Moufdi Zakaria Cheikh. DG de TotalEnergies Algérie : «L’interconnexion Algérie-Europe est un atout majeur»

15/11/2023 mis à jour: 00:54
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-La transition énergétique est au cœur de cet événement. Comment appréhendez-vous, au niveau de Total, ce défi de dépollution de l’industrie pétro-gazière ? 
 

TotalEnergies Algérie est ravie d’assister à la 11e édition du Napec, dont le thème est la transition énergétique et l’innovation technologique. L’ambition de TotalEnergies est d’être un acteur majeur de la transition énergétique, en route ensemble avec la société, vers la neutralité carbone en 2050. Quelle est notre stratégie pour atteindre cette ambition ? Il s’agit à la fois de fournir l’énergie dont le monde a besoin aujourd’hui, notamment le gaz, en substitution au charbon, qui je le rappelle émet deux fois plus de CO2 que le gaz. Et de le faire de manière responsable et durable, c’est-à-dire de réduire au maximum les émissions, scope 1, 2 et méthane. En parallèle, nous travaillons à accélérer le développement d’une offre d’énergies bas carbone, donc de l’électricité renouvelable, ainsi que les nouvelles molécules, comme l’hydrogène, les biofuels, les biogaz, et ce, que nous appelons les fuels synthétiques, ceux issus de la réaction circulaire entre le CO2 et l’hydrogène. 
 

-Existe-t-il une demande algérienne sur ces solutions ? 

Il faut savoir déjà que le potentiel pour le renouvelable existe, notamment dans l’ensoleillement et l’espace. Un des atouts, en sus de ceux que je viens de citer, est incontestablement l’interconnexion entre l’Algérie et l’Europe via notamment le pipe et le gaz. Aujourd’hui, un mégawatt de solaire développé en Algérie aide non seulement à réduire les émissions en Algérie mais aussi en Europe. Il faut savoir que le gaz qui n’est pas consommé en Algérie, en surplus, est exporté vers l’Europe, qui à son tour va déplacer le charbon qui émet plus de carbone. Donc tout est interconnecté, du coup, l’offre, il faut la regarder de manière globale, et par le prisme Algérie-Europe. 

N’oublions pas que le pic de la demande d’électricité en Algérie arrive en été, à contre cycle avec le pic en Europe, qui arrive lui est en hiver. Il y a vraiment une complémentarité et un atout considérable à saisir davantage. Il existe donc effectivement une demande pour fournir de l’électricité bas carbone en Algérie, mais il faut la prendre en compte de manière globale avec la demande au niveau du bassin méditerranéen ; parce qu’il y a cette interconnexion dont peut bénéficier l’Algérie. 

Par ailleurs, et à notre niveau, c’est-à-dire dans nos installations, il y a des demandes réelles sur les sites pétroliers et gaziers pour une génération électrique propre répondant aux besoins des opérations afin de faire fonctionner les usines. Aujourd’hui, l’électricité que nous utilisons est issue des turbines à gaz, la solution la plus triviale est dans la solarisation des sites, en installant des centrales solaires produisant l’électricité qui fera tourner les usines. On y travaille ! Il y a une étude aujourd’hui qui est en cours et qui est conduite conjointement avec notre partenaire Sonatrach sur TFT, on essaye même d'y installer des batteries. Une fois que l’étude confirmera l’intérêt, les gains associés et l’impact sur les opérations, on passera à la mise en place. Il sera fait de même pour le bassin de Berkine avec nos partenaires Sonatrach, Oxy et Eni. 
 

-Quand passerez-vous de la phase études à la réalisation sur le terrain ? 

On espère la finalisation des études aussi bien sur TFT que sur le bassin de Berkine vers la fin de l’année 2024, et décider de la mise en place. 

-N’est-ce pas un peu long, alors qu’il y a urgence à atteindre l’objectif de réduire les émissions de carbone ? 

C’est la période nécessaire pour effectuer des études pouvant vraiment bien quantifier et évaluer la mise en place des solutions, les gains en gaz et puis leur impact sur les opérations. Il y a aussi les Side Survey pour choisir le meilleur site où commencer à le faire. Sur TFT, on est plus ou moins sur un terrain plat, donc c’est moins complexe que sur Berkine, où la topologie du terrain n’est pas la même entre le nord et El Merk, où il y a beaucoup de dunes. Il y a donc aussi beaucoup de travail de terrain à faire. 
 

-Pensez-vous que l’Algérie soit dans l’obligation d’aller vers plus de décarbonation pour vendre plus de gaz à son principal marché qu’est l’Europe ? 

Effectivement, il y a des demandes, de toutes les parties prenantes. Beaucoup de pays sont engagés vers des ambitions de neutralité carbone, le gaz algérien fait partie de l’équation. Je rappelle que TotalEnergies en 2022 a vendu 48 millions de tonnes de LNG, gaz liquéfié, nous nous plaçons en troisième position mondiale sur le LNG et 99% de ce gaz ont été vendus à des pays qui sont engagés vers la neutralité carbone à l’horizon 2050. 
Le gaz est une composante importante de leur feuille de route de neutralité pour réduire l’utilisation du charbon ou de l’huile dans la génération électrique. Et encore une fois, cette interconnexion Algérie-Europe joue en faveur de l’Algérie. La neutralité carbone est une affaire, je dirais, commune. 
 

-De nouveaux projets pour Total-Algérie en perspective ? 

Nous avons, dans le cadre de Tinfouyé Tebenkourt, TFT, un projet de 750 millions de dollars pour le développement des deux projets TFT-II, TFT-Sud, qui consistent en des forages de puits additionnels. Et aussi la mise en place de compressions pour faire baisser les pressions et faire monter la production à 100 000 barils/jour en 2026. 

Pour ce qui est de Berkine, et dans le cadre du nouveau contrat de partage production signé en 2022 avec nos partenaires pour 25 ans, il y a un engagement d’investissement de 4 milliards de dollars pour développer un milliard de barils additionnels. 

 

Propos recueillis par  Nadjia Bouaricha
 

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