L'arrivée tardive des secours pour venir en aide à l'embarcation de migrants ayant sombré dimanche dans le sud de l'Italie pose question vendredi 3 mars, alors que le bilan de cette tragédie est monté à 68 morts.
«Migrants: enquête sur les secours», a titré en une le quotidien Il Corriere della Sera. «Le parquet veut comprendre pourquoi le protocole des interventions en mer n'a pas été activé», explique-t-il.
Selon les informations disponibles à ce stade, il y a un trou de six heures dans la nuit de samedi à dimanche entre le moment où l'embarcation transportant quelque 180 personnes a été repérée et le début des opérations de sauvetage. L'embarcation surchargée a fait naufrage non loin du rivage, en pleine tempête, probablement après avoir heurté un banc de sable.
Selon le dernier bilan officiel publié par la préfecture de Crotone, la ville de Calabre où une chapelle ardente abrite les cercueils des victimes, 68 personnes sont mortes dans cette tragédie, après la découverte jeudi du corps d'un jeune adulte. 54 victimes ont été identifiées, dont 48 de nationalité afghane, trois de nationalité pakistanaise, une de nationalité syrienne, une de nationalité palestinienne et une de nationalité tunisienne, selon la préfecture.
Le parquet de Crotone a ouvert une enquête sur l'organisation des secours pour déterminer si d'éventuels délits ont été commis en mettant en œuvre trop tard les opérations. Les carabiniers de Crotone ont donc été chargés de reconstituer la chronologie des signalements reçus par les garde-côtes et les douanes et des actions entreprises par la suite. L'Agence européenne de surveillance des frontières, Frontex, avait indiqué en début de semaine qu'un de ses avions de patrouille avait repéré samedi soir un bateau «en forte surcharge de passagers», parti la semaine dernière d'Izmir en Turquie, se dirigeant vers l'Italie et avait alerté les autorités italiennes.
À partir des données recueillies par les carabiniers, le parquet devra déterminer si les règles de secours en mer ont été respectées ou si des erreurs ont été commises, et dans l'affirmative par qui. En droit italien, les possibles délits commis dans cette affaire sont «non-assistance à personne en danger» et «négligence ayant provoqué une catastrophe».
Le dossier des migrants est un sujet politique très sensible en Italie, pays de première entrée où sont arrivées des centaines de milliers de migrants ces dernières années. Rome reproche à ses partenaires de l'Union européenne un manque de solidarité dans la gestion de cet épineux problème. Selon le ministère italien de l'Intérieur, près de 14.000 migrants ont débarqué en Italie depuis le début de l'année, contre environ 5.200 durant la même période l'an dernier et 4.200 en 2021.