Les négociations dans l’impasse : Pas d’accord sur un cessez-le-feu au Caire

27/08/2024 mis à jour: 23:51
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Photo : D. R.

«La diplomatie des médiateurs, en l’occurrence celle du Qatar, de l'Egypte et des Etats-Unis, n'a pas réussi jusqu'à présent à combler le fossé entre Israël et le Hamas», rapporte l’agence Reuters. Pour Oussama Hamdan, cadre dirigeant du Hamas, l’optimisme affiché par les Américains annonçant un «accord imminent» ne repose sur rien de concret et ne vise qu’à servir  «des objectifs électoraux».

Les pourparlers sur un cessez-le-feu à Ghaza qui ont repris jeudi dernier au Caire se sont achevés et, manifestement, ils n’ont pas eu l’effet escompté. Le Hamas, qui a envoyé samedi une délégation présidée par Khalil Al Hayya, membre du bureau politique du parti, a rencontré les médiateurs égyptien et qatari et pris connaissance du projet d’accord mis sur la table.

La délégation palestinienne a quitté, dimanche soir la capitale égyptienne, et elle était à l’évidence déçue par la teneur du deal proposé. La délégation israélienne également a quitté Le Caire le même jour.

Dans un message posté sur Telegram, Izzat Al Rishq, responsable politique au sein du mouvement, a indiqué que lors de ses échanges avec les médiateurs, le Hamas a réitéré son attachement au projet d’accord «du 2 juillet», autrement dit, le plan Biden tel qu’exposé dans sa première mouture fin mai, et qui garantissait une cessation totale des combats et un retrait complet de l’armée israélienne de la bande de Ghaza.

Or, depuis la reprise des négociations à Doha le 15 août, de nouvelles conditions ont été émises par Netanyahu, ce dernier exigeant, entre autres, le maintien des troupes israéliennes dans le corridor de Philadelphie, à la frontière avec l’Egypte, une condition que rejettent catégoriquement à la fois le Hamas et l’Egypte.

De fait, depuis l’occupation de ce couloir par Israël lors de sa grande offensive terrestre lancée sur Rafah le 6 mai 2024, les autorités égyptiennes n’ont eu de cesse de protester contre cette invasion israélienne à ses frontières. L’Egypte était d’autant plus outrée par les agissements sionistes que les forces d’occupation avaient pris également possession du point de passage de Rafah et elles ne sont pas près d’en sortir. «L’Egypte a réitéré à toutes les parties sont refus de toute présence israélienne au point de passage de Rafah et sur le couloir de Philadelphie», rapportait hier Al Jazeera. 

«L’annonce américaine d’un accord imminent est purement électoraliste»

Malgré l’insistance américaine auprès du Hamas, l’exhortant à accepter le projet d’accord à la sauce Netanyahu, le mouvement de résistance palestinien se montre intraitable quant au sort de Ghaza après la guerre. Pour Oussama Hamdan, cadre dirigeant basé à Beyrouth, l’optimisme affiché par les Américains, annonçant à cor et à cri un «accord imminent», ne repose sur rien de concret et ne vise qu’à servir «des objectifs électoraux».

«La diplomatie des médiateurs, en l’occurrence celle du Qatar, de l'Egypte et des Etats-Unis, n'a pas réussi jusqu'à présent à combler le fossé entre Israël et le Hamas», note Reuters. Deux sources sécuritaires égyptiennes ont déclaré à l’agence britannique, sous le sceau de l’anonymat, que «ni le Hamas ni Israël n'ont accepté plusieurs compromis présentés par les médiateurs lors des pourparlers du Caire dimanche».

Sur le terrain, les forces d’occupation israéliennes poursuivent sans relâche leurs attaques contre la population palestinienne à Ghaza. L’armée sioniste a émis dimanche soir de nouveaux ordres d'évacuation concernant la ville de Deir Al Balah, dans le centre de la bande de Ghaza, forçant de nouveau les familles palestiniennes à fuir.

Dans un communiqué diffusé hier, les autorités municipales de Deir Al Balah affirment qu’«en 72 heures, environ 250 000 citoyens ont été déplacés de force et 25 centres d'hébergement ont été mis hors service, ainsi qu'un certain nombre d'installations humanitaires».

«Une nouvelle décision de déplacement imposée par l'occupation sioniste dans de nouveaux quartiers du nord-est de la ville de Deir Al Balah a entraîné de nouvelles souffrances, une autre tragédie et un désastre croissant pour les habitants de Deir Al Balah, où près de la moitié de la population de la bande de Ghaza réside dans un espace étroit que l’occupation s’efforce de réduire», ajoute la même source.

La municipalité de Deir El Balah précise que cet ordre d’évacuation «menace le seul hôpital public (du gouvernorat) qui prodigue des soins à plus de la moitié de la population de la bande de Ghaza» et qui pourrait «cesser de fonctionner». Allusion ici à l’hôpital Shouhada Al Aqsa.

Par ailleurs, impliquer ces quartiers de Deir Al Balah dans les opérations militaires israéliennes, avertit l’autorité locale, revient à condamner «4 nouveaux puits d'eau, ce qui porte à 14 le nombre de puits rendus inaccessibles». Les autorités municipales de Deir Al Balah précisent que ces puits «alimentaient auparavant en eau potable près de 70% des habitants de la ville».

Cet ordre d’évacuation conduit en outre au «départ d'un certain nombre d'institutions humanitaires internationales qui fournissaient des services de secours aux populations de la région, ce qui aggravera une crise alimentaire déjà aiguë en raison de la fermeture du terminal de Rafah depuis près de quatre mois».

Terreur et chaos à Deir Al Balah

A noter par ailleurs que les nouveaux ordres d’évacuation ont contraint de nombreux patients à quitter l'hôpital Shouhada Al Aqsa, le principal établissement médical de la région où des centaines de milliers de déplacés ont trouvé refuge. Il se trouve que «l'hôpital est proche de la zone concernée par l'avis d'évacuation», explique Reuters.

Dans un communiqué diffusé dimanche soir, l’ONG Médecins sans Frontières a fait savoir qu’une explosion à environ 250 mètres de cet hôpital soutenu par MSF «avait déclenché la panique». Sur environ 650 patients, seulement 100 sont restés à l'hôpital, dont sept dans l'unité de soins intensifs, a alerté le ministère de la Santé de Ghaza.

«Cette situation est inacceptable. Al Aqsa fonctionne bien au-delà de sa capacité depuis des semaines en raison du manque d'alternatives pour les patients. Toutes les parties belligérantes doivent respecter l'hôpital ainsi que l'accès des patients aux soins médicaux», plaide MSF.

Le ministère de la Santé de Ghaza a précisé que l'hôpital des Martyrs d’Al Asqa «fonctionnait toujours». Mais la population et même certains membres du personnel médical ont paniqué après avoir appris que les zones avoisinantes étaient des «zones d'opérations militaires», a souligné Khalil Al Daqran, porte-parole du ministère, cité par l’AFP.

Avant la guerre, l’établissement hospitalier «comptait environ 200 lits et a toujours été l'unique hôpital général du centre de la bande de Ghaza». Iyad Al Jabri, son directeur, assure que ses équipes «résistent». «Nous restons, nous continuerons de traiter les patients et les blessés», a-t-il déclaré à l’AFP.

Depuis le début de la campagne militaire israélienne, cet hôpital, à l’instar des autres structures de santé à Ghaza, «doit composer avec des pénuries permanentes d'électricité, de carburant, d'eau, de médicaments ou encore de matériel médical», relève l’AFP.

Au cours de la journée d’hier qui correspondait au 325e jour de la guerre contre Ghaza, des raids aériens ainsi que des tirs de chars israéliens ont secoué plusieurs secteurs de la bande de Ghaza, selon l’agence française. «Au moins cinq personnes ont été tuées dans une frappe ayant visé une maison du quartier d'Al-Rimal, dans la ville de Ghaza (nord)», rapporte l’AFP qui cite des médecins.

Le même média ajoute que deux habitations ont été bombardées dans le quartier Zeitoun, également à Ghaza-ville. Selon Reuters qui cite des sources médicales, «au moins sept Palestiniens ont été tués ce lundi» au centre et au sud de la bande de Ghaza.

L’agence britannique explique que parmi ces sept victimes, «deux ont été tués à Deir Al Balah, où se réfugiaient environ un million de personnes, deux dans une école du camp d'Al Nuseirat et trois dans la ville méridionale de Rafah, près de la frontière avec l'Egypte». Un peu plus tard dans la journée, «une frappe israélienne contre une tente sur la zone côtière de la ville de Ghaza a tué six Palestiniens et blessé plusieurs autres personnes»,  rapporte  l’agence Reuters.

Des organisations de journalistes demandent à l'UE de suspendre son accord d’association avec Israël

Une soixantaine d'organisations internationales de défense des journalistes ont saisi hier l'Union européenne, lui demandant de suspendre son accord d'association avec Israël.

«Face au nombre sans précédent de journalistes tués et aux violations continues de la liberté de la presse par les autorités israéliennes depuis le début de la guerre avec le Hamas, Reporters Sans Frontières (RSF) et 59 organisations appellent à la suspension de l’accord d’association entre l’Union européenne (UE) et Israël ainsi qu’à l’adoption de sanctions ciblées envers les responsables», peut-on lire sur le site de l’organisation Reporters Sans Frontières.

«Alors que les ministres des Affaires étrangères de l’UE doivent se réunir à Bruxelles le 29 août», ces organisations de journalistes, signataires d’une déclaration commune, «demandent des mesures urgentes à l’égard des autorités israéliennes, responsables de la mort d’un nombre sans précédent de journalistes et d’atteintes récurrentes à la liberté des médias».

«Il est temps de passer des condamnations verbales aux actes», plaide Julie Majerczak, directrice du bureau de Bruxelles de RSF. «L’article 2 de l’accord d'association entre l’UE et Israël stipule que leurs relations se fondent sur un élément essentiel qui est le respect des droits humains et des principes démocratiques.

Cet article est clairement piétiné par le gouvernement israélien. L’UE, premier partenaire commercial d’Israël, doit en tirer les conséquences et tout faire pour que le gouvernement Netanyahu arrête de massacrer les journalistes et respecte le droit à l’information et la liberté de la presse en ouvrant l’accès à Ghaza», ajoute Mme Majerczak. Depuis le début de la campagne militaire israélienne dans la bande de Ghaza, 162 journalistes, principalement des reporters et correspondants de presse palestiniens, ont été tués par l’armée israélienne selon le Syndicat des journalistes palestiniens. M. B.

40 435 morts et 93 534 blessés à Ghaza

Le bilan de la guerre contre la population de Ghaza s’élève à 40 435 morts et 93 534 blessés jusqu’au 26 août a indiqué hier le ministère de la Santé de Ghaza. 30 morts et 66 blessés ont été enregistrés en 24 heures, entre dimanche soir et lundi matin, ajoute la même source. M. B.

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