Négociations sur un cessez-le-feu à Ghaza : Pourquoi ça bloque

21/08/2024 mis à jour: 14:52
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Le secrétaire d'Etat américain, Antony Blinken, a rencontré le président égyptien Abdelfateh Al Sissi, au Caire - Photo : D. R.

Joe Biden a accusé le Hamas de faire «machine arrière» dans les négociations sur un cessez-le-feu à Ghaza. Le mouvement de résistance palestinien lui a aussitôt répondu à travers un communiqué incendiaire. Le Hamas accuse ouvertement l’administration américaine de faire le jeu de Netanyahu et de l’encourager dans sa frénésie guerrière. La copie présentée en guise de projet d’accord à Doha constitue «un coup d’Etat contre ce que les parties ont approuvé le 2 juillet dernier, sur la base de l’annonce de Biden le 31 mai et de la résolution n° 2735 du Conseil de sécurité publiée le 11 juin», dénonce le Hamas.

Le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken, qui a entamé dimanche sa 9e tournée au Moyen-Orient, est arrivé hier en Egypte avant de se rendre au Qatar.

L’objectif affiché de cette tournée est de rapprocher les positions des uns et des autres en vue de la poursuite des négociations pour un cessez-le-feu à Ghaza. Après l’étape de Doha, les pourparlers sont censés reprendre dans quelques jours au Caire.

Ce nouveau cycle de discussions, entamé le 15 août au Qatar, a été marqué notamment par une nouvelle proposition américaine qui, de l’avis du Hamas, est clairement pro-israélienne et tient davantage compte des desiderata de l’entité sioniste.

Le mouvement de résistance palestinien, qui n’a pas envoyé de délégation à Doha, l’a donc rejetée au moment même où Biden affirmait : «Nous n’avons jamais été aussi proches d’un accord.»

Au cours de son escale égyptienne, c’est dans la nouvelle ville d’El Alamein, que le président égyptien Abdel Fattah Al Sissi a reçu son hôte américain.

«Aujourd’hui, le président Abdel Fattah Al Sissi a reçu le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken et la délégation qui l’accompagne, en présence du ministre des Affaires étrangères, Badr Abdel Aty, du général de division Abbas Kamel, chef des renseignements généraux, ainsi que de l’ambassadrice des Etats-Unis en Egypte, Herro Mustafa Garg» a indiqué la présidence égyptienne.

Le sujet phare de cet entretien a porté sur «les efforts conjoints de médiation égypto-américano-qataris pour un cessez-le-feu à Ghaza et l’échange de détenus», a précisé la même source. «Des points de vue ont été échangés sur les résultats de la récente réunion de négociation tenue la semaine dernière à Doha, ainsi que sur les moyens de faire évoluer la situation et de réaliser des progrès lors des négociations qui se tiendront au Caire.»

«Il faut une reconnaissance de l’état palestinien»

Blinken a informé le président Al Sissi des résultats de sa visite en Israël, soulignant «l’engagement des Etats-Unis dans les efforts visant à calmer la situation et à parvenir à un accord», ajoute la présidence égyptienne dans son communiqué.

De son côté, le président égyptien «a souligné que le moment était venu de mettre fin à la guerre en cours, de privilégier la voix de la raison et de la sagesse» ainsi que «le langage de la paix et de la diplomatie».

Al Sissi a en outre mis en garde contre «le danger d’étendre le conflit au niveau régional, une extension dont les conséquences sont difficiles à imaginer». «Le cessez-le-feu à Ghaza doit être le début d’une reconnaissance internationale plus large de l’Etat palestinien et de la mise en œuvre de la solution à deux Etats, car c’est le principal garant de la stabilité de la région», a insisté le président égyptien auprès de son hôte.

La veille, le chef de la diplomatie américaine s’est entretenu avec le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, avec le ministre de la Défense, Yoav Gallant, et le président de l’Etat hébreu, Isaac Herzog. Au cours de cette visite, Netanyahu lui a «confirmé qu’Israël acceptait le plan de compromis de Washington pour une trêve», en invitant le Hamas «à en faire de même», a affirmé Blinken lundi depuis Tel-Aviv.

En prévision des discussions qui se tiendront au Caire, «le Premier ministre Netanyahu a promis d’envoyer son équipe de négociateurs à Doha ou en Egypte pour tenter d’achever ce processus», a ajouté M. Blinken, selon des propos rapportés par l’AFP.

«Ce que je dirais au Hamas et à sa direction, c’est que s’ils se préoccupent vraiment du peuple palestinien, qu’ils prétendent d’une certaine façon représenter, alors ils doivent dire oui à cet accord et travailler à une entente claire sur la façon de le mettre en œuvre», fera observer le secrétaire d’Etat américain. «La seule manière, la plus rapide, la meilleure et la plus efficace de soulager la terrible souffrance des Palestiniens (…) est de mener à bien cet accord», a-t-il répété.

Au cours de la convention démocrate, ce lundi, qui a eu lieu à Chicago, le président américain, Joe Biden, a déclaré à la presse que «le Hamas est en train de faire machine arrière» dans les négociations tout en maintenant qu’un accord est «toujours possible». Des propos qui ont suscité l’ire du mouvement de résistance palestinien.

Dans un communiqué diffusé hier en réponse à Biden, le Hamas a tenu à clarifier sa position. Le mouvement a d’abord indiqué que la copie qui a été présentée à Doha constitue «un coup d’Etat contre ce que les parties ont approuvé le 2 juillet dernier, sur la base de l’annonce de Biden le 31 mai et de la résolution n° 2735 du Conseil de sécurité publiée le 11 juin».

«Ce coup d’Etat est une réponse américaine et un acquiescement aux nouvelles conditions du terroriste Netanyahu et à ses projets criminels envers la bande de Ghaza», poursuit la formation dirigée par Yahya Sinwar.

«Un parti pris américain flagrant en faveur de l’occupant»

Les déclarations de Biden et Blinken mettant en cause la bonne foi du Hamas dans ces négociations sont «des allégations trompeuses et ne reflètent pas la véritable position du mouvement, qui souhaite mettre fin à l’agression», martèlent les auteurs du document.

Pour le Hamas, ces déclarations trahissent un «parti pris américain flagrant en faveur de l’occupation israélienne» et une «tentative de liquidation de la cause palestinienne». «C’est un nouveau feu vert américain au gouvernement israélien pour commettre davantage de crimes contre des civils sans défense, dans le but d’exterminer et de déplacer notre peuple», fustige le parti islamiste.

Le Hamas a également précisé dans son communiqué que les médiateurs égyptien et qatari «ont agi de manière positive et responsable lors de tous les cycles de négociation précédents», insistant sur le fait que «c’est toujours Netanyahu qui a fait obstacle à la conclusion d’un accord en émettant de nouvelles conditions et exigences».

Le mouvement de résistance palestinien a fait savoir dans la foulée que la nouvelle proposition américaine dite «de compromis» «répond aux conditions de Netanyahu et est cohérente avec elles».

Le Hamas évoque l’abandon de points importants du plan Biden originel, en citant notamment le rejet par le Premier ministre israélien d’un cessez-le-feu permanent, le refus d’un retrait total de l’armée israélienne de la bande de Ghaza et son obstination à continuer d'occuper l’axe Netzarim, le passage de Rafah et le corridor de Philadelphie.

Hier justement, Netanyahu a une nouvelle fois réitéré son opposition ferme à une cessation des hostilités en cas d’accord. Selon Al Jazeera, il a déclaré : «Nous n’acceptons aucune proposition qui nous oblige à mettre fin à la guerre.»

Le Hamas a tenu, pour finir, à réaffirmer son attachement aux termes de l’accord original présenté par Biden et qu’il a approuvé auprès des médiateurs le 2 juillet, incitant ces derniers à convaincre la partie israélienne de l’accepter.

Il a appelé par ailleurs l’administration américaine à «renoncer à sa politique de partialité aveugle à l’égard des criminels de guerre israéliens, à arrêter de couvrir politiquement et militairement l’armée d’occupation fasciste dans sa guerre d’extermination menée dans la bande de Ghaza et à œuvrer sérieusement pour y mettre un terme».

Nouvelle attaque contre une école à Ghaza : 10 morts

Dix personnes, parmi lesquelles des femmes et des enfants, ont été tuées hier suite à un bombardement aérien qui a ciblé l’école Moustafa Hafiz abritant des déplacés à Haï Al Rimel, à l’ouest de la ville de Ghaza, rapporte l’agence Wafa. Cette attaque a fait en outre des dizaines de blessés, ajoute la même source.

Un autre raid meurtrier, mené hier après-midi contre un marché à Deir Al Balah, au centre de la bande de Ghaza, a fait huit morts, «majoritairement des femmes et des enfants», indique l’agence d’information palestinienne.

Le bilan de l’agression sioniste contre la bande de Ghaza s’élève désormais à 40173 morts et 92 857 blessés, selon le ministère de la Santé de Ghaza. 34 personnes ont été tuées et 114 autres ont été blessées en 24 heures, entre lundi soir et hier matin, souligne la même source.

De son côté, l’armée israélienne a annoncé hier avoir récupéré les corps de six otages «lors d’une opération menée avec le renseignement intérieur à Khan Younès», affirme l’AFP. Ces otages ont «tous été annoncés morts ces derniers mois», précise l’agence française. M. B.

 

 

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