Une descente policière des plus insolites a eu lieu dans la nuit de lundi à mardi derniers à bord du navire de transport des voyageurs Bordj Badji Mokhtar, en partance à partir du port d’Alger vers Marseille. Des dizaines d’agents des Brigade de recherche et d’investigation (BRI), Brigade de répression du banditisme (BRB) et Brigade mobile de la police judiciaire (BMPJ) ont investi le navire,vers 23h, accompagnés de leurs collègues de la police scientifique et ont passé au peigne fin les cabines et les véhicules des voyageurs qu’il transportait alors qu’il s’apprêtait à larguer les amarres, c’est-à-dire après l’accomplissement des formalités administratives douanières.
Surpris, les passagers suivaient et filmaient la scène avec leurs téléphones mobiles du haut du bateau. Visiblement, les services de police ont agi sur la base d’une information faisant état de la présence, à bord du bateau, de produits suspects.
La découverte a été surprenante. Une importante quantité de produits alimentaires subventionnés, notamment la semoule, l’huile, la farine et des pâtes, a été découverte dans les fourgons et les véhicules de certains voyageurs. Un volume, apprend-on de sources sûres, qui démontre «qu’il s’agit d’un réseau de trafiquants et non de produits destinés uniquement à la consommation personnelle des propriétaires des véhicules». L’opération a duré plusieurs heures et a ciblé l’ensemble des voitures qui étaient à bord, et en présence d’un procureur du tribunal de Sidi M’hamed, à Alger, territorialement compétent.
Ce n’est que vers 10h (hier matin) que le navire a été libéré pour reprendre la mer et rejoindre sa destination, et ce, après le débarquement de nombreux passagers suspects. Il est quand même important de relever que les véhicules transportant les produits en question sont tous passés par un contrôle douanier, puisque le navire était sur le point de quitter le port d’Alger. Comment expliquer le fait que les douaniers n’ont rien vu ? La question reste posée et les réponses ne peuvent être données que par l’enquête ouverte par la justice.
C’est quand même la première fois que des produits alimentaires subventionnés font l’objet d’une exportation frauduleuse, par voie maritime, à bord d’un navire de transport de voyageurs. Habituellement, les réseaux de trafiquants agissent au niveau des zones frontalières terrestres, où il est plus facile «d’acheter» la sécurité de la route utilisée pour acheminer des cargaisons de farine, sucre, huile, pâtes, lait, semoule ainsi que le carburant, tous subventionnés par l’Etat, mais aussi de médicaments, vers les pays voisins comme la Tunisie, le Mali, le Niger, la Mauritanie et le Maroc, la Libye et même au-delà.