Meziane Meriane. Pédagogue et ancien syndicaliste de l’éducation : «Les activités sportives et artistiques aident au développement mental des enfants»

22/09/2024 mis à jour: 05:33
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Meziane Meriane

C’est la rentrée des classes aujourd’hui. Que pensez-vous des nouveautés apportées cette année au plan de l’allégement des programmes pour les classes de première et deuxième années primaires ?


L’une des décisions principales de cette rentrée est la suppression de deux matières, à savoir l’éducation civique et des sciences pour les élèves de première et deuxième années du cycle primaire. Cette mesure répond à une revendication de longue date des parents d’élèves. La surcharge des matières et le poids excessif du cartable ont longtemps été considérés comme des freins à l’épanouissement des jeunes apprenants. Alléger le programme scolaire est un pas vers une meilleure prise en charge des besoins pédagogiques et physiques des enfants. La réduction du programme s’appuie sur les recommandations de spécialistes, entre autres celles développées par le psychologue suisse Piaget, relatives au développement cognitif de l’enfant. A cet âge-là, les apprenants doivent consacrer plus de temps à des activités créatives, comme l’éducation artistique, la musique et le sport, plutôt que d’être surchargés par des matières théoriques, surtout au deuxième stade préopératoire de la théorie de Piaget.


En tant que pédagogue, la baisse du volume horaire et le renforcement des activités sportives et artistiques vont-ils permettre, justement, d’améliorer les conditions d’acquisition des connaissances pour les apprenants ?


En se référant à une étude faite par l’université du Queensland (Australie), les activités sportives et artistiques sont importantes pour le développement mental des enfants. Elles leur permettent de développer leur concentration, leur attention, leur mémoire et leur créativité. 

Lorsque les enfants pratiquent une activité sportive, ils se sentent mieux moralement. Plus généralement, pratiquer une activité, qu’elle soit sportive ou autre, favorise l’estime de soi et aide à réduire le stress et l’anxiété. Et, cela ne peut qu’être bénéfique pour l’apprentissage de l’enfant.


Cette année, il y a eu un décrochage de presque quatre mois pour les élèves à l’occasion des vacances scolaires. Est-ce une bonne chose ?

Partout dans le monde, le nombre de semaines d’enseignement est de plus trente-cinq semaines. Chez nous, nous sommes à moins de trente semaines. Or, en règle générale, le volume des programmes nécessite plus de trente semaines. Il y a donc nettement une inadéquation entre le volume d’enseignement et le volume horaire nécessaire au parachèvement du programme scolaire. 


Le décrochage de l’enfant risque ainsi de faire perdre les mécanismes d’apprentissage. Si les vacances scolaires sont nécessaires pour le développement de l’enfant, son apprentissage a, également, une importance capitale. Il y a, à mon avis, nécessité de se référer aux exigences des rythmes scolaires appliquées à travers le monde, tout en approfondissant la réflexion sur les modes de décrochage les plus adaptés à notre pays. Il faut, par exemple, penser à accorder des vacances scolaires par région. Il s’agit, pour ce faire, de réfléchir à un calendrier scolaire en fonction des situations climatiques et des spécificités de chaque région.


Quel bilan faites-vous concernant l’apprentissage des langues dans le primaire ?


On ne peut faire de bilan sans évaluation. Il y a différents modes d’évaluations : une évaluation diagnostique de l’enseignant au début de l’année, une évaluation formative tout au long de l’année, une évaluation sommative qui se fait à la fin de chaque trimestre ou bien en fin d’année et, la dernière, qu’on appelle évaluation de métrication qui se fait à la fin de chaque cycle (5e année primaire, BEM et baccalauréat). 

Pour le cycle primaire, les résultats obtenus à travers le pays doivent faire l’objet d’une étude scientifique pour évaluer la réforme mise en place et pour évaluer l’apprentissage des langues. De manière globale, beaucoup reste à faire, car la majorité de nos enfants ne maîtrisent pas correctement les langues nationales. Idem pour les langues étrangères. Je pense qu’une réflexion doit être menée pour y remédier éventuellement. Surtout lorsqu’on sait que l’enfant va se retrouver au primaire avec quatre langues (arabe, tamazight, français et anglais). Nous devons nous pencher sérieusement, et dès maintenant, sur la façon de faciliter l’apprentissage de ces langues.

Propos recueillis par M. Abdelkrim

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