La Première ministre italienne, Giorgia Meloni, a plaidé hier pour une «nouvelle approche» à l’égard de l’Afrique, notamment sur le dossier migratoire, lors d’une visite en Tunisie, l’un des principaux points de départ de migrants clandestins vers l’Europe, rapporte l’AFP.
Mme Meloni, qui effectuait sa quatrième visite dans le pays en moins d’un an, a remercié le président tunisien, Kaïs Saïed, «pour le travail que nous menons ensemble dans la lutte contre les trafiquants d’êtres humains», dans une déclaration vidéo diffusée par ses services après leur entrevue dans la matinée au Palais de Carthage. Convenant avec K. Saïed que «la Tunisie ne peut pas être un pays d’arrivée pour les migrants» du reste de l’Afrique, elle s’est engagée à «impliquer les organisations internationales pour travailler sur les rapatriements» vers les pays d’origine. La lutte contre l’immigration clandestine «nécessite du développement pour les pays africains, des investissements. L’Italie cherche à faire avancer cette nouvelle approche» au niveau européen, a-t-elle argué.
Le déplacement de Mme Meloni en Tunisie survient à deux mois d’élections européennes où le dossier migratoire fait déjà l’objet de débats houleux. Le président Saïed a indiqué ces derniers jours son refus que la Tunisie, principal point de départ avec la Libye pour les traversées clandestines de la Méditerranée centrale, devienne «un pays de transit ou d’installation» des migrants d’autres pays d’Afrique. Pour Rome, «il reste fondamental que les autorités tunisiennes poursuivent leur action de lutte contre le trafic et la traite d’êtres humains et pour contenir les départs illégaux» de migrants, a fait savoir l’entourage de la Première ministre. Selon des statistiques officielles italiennes, les arrivées clandestines de migrants en provenance de Tunisie, qui diminuaient depuis l’automne et jusqu’en début d’année, ont connu un rebond entre mi-mars et mi-avril avec 5587 migrants (+337,52% sur un mois).
Dans son allocution, Mme Meloni a souligné les efforts de l’Italie pour encourager en parallèle l’immigration légale avec l’octroi prévu de 12 000 permis de séjour à des Tunisiens préalablement formés sur le territoire tunisien. Une petite manifestation a réuni devant l’ambassade d’Italie des militants critiquant la gestion «sécuritaire» du dossier migratoire par la Tunisie et l’Italie, et réclamant «des solutions plus humaines». Des familles de migrants tunisiens ayant disparu vraisemblablement dans des naufrages en Méditerranée étaient également présentes. Trois accords ont été signés hier (une aide de 50 millions d’euros au budget tunisien au bénéfice de projets dans l’énergie, une ligne de crédit de 55 millions d’euros aux PME et un accord de coopération universitaire) et d’autres suivront, selon Mme Meloni, dans les prochaines semaines, notamment dans le domaine militaire. Sous l’impulsion de la cheffe de gouvernement, l’Union européenne a conclu un accord avec Tunis prévoyant des aides financières en contrepartie d’efforts accrus pour réduire les départs de migrants.
Mais le mémorandum signé à la mi-juillet a suscité de vives critiques : le Parlement européen a voté mi-mars une résolution pour contester les conditions du décaissement par Bruxelles de 150 millions d’euros d’appui budgétaire à Tunis en dénonçant «une détérioration de l’Etat de droit en Tunisie». L’UE a aussi commencé à verser 105 millions d’aide pour lutter contre l’immigration irrégulière.