La France a commencé hier à évacuer dans la journée ses ressortissants au Niger, où un putsch a renversé le président Mohamed Bazoum.
Quelque 600 Français se trouvent actuellement dans ce pays. L’évacuation va se dérouler sur une base du volontariat, et via des petits avions de transport militaires, non armés. Profitant du calme relatif dans Niamey, une opération d’évacuation par voie aérienne est en cours de préparation, a écrit hier l’ambassade de France aux Français du Niger, soulignant qu’elle fait l’objet «d’une coordination avec les forces nigériennes».
Le ministère des Affaires étrangères a ajouté que la France pourrait évacuer également «des ressortissants européens qui souhaiteraient quitter le pays». Cette décision est justifiée par les «violences qui ont eu lieu contre l’ambassade de France à Niamey et la fermeture de l’espace aérien qui laisse les Français sans possibilité de quitter le pays par leurs propres moyens».
L’Allemagne a recommandé également «à tous ses ressortissants à Niamey d’accepter l’offre» de la France de les évacuer à bord des avions qu’elle a affrétés pour faire partir du Niger ses citoyens. Un premier avion a décollé hier de Paris à la mi-journée, a indiqué une source informée de l’opération d’évacuation. L’Italie a, pour sa part, annoncé se tenir prête à évacuer par un avion spécialement affrété ses ressortissants de Niamey, soit quelque 90 personnes sur un total d’un peu moins de 500 Italiens au Niger, dont la
plupart sont des militaires.
«Déclaration de guerre»
La France, ex-puissance coloniale dans la région et soutien indéfectible du président Bazoum, séquestré depuis le 26 juillet dans sa résidence présidentielle, apparaît comme la cible privilégiée des militaires qui l’ont renversé, dirigés par le général Abdourahamane Tiani. Ils l’ont accusée lundi de vouloir «intervenir militairement», ce qu’a démenti la cheffe de la diplomatie française, Catherine Colonna, qui a dénoncé «les slogans anti-français qui ont notamment fleuri lors d’une manifestation devant l’ambassade de France à Niamey dimanche». Des milliers de manifestants favorables au putsch militaire ont voulu entrer dans l’ambassade, avant d’être dispersés par des tirs de grenades lacrymogènes. Les généraux nigériens ont affirmé que les tirs de gaz lacrymogène avaient fait «six blessés, pris en charge par les hôpitaux» de la capitale.
Le président français, Emmanuel Macron, avait menacé dimanche de répliquer «de manière immédiate et intraitable» à toute attaque contre les ressortissants de la France et ses intérêts au Niger. Lundi soir, Ouagadougou et Bamako ont affirmé que toute intervention militaire pour rétablir Mohamed Bazoum serait considérée «comme une déclaration de guerre» à leurs deux pays et «entraînerait un retrait du Burkina Faso et du Mali de la Cédéao (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest), ainsi que l’adoption de mesures de légitime défense en soutien aux forces armées et au peuple du Niger».
Lutte antiterroriste
Cette mise en garde survient au lendemain de la menace d’usage de «la force» proférée par les dirigeants ouest-africains, soutenus par leurs partenaires occidentaux, dont la France. Dimanche, les dirigeants de la Cédéao réunis à Abuja ont fixé un ultimatum d’une semaine à la junte militaire au Niger pour un «retour complet à l’ordre constitutionnel», affirmant ne pas exclure un «recours à la force» si ce n’était pas le cas. Ils ont également décidé de «suspendre toutes les transactions commerciales et financières» entre ses Etats membres et le Niger, et de geler les avoirs des responsables militaires impliqués dans le coup d’Etat.
Les pressions pour pousser les auteurs du coup d’Etat du 26 juillet à rétablir rapidement «l’ordre constitutionnel» s’accumulent, venant de l’ensemble des partenaires occidentaux et africains du Niger, pays jugé essentiel dans la lutte contre les groupes terroristes qui ravagent certaines parties des pays du Sahel depuis des années. La France et les Etats-Unis, notamment, y déploient respectivement 1500 et 1100 soldats qui participent à la lutte antiterroriste. Le Niger est l’un des pays les plus pauvres du monde, en dépit de ses ressources en uranium.
La Commission européenne a estimé hier qu’il n’y avait «pas de risque» pour l’approvisionnement en uranium de l’UE après le putsch au Niger, pays représentant un quart des approvisionnements des Européens, et ce, en raison des stocks déjà constitués.