L’ex-Bâtonnier des avocats à la tête de l’Assemblée tunisienne : Une majorité de députés néophytes sans véritable expérience politique

15/03/2023 mis à jour: 16:53
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Brahim Bouderbala

L’élection hier de l’ex-bâtonnier des avocats, Brahim Bouderbala, à la tête de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) en Tunisie, ne fut certainement pas une surprise. Bouderbala est connu pour son soutien au processus déclenché le 25 juillet 2021 par le président Kaïs Saïed et il ne s’en est jamais caché, alors qu’il était encore bâtonnier. 


La surprise fut plutôt que le bâtonnier Bouderbala ne soit pas élu dès le 1er tour ; il y avait de la concurrence entre quatre candidats réunissant respectivement 48, 37, 29 et 21 voix. Les quatre autres n’ont obtenu que des miettes (6, 6, 2 et 2). Le bâtonnier a réuni 48 voix sur les 151 exprimées et il a fallu recourir à un 2e tour, où il y avait également de la concurrence puisque le scrutin a donné 83 voix pour l’élu contre 67 pour Abdessalem Dahmani, candidat officiel de l’initiative «Que le peuple gagne», se présentant comme l’expression de la pensée du président Kaïs Saïed. Le président élu de l’Assemblée s’est toujours déclaré un fervent défenseur du projet du président de la République, en se proclamant «un soldat au service de la Tunisie». 


La concurrence s’est également étendue à la vice-présidence masculine puisque trois voix seulement ont séparé le vainqueur, Anouar Marzouki (72 voix), de son rival, Riadh Jaïdane (69 voix). Par contre, Sawsen Mabrouk s’est adjugée haut la main la vice-présidence féminine en réunissant 87 voix, loin devant sa rivale, Amel Meddeb, et ses 42 voix. 


Les candidatures à tous les postes étaient multiples au 1er tour. Il y en avait huit pour la présidence de l’ARP, dix pour la vice-présidence féminine et huit pour la vice-présidence masculine. La multiplication des candidatures ayant traduit «l’absence d’esprit de clans bien ancrés, comme c’est le cas dans des Assemblées dominées par les partis», selon l’analyste politique Mohamed Bououd. 


Réserves


L’opposition politique en Tunisie conteste la légitimité de l’ARP, élue en deux temps, les 17 décembre 2022 et 29 janvier 2023. Elle qualifie de «putsch» le processus entamé par le président Saïed depuis le 25 juillet 2021 et son emprise sur tous les pouvoirs. La puissante centrale syndicale UGTT s’est positionnée «entre deux chaises», en rejetant aussi bien le retour à l’avant-25 juillet 2021 que la domination complète du président Saïed sur les pouvoirs. L’UGTT est en cours d’élaboration d’une initiative de dialogue politique qu’elle compte soumettre au président de la République, au sein d’un quartet avec l’Ordre des avocats, la Ligue des droits de l’homme et le Forum tunisien des droits économiques et sociaux. 

L’UGTT voulait une nouvelle version de dialogue national mais l’organisation patronale Utica n’a pas suivi. L’initiative peine à voir le jour d’autant plus que le camp opposé à Saïed, y compris l’UGTT, ne dispose pas de présence massive sur le terrain. Le rassemblement auquel a appelé la centrale syndicale le 4 mars courant n’ayant réuni qu’à peine 3000 personnes malgré la forte mobilisation qui l’a précédé. L’opposition politique est plutôt concentrée sur l’affaire de complot contre la sûreté de l’Etat, entamée depuis début février et ayant entraîné l’arrestation de plusieurs hommes politiques connus, comme le lobbyiste Kamel Letaïef, l’ex-ministre de la Justice, le nahdhaoui Noureddine Bhiri, l’ex-directeur de cabinet du défunt président Béji Caïd Essebsi, l’avocat Ridha Belhaj, ainsi que plusieurs dizaines de dirigeants politiques. 

La majorité des Tunisiens est, quant à elle, occupée par la cherté de la vie. Il est vrai qu’elle accorde, pour le moment, sa confiance au président Saïed, soutenu par les deux tiers de la population dans les sondages, suite à ses coups d’éclat à propos des intentions de lutte contre la corruption. La scène politique tunisienne est encore très flottante et espère la réalisation de projets de développement que la population peine à voir se réaliser.

 

Tunis
De notre correspondant  Mourad Sellami

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