hamas exige
L’article 14 de l’accord, faut-il le rappeler, stipule que les Etats-Unis, le Qatar et l’Egypte doivent «mettre tous leurs efforts pour garantir que ces négociations aboutissent à un accord et que le cessez-le-feu soit maintenu tant que les négociations se poursuivent».
Or, le Hamas, dans sa dernière réponse transmise mercredi dernier, a exigé que les mots «faire tous les efforts» soient supprimés et remplacés par le mot «assurer». Se référant à des déclarations obtenues auprès de responsables américains Axios écrit : «L’administration Biden avait présenté un compromis et proposé d’utiliser le mot ''s’engager'', que l’administration considère comme moins contraignant que le mot ''garantir'' mais plus contraignant que ''faire tous les efforts''».
Pour le même média, les responsables israéliens craignent que si l’accord incluait l’engagement exigé par le Hamas, ce dernier pourrait prolonger indéfiniment les négociations sur la deuxième phase de l’accord. Dans un tel scénario, il serait très difficile pour Israël de reprendre les combats sans que cela ne soit considéré comme une violation de l’accord.
Cependant, le Hamas n’est pas prêt à accepter un tel compromis. Dans une déclaration à l’agence américaine Associated Press, il avait déclaré qu’il veut un engagement verbal et des garanties de la part des médiateurs quant à la poursuite des négociations, et souhaitait des garanties sur papier.
Ce qui est pour l’instant sûr, c’est la participation de hauts responsables israéliens à Doha, en début de cette semaine, pour entamer un nouveau round des discussions, qui, selon Axios «porteraient sur un calendrier pour le redéploiement des forces de défense israéliennes à Ghaza, de l’identité et de l’ordre des prisonniers palestiniens qui seront libérés des prisons israéliennes et de la possibilité pour Israël d’opposer son veto à la libération de certains prisonniers».
Lors d’une conférence de presse, la porte-parole de la Maison-Blanche, Karine Jean-Pierre, a déclaré vendredi dernier que Biden espérait qu’un accord pourrait être conclu, mais a souligné qu’il restait encore beaucoup de travail à faire, avant de lancer, à l’adresse des journalistes : «Il est temps que la guerre prenne fin.»
Cette guerre génocidaire, menée par Israël contre Ghaza depuis neuf mois déjà, avec des armes et l’appui politique et financier de l’administration américaine, a fait 38 135 morts, 87 828 blessés, des dizaines de milliers de personnes portées disparues et dévasté toutes les infrastructures de base de la ville, rendant la vie de plus de deux millions de Ghazaouis impossible dans de nombreuses régions au nord, au centre et au sud de l’enclave.