Plusieurs parmi les belligérants libyens essaient, depuis fin décembre dernier, de trouver une issue finale à la crise libyenne, d’autant plus que les accords de cessez-le-feu de septembre 2020 et d’un nouveau gouvernement d’Union nationale ont tenu jusqu’à présent.
Aucune date n’est retenue pour les élections libyennes après le report de celles du 24 décembre ; les belligérants libyens préfèrent une solution locale, imprégnée de leurs spécificités ; les puissances étrangères présentes en Libye cherchent à préserver leurs intérêts. L’imbroglio libyen reste entier.
Plusieurs parmi les belligérants libyens essaient depuis fin décembre dernier de trouver une issue finale à la crise libyenne, d’autant plus que les accords de cessez-le-feu de septembre 2020 et d’un nouveau gouvernement d’Union nationale ont tenu jusqu’à présent. La situation intérieure libyenne s’améliore certainement. Mais, les acteurs politiques, locaux et étrangers n’arrivent pas à s’entendre sur un plan de sortie préservant leurs intérêts contradictoires.
Constitutionnalité
Plusieurs acteurs libyens reprochent, à l’accord de Genève de février 2021, l’absence de références constitutionnelles, soutenant la tenue des élections. Ils préfèrent l’organisation d’un référendum pour l’adoption par le peuple d’une nouvelle Constitution et la tenue, ensuite, d’élections sur la base de ladite Constitution.
Toutefois, il n’y a pas d’accord sur le projet de Constitution, lui-même, celui de Salalah (Oman) bien qu’il ait acquis l’adoption de plus de 40 parmi les 60 membres de l’Instance de rédaction de la Constitution. D’autres acteurs lui préfèrent la Constitution de 1951, plus équitable, selon eux, entre les trois régions (Tripolitaine, Cyrénaïque et Fezzan) et les différents groupes ethniques constituant la Libye.
L’Est et les Touaregs se sentent toujours lésés par le projet de Salalah. La difficulté reste donc entière de réunir les Libyens face à des références constitutionnelles.
Les leaders libyens restent divisés sur cette question constitutionnelle. C’est ainsi que le 2e vice-président du Conseil de l’Etat, Omar Bouchah, a rappelé à El Watan, que «le Conseil d’Etat et le Parlement se sont entendus à Ghardaka (Egypte), depuis 2020, sur la nécessité d’adopter la nouvelle Constitution, par référendum, avant les élections. Mais les partenaires étrangers et l’ONU ont voulu autre chose», en concluant sur la nécessité de «recourir à une solution ‘interlibyenne’».
Pour sa part, le membre du même Conseil d’Etat, Abderrahmane Souihli, a recommandé de «réactiver la section constitutionnelle dans la justice libyenne, afin de trancher ces différends». Néanmoins, le juge Jamel Bennour a insisté auprès d’El Watan sur le fait que «le projet de Constitution de Salalah est plutôt un projet de réconciliation politique et ne répond pas aux attentes des Libyens». «Il vaudrait mieux amender l’organisation provisoire des pouvoirs de 2011/2012 ; c’est le moyen le plus facile pour arriver à des élections», a-t-il ajouté.
Intérêts
L’autre question qui inquiète les Libyens, c’est l’intervention étrangère armée. Le Dialogue de Genève a abouti à la nécessité du départ de toutes les forces étrangères de Libye, régulières ou milices. Il s’agit des troupes régulières turques et des milices syriennes présentes dans l’Ouest libyen, d’une part, et des troupes russes Wagner et des milices soudanaises et tchadiennes, dans l’Est libyen, d’autre part,.
La commission militaire 5+5, composée des commandements militaires de l’Est et de l’Ouest, a abouti à des accords sur cette question. Mais les leaders politiques locaux et les puissances étrangères n’ont pas adhéré à ces accords. Même le chef du gouvernement d’Union nationale, Abdelhamid Dbeyba, censé se limiter à gérer la phase socioéconomique de la transition, a osé demander des comptes à la commission 5+5, créant un incident avec eux.
La ministre libyenne des Affaires étrangères, Najla Mangouch, est régulièrement montée d’un cran sur cette question de la présence étrangère en Libye, soutenue notamment par la France, l’Allemagne et l’Egypte. Mais, la Turquie ainsi que «l’Italie et la Grande-Bretagne craignent, semble-t-il, pour leurs alliés dans l’Ouest libyen, en cas de départ des troupes turques», selon le politologue Ezzeddine Aguil, qui doute d’une résolution rapide de la crise libyenne.
De toutes les façons, même Stéphanie Williams, la conseillère du secrétaire général de l’ONU pour la Libye, n’avance pas concrètement sur le dossier, malgré des recommandations de tenir des élections durant le 1er trimestre 2022. «Un calendrier électoral commençant fin mars nécessite d’être prêt début février, pour des considérations logistiques», assure le juge Jamel Bennour, favorable à un compromis libyo-libyen, plus pratique, selon lui.