De la nourriture, de l’eau, du lait et des couches-bébé pour les migrants subsahariens irréguliers, protégés désormais par la sécurité tunisienne et installés dans plusieurs zones limitrophes de la ville de Sfax, suite aux incidents de début juillet avec les citoyens locaux. Répartition des groupes entre Bab Jebli, sous les remparts, le Palmarium, la Mosquée Sidi Lakhmi et près du lycée Nasria, soit dans un rayon ne dépassant pas les 500 mètres, pour aider à la prise en charge.
Une équipe de 12 personnes assure le soutien à ces groupes, avec l’aide de citoyens bénévoles. C’est le bureau de l’UNHCR de Tunis qui a financé pour l’alimentation du 8 au 11 Juillet, alors que c’est l’association «Tunisie, terre d’accueil» qui a fourni l’eau. La prise en charge sanitaire et l’hygiène sont assurées par les autorités publiques. Le délégué en charge du gouvernorat de Sfax, Habib Belghouti, a expliqué à l’Agence TAP que «le nombre de migrants irréguliers nécessitant une protection a diminué au fil des jours». Cette réduction serait due, selon un militant de la société civile à Sfax, à «leur départ vers d’autres villes tunisiennes, notamment Tunis, puisqu’ils ne se sentent plus en sécurité ici».
L’après-Sfax
Les informations recueillies dans les autres régions tunisiennes laissent entendre que trois bus de migrants irréguliers, avec 159 personnes à bord, sont installés à Tataouine alors que 37 personnes ont été accueillies à Médenine. Plusieurs autres dizaines de migrants ont été logés sur les hauteurs de l’oasis de Tameghza dans le gouvernorat de Tozeur. Ces divers groupes de migrants sont composés de rescapés de tentatives avortées de migration irrégulière vers l’Italie. Auparavant, les autorités tunisiennes les récupèrent en mer, avant de les libérer une fois à terre. Après les affrontements de Sfax début juillet, qui ont coûté la vie à un quadragénaire sfaxien, les autorités ont décidé d’éloigner les Subsahariens de Sfax pour veiller à leur sécurité et éviter de nouveaux affrontements. Certains Subsahariens ont accepté leur déplacement, alors que d’autres ont préféré rejoindre seuls des régions où ils chercheront du travail pour réunir l’argent nécessaire à la migration irrégulière.
Les derniers événements suite aux incidents de Sfax laissent déjà prévoir des changements concernant la présence des migrants en Tunisie. «Sfax ne sera plus la plaque tournante de la migration clandestine en Tunisie, car les locaux ne trouvent plus leurs comptes», explique Habib, vieux militant de la société civile. «Les migrants irréguliers vont chercher un nouveau port de départ vers l’Italie, peut-être les côtes de Mahdia, surtout qu’ils peuvent trouver du travail dans la région. Les autorités peuvent également les chasser loin des côtes », ajoute-t-il. La société civile tunisienne cherche à disposer d’un rôle dans la gestion de ce dossier de migrants irréguliers, surtout que le pouvoir public a déjà dépêché le Croissant-Rouge tunisien auprès d’eux à Ben Guerdane, aux frontières libyennes, ce qui prouve la disposition des pouvoirs publics à déléguer la mission.
Dans ce sens, le président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH), Bassem Trifi, a annoncé hier, lors d’une conférence de presse organisée par l’Institut arabe des droits de l’homme (IADH), que la LTDH disposait déjà d’un projet dans ce sens, avec l’organisation «Tunisie, terre d’accueil» pour contribuer à la résolution de la problématique des migrants irréguliers. Encore faut-il que les autorités publiques ne soient pas sélectives dans le choix des ONG de la société civile à associer.
Un autre point mérite d’être pris en considération dans cet épineux dossier, surtout qu’il ne saurait être résolu à l’écart des autres intervenants. Il s’agit, bien sûr, de la conférence internationale prévue le 23 juillet à Rome sur la question de la lutte contre la migration irrégulière avec la participation de pays de l’UE, des pays de la rive Sud de la Méditerranée et, éventuellement, de certains pays africains, sources de la migration.
Le ministre italien des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Antonio Tajani, a déjà annoncé cette conférence lors du dernier sommet de l’UE à Bruxelles les 29/30 juin 2023, quand les Européens sont tombés d’accord sur la répartition des migrants irréguliers.
Ce serait le passage à l’acte de cet accord, surtout que les Italiens n’ont eu de cesse de tirer du tiroir le plan Mattei avec ses fameux projets de développement des pays du Sud. La question de la migration irrégulière est très complexe et la Tunisie ne saurait la résoudre seule.
Tunis
De notre correspondant Mourad Sellami
Des migrants menacent de jeter en mer une mineure au large de Bizerte
Une vingtaine de migrants irréguliers ont été stoppés avant-hier, 10 juillet, par les gardes-côtes tunisiens au large de Bizerte au nord de la Tunisie. Il a fallu sept heures à la patrouille marine pour prendre le contrôle de l’embarcation irrégulière, puisque ses occupants ont menacé d’y mettre le feu et de jeter en mer la mineure qui se trouvait avec eux. De longues négociations ont abouti à la reddition du groupe à bord du navire, escorté jusqu’au port. Le parquet a ordonné de traduire tous les occupants devant la justice. Ils sont tous Tunisiens et il y avait parmi eux deux femmes et une jeune mineure. Les côtes de Bizerte connaissent rarement des tentatives de migration irrégulière, parce que les courants y sont forts et la distance éloignée par rapport au littoral italien. M.S.