Les résultats d’hier matin confirment l’ampleur du succès pour le Labour et la défaite historique des conservateurs annoncés depuis des mois par les sondages. Vers 6h30 GMT, le Labour s’était d’ores et déjà assuré au moins 410 sièges, soit plus que les 326 nécessaires pour obtenir la majorité absolue à la Chambre des communes et pouvoir gouverner seul. C’est juste en deçà du score historique de Tony Blair en 1997 (418).
Fort d’une écrasante victoire sur les conservateurs aux élections législatives, le chef du parti travailliste britannique, Keir Starmer, a promis vendredi d’incarner le «changement» et «un renouveau national» une fois à Downing Street. Après 14 ans d’un règne conservateur marqué par une succession des crises ces dernières années – le Brexit, l’envolée des prix ou encore la valse des Premiers ministres –, une page se tourne au Royaume-Uni.
Sans attendre les résultats des 650 circonscriptions en jeu, le Premier ministre sortant, Rishi Sunak, a reconnu au petit matin la défaite de son camp, annonçant avoir appelé le chef du Labour Keir Starmer pour le féliciter et assumant la responsabilité d’un échec historique. En fin de matinée, cet ancien avocat spécialiste des droits humains de 61 ans sera chargé par le roi Charles III de former un gouvernement.
C’est donc un dirigeant modéré de centre-gauche qui va entrer au 10, Downing Street et participer à Washington la semaine prochaine au sommet du 75e anniversaire de l’Otan, au moment où l’extrême droite est susceptible d’accéder au pouvoir en France et alors que Donald Trump semble bien placé pour retourner à la Maison-Blanche. «Le changement commence maintenant», a martelé le futur Premier ministre, remerciant ses partisans et renouvelant sa promesse de «renouveau national». «Je ne vous promets pas que ce sera facile. Il ne suffit pas d’appuyer sur un bouton pour changer un pays.
Cela demande un travail difficile, un travail patient, un travail déterminé», a-t-il dit. Les résultats hier au petit matin confirment l’ampleur du succès pour le Labour et la défaite historique des conservateurs, annoncés depuis des mois par les sondages. Vers 6h30 GMT, le Labour s’était d’ores et déjà assuré au moins 410 sièges, soit plus que les 326 nécessaires pour obtenir la majorité absolue à la Chambre des Communes et pouvoir gouverner seul.
C’est juste en deçà du score historique de Tony Blair en 1997 (418). Selon les derniers résultats compilés par la BBC, le parti conservateur ressort, lui, désavoué avec ce qui s’annonce comme son pire résultat depuis le début du XXe siècle : 119 députés élus, contre 365 il y a cinq ans sous Boris Johnson.
Plusieurs de ses poids lourds ont été emportés par la vague de rejet qu’il a suscitée, comme les ministres de la Défense Grant Shapps ou des relations avec le Parlement Penny Mordaunt, qui était considérée comme une possible future cheffe de parti. L’ex-Première ministre, Liz Truss, qui en 2022 avait provoqué la panique sur les marchés financiers avec ses propositions de baisses d’impôts non financées pendant ses 49 jours à Downing Street, a perdu son siège au profit du Labour.
Choix difficiles
Unanimement, les unes de la presse britannique ont insisté hier sur le «raz-de-marée» travailliste remporté par Keir Starmer. Durant la campagne, ce dernier, entré en politique il y a seulement neuf ans, a promis le retour de la «stabilité» et du «sérieux», avec une gestion des dépenses publiques très rigoureuse. Le futur gouvernement devra faire «des choix difficiles» face à «l’ampleur du défi», a d’ailleurs prévenu Rachel Reeves, amenée à devenir ministre des Finances, une première pour une femme au Royaume-Uni.
Peu charismatique, Keir Starmer promet de transformer le pays comme il a redressé, sans état d’âme, le Labour après avoir succédé au très à gauche Jeremy Corbyn en 2020, recentrant le parti sur le plan économique et luttant contre l’antisémitisme. Il assure vouloir relancer la croissance, redresser les services publics, renforcer les droits des travailleurs, réduire l’immigration et rapprocher le Royaume-Uni de l’Union européenne – sans revenir sur le Brexit, sujet tabou de la campagne.
Le président du Conseil européen Charles Michel a déclaré se réjouir de travailler avec Londres sous un gouvernement travailliste : «Nous discuterons des défis communs tels que la stabilité, la sécurité, l’énergie et l’immigration» lors du sommet de la Communauté politique européenne, le 18 juillet en Angleterre, l’un des premiers rendez-vous internationaux majeurs de Keir Starmer.
Une «victoire électorale retentissante» également soulignée par le Premier ministre australien, Anthony Albanese, qui a félicité son «ami» Keir Starmer., Dans ce Parlement bouleversé, les libéraux-démocrates (centristes) vont eux redevenir la troisième force en présence, avec 71 députés, selon les résultats quasi complets.
Bouleversement dans la politique britannique : le parti anti-immigration et anti-système Reform UK fait son entrée au parlement avec quatre sièges. Son chef et figure de la droite dure Nigel Farage, va devenir député après une fructueuse huitième tentative. L’ancien héraut du Brexit a salué le début d’une «révolte contre l’establishment».
En Ecosse, les indépendantistes du Scottish National Party subissent un sérieux revers : ils n’emportent que huit des 57 circonscriptions. Les Verts remportent quatre sièges, contre un seul auparavant, dans une Chambre des Communes qui comptera un nombre record d’au moins 242 femmes, contre 220 en 2019.
Campagne calamiteuse
Au pouvoir, le Labour devra répondre à une aspiration considérable au changement. Le Brexit a déchiré le pays et n’a pas rempli les promesses de ses partisans. L’envolée des prix des deux dernières années a appauvri les familles, plus nombreuses que jamais à dépendre des banques alimentaires.
Il faut parfois attendre des mois pour obtenir un rendez-vous médical dans le service public de santé NHS. Les prisons risquent de manquer de places dès les jours qui viennent. Dans une ambiance de luttes fratricides permanentes chez les conservateurs, les scandales politiques sous Boris Johnson et les errements budgétaires de Liz Truss ont fini d’exaspérer les électeurs.
En 20 mois à Downing Street, leur successeur Rishi Sunak, cinquième Premier ministre conservateur depuis 2010, n’est jamais parvenu à redresser la barre dans l’opinion. L’ancien banquier d’affaires et ministre des Finances de 44 ans avait tenté un coup de poker en convoquant ces élections en juillet sans attendre l’automne comme beaucoup le pensaient, mais sa campagne a tourné au calvaire.
La victoire de Keir Starmer saluée en Europe et au-delà
Les félicitations au futur Premier ministre britannique, le travailliste Keir Starmer, qui a obtenu une victoire écrasante aux élections législatives, affluaient, hier, d’un peu partout dans le monde. Le président du Conseil européen Charles Michel a salué une «victoire électorale historique», déclarant se réjouir de travailler avec Londres, sous un gouvernement travailliste.
Qualifiant de «partenaire essentiel» de l’UE le Royaume-Uni - qui n’en est plus membre depuis trois ans et demi -, il a ajouté qu’il verrait M. Starmer lors du sommet de la Communauté politique européenne le 18 juillet pour «discuter des défis communs tels que la stabilité, la sécurité, l’énergie et l’immigration».
De son côté, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a affirmé avoir «hâte de travailler» avec M. Starmer pour «renforcer la sécurité européenne», à l’unisson avec la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, qui a salué «l’engagement du Royaume-Uni à notre sécurité commune».
Le président français Emmanuel Macron s’est dit «heureux de (son) premier échange» avec Keir Starmer. «Nous allons poursuivre le travail engagé avec le Royaume-Uni pour notre coopération bilatérale, pour la paix et la sécurité de l’Europe, pour le climat et l’IA», a-t-il affirmé.
En Grèce le Premier ministre de droite Kyriakos Mitsotakis a déclaré que son gouvernement était «prêt à travailler» avec le nouveau gouvernement britannique de gauche «pour approfondir l’amitié et la coopération» entre Londres et Athènes. Parmi les premiers à réagir, le Premier ministre australien, Anthony Albanese, a salué la «victoire électorale retentissante» de son «ami» Keir Starmer.