Emmanuel Macron a été interpellé à ce propos dès son arrivée aux aurores à Rungis, dans la banlieue sud de Paris, lors de sa première sortie au contact direct de ses concitoyens depuis le lancement du projet au début de l’année. Le président joue une part importante de son crédit politique sur cette réforme, mesure phare de son deuxième quinquennat et symbole de sa volonté affichée de réformer la France. La réforme, qui prévoit de relever l’âge minimal de départ de 62 à 64 ans, a fait descendre des millions de Français la jugeant «injuste» dans les rues depuis la première journée de grèves et manifestation le 19 janvier. «On sait tous que, vivant plus âgés, il n’y a pas de miracle : si on veut préserver un système par répartition, il faut qu’on travaille plus longtemps. Je ne dis pas que ça nous fait plaisir, ça ne fait plaisir à personne et si c’est un mensonge qui rassure, je préfère la vérité qui fâche», a déclaré Emmanuel Macron mardi devant la presse, vêtu d’une blouse blanche et naviguant entre les étals. «Tout le monde a du bon sens», a-t-il plaidé. «Dans l’ensemble, les gens savent qu’il faut travailler un peu plus longtemps en moyenne, tous, car sinon on ne pourra pas bien financer nos retraites», a-t-il ajouté.
«Plus de richesses pour le pays»
Il a défendu le report de 62 à 64 ans de l’âge de départ au nom de la défense d’un système qui est un «trésor» et constitue «le patrimoine de ceux qui n’en ont pas». Ce report, a-t-il dit, «permet de créer plus de richesses pour le pays». La France est l’un des pays européens où l’âge légal de départ à la retraite est le plus bas, sans que les systèmes de retraite ne soient complètement comparables. Le gouvernement a fait le choix d’allonger la durée de travail pour répondre à une dégradation financière des caisses de retraite et à un vieillissement de la population. Depuis le lancement de la réforme, Emmanuel Macron ne s’était quasiment pas exposé sur le sujet, hormis quand il avait lancé de sobres et laconiques messages dans des déplacements à l’étranger. Il n’était pas allé au contact direct des Français depuis trois mois, échappant de fait aux interpellations sur la réforme des retraites. Le président doit également se rendre samedi au Salon de l’Agriculture à Paris, rendez-vous incontournable des présidents français avec les agriculteurs et les régions rurales. Après une mobilisation en baisse pour la cinquième journée de protestation du 16 février en pleines vacances scolaires, les syndicats ont affirmé leur détermination à faire échouer ce projet de réforme et promis «de mettre la France à l’arrêt» le 7 mars si le gouvernement ne renonce pas à reporter l’âge minimal de départ à la retraite.
«Débat sur le travail»
Jusque-là prudemment en retrait, Emmanuel Macron a sobrement appelé mardi au «calme» et au «respect» avant cette «mobilisation légitime» du 7 mars qui doit réserver «la possibilité à chacun et chacune de continuer à travailler et à vivre». Il a expliqué vouloir transmettre en se déplaçant à Rungis, auprès de «professionnels qui travaillent dès l’aube», «un message de reconnaissance devant toutes celles et ceux qui permettent à notre pays de tourner, de vivre». A la recherche d’une sortie par le haut des tensions autour des retraites, le président a aussi amorcé mardi un «débat sur le travail» qu’il souhaite plus rémunérateur et évolutif. Il a aussi reconnu «un contexte d’inflation difficile» dont le «pic» sera, selon lui, atteint «ce semestre». Après un examen chaotique par les députés français, qui ne sont pas parvenus à un vote dans les courts délais impartis par l’exécutif, le texte sur les retraites sera débattu à partir de la semaine prochaine au Sénat. Les débats s’achèveront le dimanche 12 mars à minuit, que l’examen du texte soit ou non achevé.