Malware émirati

25/04/2024 mis à jour: 06:43
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Les réquisitoires contre les agissements des Emirats arabes unis (EAU), en Afrique notamment, se multiplient. 

Enlisé dans un conflit fratricide depuis une année, le Soudan fait la triste expérience de l’interventionnisme de la pétromonarchie, et une partie agissante de ses dirigeants ne se prive pas de s’en plaindre auprès des instances internationales. Le représentant de Khartoum à l’ONU a ainsi  accusé les EAU, il y a moins d’une semaine, d’être le parrain  direct du conflit armé qui déchire son pays, appelant la communauté diplomatique internationale et le Conseil de sécurité  à réagir pour amener ces pécheurs patentés en eaux troubles à cesser leurs nuisances. «Le conflit n’aurait jamais duré une année sans le soutien militaire qu’apportent les EAU aux Forces de soutien rapides (FSR)», avait notamment accusé le diplomate soudanais. 

Cette montée en cadence de la tension entre Khartoum et Abu Dhabi avait été précédée d’un clash en décembre dernier, ayant vu le gouvernement de Abdel Fattah Al-Burhan, chef de l’armée régulière et chef d’Etat de fait du Soudan, expulser une quinzaine de diplomates émiratis, en signe de protestation contre les actes hostiles répétés de l'émirat et son alignement sur les thèses et objectifs des rebelles notamment. Abu Dhabi s’est retrouvé dans l’obligation, cette fois, de produire une réponse à la requête de la diplomatie soudanaise en confiant au chef de sa mission diplomatique à l’ONU la tâche de démentir les accusations et de se présenter comme un défenseur de la stabilité et de la paix dans cette région d’Afrique, ne s’empêchant pas d’accuser le gouvernement en place de Khartoum de se chercher un bouc émissaire pour fuir ses responsabilités.  

Les informations en provenance de ce territoire tourmenté par la guerre civile, avec comme source des agences humanitaires, des observatoires militaires et autres journalistes, disent, quant à elles, le contraire. Abu Dhabi soutient bel et bien, militairement et logistiquement, les FSR commandées par Mohammed Hamdane Daglo, et veut absolument peser sur l’issue des événements. 

De gros titres de la presse internationale, dont Le Monde et le Wall Street Journal, avaient conforté, il y a quelque temps, les propos d’un dirigeant soudanais en rapportant,  qu’entre juin et septembre 2023, un véritable pont aérien avait été établi entre la capitale émiratie et une localité située sur le territoire tchadien et frontalière du Soudan, en théorie pour fournir les équipements nécessaires pour l’installation d’un hôpital de campagne. La zone est envahie par des dizaines de milliers de Soudanais fuyant la guerre, parmi les quelque 8 millions de déplacés provoqués depuis une année par le conflit. 

Les enquêtes publiées ont conclu que l’opération n’a visé ni plus ni moins qu’à couvrir l’acheminement d’armements pour renforcer le potentiel défensif et offensif des FSR.  

Le diplomate soudanais avait dans son réquisitoire onusien  cité l’Algérie comme l’autre pays ciblé en Afrique par les actes d’hostilité de la ténébreuse pétromonarchie. Alger, en janvier dernier, avait consacré un haut Conseil de sécurité pour traiter des hostilités affichées et mises en branle à l’encontre du pays par un «pays arabe frère». 

Opposition à l’adhésion de l’Algérie aux BRICS, divergences et coups tordus sur le dossier libyen et surtout financements substantiels de plans de déstabilisation du Sahel servant les visées du Maroc, sont autant de faits que retiennent les commentateurs sur la liste des motifs qui provoquent la colère d’Alger. «La patience a des limites», avait répondu le président Abdelmadjid Tebboune, invité à s’exprimer sur la question, lors de sa dernière rencontre avec la presse, fin mars dernier. Mettant à profit son énorme potentiel financier, la fédération émiratie se mêle de ce qui ne la regarde pas un peu partout dans le périmètre africain, selon les lignes de ses alliances et sous-alliances, après avoir joué un rôle des plus troubles dans le contexte du Printemps arabe. 

Depuis 2020, les  EAU sont liés par les accords d’Abraham avec Israël, tout comme le sont le Maroc et Bahreïn. D’aucuns y voient un élément d’explication du déploiement, aussi agressif que sournois, d’Abu Dhabi dans certains pays précis du continent.  
 

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