L’Europe planche sur ses pénuries et ses dépendances

01/02/2022 mis à jour: 12:05
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En manque de certains principes actifs de médicaments, en risque de pénurie de semi-conducteurs, et dépendante pour les métaux de la transition énergétique, l’Europe va plancher à Lens en France sur son «autonomie stratégique», dont la fragilité a été révélée par la crise Covid.

Alors que l’Union européenne est parvenue en un temps record à devenir le premier producteur mondial de vaccins à ARN messager, avec 300 millions de doses produites chaque mois, selon le commissaire Thierry Breton, la pandémie a aussi mis en lumière ses faiblesses dans d’autres domaines, qui vont être discutées aujourd’hui, lors d’un Conseil informel des ministres de l’Industrie de l’UE, consacré à la compétitivité, dans cette ville du nord de la France, rapporte l’AFP.

A titre d’exemple, «nous dépendons aujourd’hui en grande partie de l’Asie dans des domaines tels que les principes actifs pharmaceutiques, à 80% importés, ou la production de la fibre optique (25% de la production mondiale réalisée en Chine)», rappellent les documents préparatoires à la réunion, cite la même source.

Côté semi-conducteurs, la prédominance asiatique et le risque de pénurie de puces électroniques fondamentales pour des secteurs allant de l’automobile aux smartphones en passant par les communications ou les équipements médicaux, est un sujet qui inquiète des deux côtés de l’Atlantique. Selon l’Agence française, aux Etats-Unis, le «America Competes Act», soutenu par la Maison Blanche, prévoit 52 milliards de dollars pour revitaliser l’industrie américaine des semi-conducteurs.

En Europe, la Commission doit présenter début février sa stratégie visant à quadrupler la production européenne de puces électroniques (baptisée «Chips Act»), avec aussi plusieurs dizaines de milliards d’euros prévus et un «nouveau cadre» pour «faciliter les aides d’Etats», a indiqué le Commissaire Européen Thierry Breton à plusieurs journaux européens samedi.

«Nous voulons atteindre 20% de la production mondiale d’ici 2030, sachant que le marché devrait doubler d’ici là pour atteindre mille milliards de dollars», a-t-il déclaré.

Sonnette d’alarme, la production industrielle de l’Allemagne, moteur de l’UE, a pâti des pénuries en 2021, avec une hausse décevante de 2,7% de son PIB l’an dernier, due notamment au manque de semi-conducteurs dans l’automobile. Plus globalement, outre les puces électroniques, Paris entend profiter de sa présidence tournante du Conseil des ministres européens pour accélérer plusieurs gros projets d’investissements dans des domaines stratégiques, appelés PIIEC en jargon bruxellois.

Ils permettent aux Etats membres de déroger aux règles de la concurrence en subventionnant directement des industries d’avenir et devraient s’appliquer aussi dans le domaine de la santé, des données (cloud), des batteries, ainsi que de l’hydrogène.

Mais les vulnérabilités les plus critiques pour l’heure concernent les matières premières : «La Chine fournit aujourd’hui 60% de la production mondiale de lithium et 80% de la production d’hydroxyde de lithium, essentiels pour la réalisation de batteries pour les véhicules électriques, et 98% de la demande européenne en terres rares, qui sont des composants essentiels à la production d’électronique ou d’énergies renouvelables», indiquent les documents préparatoires à la réunion de Lens, rapporte l’AFP.

Après trente ans de délocalisations vers l’Asie, le but est «d’établir une définition commune du terme de ‘‘dépendance stratégique’’ dans la chaîne de valeur pour éviter des ‘‘goulets d’étranglements’’ dans sa capacité industrielle et dans ses projets de décarbonation», indiquent les documents.

L’UE ne représente aujourd’hui que 3% des dépenses mondiales d’exploration minières alors qu’elle consomme 25 à 30% des matériaux produits mondialement, note la Commission.

Mais même en développant l’extraction minière et/ou le recyclage de métaux des batteries, l’Europe ne produira pas plus de 30% de ses besoins en minerais stratégiques pour les batteries électriques en 2030, prévenait début janvier un rapport rédigé par l’industriel français Philippe Varin, qui sera présenté aux ministres européens aujourd’hui.

Les ministres et les commissaires échangeront d’ailleurs sur les outils possibles pour sécuriser leurs approvisionnements, par exemple des accords commerciaux avec des pays tiers ou le stockage stratégique des matières les plus critiques. 

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