Un nouveau crime de guerre vient s’ajouter à la longue liste des immondes atrocités commises par Israël à Ghaza. Pas moins de 89 corps de Palestiniens ont été restitués avant-hier dans un état de décomposition avancée. Ces dépouilles, dans un état de putréfaction si avancé qu’il est difficile de les identifier, ont été renvoyées sans la moindre information concernant leur identité, leurs noms ou leur âge.
Le ministère de la Santé palestinien a exprimé sa consternation face à ce mépris pour la dignité humaine, appelant à une enquête internationale pour faire la lumière sur ces actes inhumains.Yamen Abou Suleiman, directeur des services d’urgence civile palestinienne à Khan Younès, a exprimé son désarroi devant l’incertitude quant à l'origine de ces dépouilles. «Nous ne savons pas si ces corps ont été exhumés de cimetières par l’armée pendant l’offensive terrestre, ou s’il s’agit de détenus qui ont été torturés puis tués», a-t-il déclaré. Les corps seront examinés afin de déterminer les causes du décès et tenter de les identifier, avant de leur offrir une sépulture dans une fosse commune près de l’hôpital Nasser à Khan Younès.
Dans un communiqué, le Bureau des médias a expliqué que l'occupation a remis les corps de ces martyrs dans seulement 35 linceuls, avec 13 corps regroupés dans un seul linceul, 22 dans un autre, et les restes étaient éparpillés dans plusieurs autres linceuls. Le Bureau des médias du gouvernement de Ghaza poursuit en lançant des accusations graves, affirmant qu’Israël a «volé» 2000 corps depuis le début de l’offensive, les transférant de manière inhumaine après avoir rasé des dizaines de cimetières.
Les autorités locales rapportent que des tombes à Khan Younès, Jabaliya et dans le quartier de Tuffah à Ghaza-ville ont été profanées et les corps déterrées et déplacés vers des lieux inconnus, ce qui, selon elles, constitue un crime contre l’humanité. Le Hamas, par la voix d’un communiqué, a dénoncé ces actes, qualifiant le traitement affligé aux corps de «sadique» et comparant les actions de l’armée israélienne à des crimes «sans précédent dans l’histoire humaine». Le groupe palestinien a ajouté que les corps remis étaient dans un état de décomposition tel qu’il était impossible de déterminer leur identité.
Salwa Karaz, une femme déplacée de Ghaza-ville, dans le nord du territoire palestinien, a déclaré à l’AFP qu’elle s’était rendue au cimetière turc dans l’espoir de retrouver son fils Marwan, âgé de 32 ans, qui a disparu en janvier, laissant derrière lui un fils de huit mois.
«Welcome to Hell»
«Lorsque nous avons appris que 80 corps avaient été remis, nous sommes venus là dans l'espoir de le retrouver», a relaté cette femme de 59 ans. «Pour l'instant, nous n'avons rien appris», a-t-elle déploré.
Aucune réaction officielle n’a été émise par l’armée d’occupation israélienne concernant le retour des corps. Par le passé, Israël avait justifié la restitution de corps après avoir vérifié qu’il ne s’agissait pas d’otages israéliens retenus par le Hamas.
A cela s’ajoutent les témoignages accablants de 55 ex-détenus palestiniens révélant l’existence de camps de détention israéliens, où la torture est systématiquement pratiquée. Le groupe israélien de défense des droits de l’homme B’Tselem a publié un rapport alarmant intitulé «Welcome to Hell», qui dépeint une sombre réalité : plus d’une douzaine de ces camps seraient dédiés à l’abus délibéré des prisonniers, transformant les lieux de détention en véritables «camps de torture».
Selon ce rapport, ces camps, établis durant la guerre en cours contre Ghaza, sont caractérisés par une violence arbitraire et fréquente, des agressions sexuelles, des humiliations constantes, des privations alimentaires et des conditions d’hygiène déplorables. Les témoignages des détenus, dont 21 originaires de la bande de Ghaza, évoquent un cauchemar quotidien, où la privation de sommeil, l’interdiction de pratiquer leur religion, la confiscation de leurs biens et l’absence de soins médicaux adéquats sont monnaie courante.Il est à préciser, à ce propos, qu’au moins 60 Palestiniens ont perdu la vie dans ces centres de détention, dont 48 originaires de Ghaza.
Le rapport de B’Tselem affirme qu’il s’agit d’une politique systémique et institutionnelle de torture, menée sous la direction du ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben-Gvir, avec le soutien du Premier ministre, Benyamin Netanyahu. Les témoignages recueillis dressent un tableau effrayant de violations graves du droit international, décrivant des pratiques qui s’apparentent à des crimes de guerre et à des crimes contre l’humanité.
Face à ces révélations, B’Tselem appelle la Cour pénale internationale (CPI) à ouvrir une enquête sur les responsables de ces crimes. Le rapport souligne l’impossibilité d’une telle enquête au sein d’Israël, où toutes les institutions de l’Etat, y compris le système judiciaire, sont mobilisées pour soutenir ces camps de torture.
De plus, le rapport note une augmentation inquiétante du nombre de Palestiniens incarcérés, qui a doublé depuis le début de la guerre pour atteindre 9623 personnes. B’Tselem en appelle à la communauté internationale pour mettre un terme immédiat aux cruautés infligées par le système carcéral israélien et pour reconnaître ce régime comme régime d'apartheid qui doit être démantelé.
En tout et pour tout, le bilan de l’agression génocidaire sioniste contre la bande de Ghaza s’est alourdi à 39 653 martyrs et 91 535 blessés, depuis le 7 octobre 2023, ont indiqué hier les autorités palestiniennes de la Santé. Selon la même source, l’armée d’occupation sioniste a commis 3 massacres hier dans la bande de Ghaza, faisant 30 martyrs et 66 blessés.
Les autorités palestiniennes de la Santé ont indiqué qu’un certain nombre de victimes palestiniennes se trouvaient encore sous les décombres et sur les routes, et que les forces d’occupation empêchaient les ambulances et les équipes de la Protection civile de leur porter secours. Amel Blidi
Poursuite de la destruction d’infrastructures : L’UE «gravement préoccupée»
L’Union européenne (UE) a indiqué lundi être «gravement préoccupée» par la dégradation de la situation humanitaire et la poursuite de la destruction d’infrastructures civiles essentielles à Ghaza par l’entité sioniste, soulignant que le ciblage des infrastructures vitales constitue «un crime de guerre». «L’Union européenne est gravement préoccupée par la poursuite de la destruction d’infrastructures civiles essentielles, notamment d’une usine de traitement des eaux à Rafah, et se joint aux appels internationaux en faveur d’une clarification sur cet incident», a déclaré le haut représentant de l’UE pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité, Josep Borrell, dans un communiqué. Rappelant que le ciblage des infrastructures vitales constitue «un crime de guerre», il a réitéré «l’urgence d’un accès complet, rapide, sûr et sans entrave à l’aide humanitaire à l’échelle nécessaire pour les Palestiniens». Le responsable européen a réaffirmé, en outre, l’importance du respecter et de la mise en œuvre des décisions de la Cour internationale de justice (CIJ), qui «sont juridiquement contraignantes». «Les violations du droit international humanitaire doivent faire l’objet d’enquêtes approfondies et indépendantes et les responsables doivent rendre des comptes», a-t-il plaidé. M. Borrell a insisté, dans ce contexte, sur l’urgence d’observer un «cessez-le-feu immédiat», appelant l’entité sioniste à «cesser toute action qui aggrave les conditions de vie de la population civile de Ghaza et à respecter ses obligations en vertu du droit international». «La catastrophe humanitaire qui ne cesse de s’aggraver à Ghaza crée des conditions mettant en danger la vie d’une population civile déjà gravement affaiblie, qui continue d’être soumise à la famine et à des déplacements répétés dans des camps de tentes surpeuplés pour le dixième mois consécutif, sans fin en vue et sans aucun endroit où aller», a-t-il déploré. Il s’est dit, à ce titre, «profondément préoccupé» par l’effondrement des systèmes d’assainissement, de gestion des déchets solides et de santé, ce qui «provoque la propagation de maladies, notamment la polio, les infections cutanées et respiratoires, en particulier chez les enfants».
Cisjordanie : 12 morts dans trois raids
Les autorités palestiniennes ont annoncé la mort de 12 personnes, tuées hier en Cisjordanie dans trois raids israéliens distincts dans ce territoire occupé, où les violences ne montrent aucun signe d’apaisement. Cinq personnes ont été tuées dans la région de Jénine (nord) et quatre dans le district de Tubas (nord-est), lors de raids menés par les forces israéliennes à l’aube, ont indiqué le Croissant-Rouge palestinien et le ministère palestinien de la Santé à Ramallah. Le Croissant-Rouge a fait état de morts et de blessés «à la suite du bombardement par l’occupant de deux véhicules» dans l’est de Jénine. Des habitants de la ville d’Aqaba ont déclaré que les forces israéliennes étaient arrivées à l’aube et avaient encerclé la maison d’Amid Ghanam, ce qui a conduit à des affrontements entre soldats et jeunes de la région. Amid Ghanam et deux autres personnes ont été tués lors des affrontements, tandis qu’un adolescent a également été tué près d’un hôpital, a déclaré à l’AFP le gouverneur de Tubas, Ahmed Assad.Le maire d’Aqaba, Abdelrazzaq Abouarra, a déclaré pour sa part que l’adolescent avait été «tué de sang-froid». Dans un troisième raid plus tard dans la journée dans le village de Kafr Qud, à l’ouest de Jénine, trois personnes ont été tuées et deux blessées, selon l’armée d’occupation sioniste.