Le «sang de l’espoir»

15/01/2023 mis à jour: 23:32
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Catégorique, le président français, Emmanuel Macron, ne demandera pas pardon à l’Algérie pour les crimes commis par la France coloniale. Dans un long entretien accordé à l’hebdomadaire Le Point et mené par notre confrère Kamel Daoud, Macron a été péremptoire sur cette question de repentance qui, de son aveu, constitue un «gros risque» politique à quelques mois de la fin du quinquennat. La montée du nationalisme d’extrême droite, à la faveur de la crise économique mondiale, aggravée par la guerre en Ukraine, fait du dossier algérien un sujet sur lequel Macron pourrait laisser des plumes au cas où il envisagerait de briguer un second mandat.

Dans l’ensemble, le contenu de l’entretien est destiné beaucoup plus à l’opinion publique française. Le président Macron tente une analyse politique et philosophique sur un sujet qui suscite une grosse polémique au sein même de l’establishment français. Faire ou ne pas faire œuvre de repentance pour le génocide commis au nom de l’Etat français ? C’est là le dilemme que cherche à résoudre Macron, plus soucieux de défendre les valeurs et l’honneur de la République que de répondre à une exigence morale.

Les Algériens ont-ils vraiment besoin du pardon d’Emmanuel Macron pour mettre fin à des années de «trauma» sur la question des crimes coloniaux commis au nom de la France ? Certainement pas ! Ils s’étonnent par contre de voir le pays des libertés et des droits humains se réfugier dans une sorte de conformisme, juste pour avoir bonne conscience et éviter de prendre des risques qui peuvent s’avérer désastreux sur le plan électoral. Il est regrettable de voir le président Macron dans cette posture qui ne lui sied pas, lui qui a eu le courage, juste après son élection, de dénoncer les affres du colonialisme en Algérie. Ce qui lui a valu une volée de bois de vert, y compris dans son propre camp.

Autant dire que Macron n’a pas le «quitus» pour engager la République française dans un acte de repentance envers l’Algérie, soixante ans après l’indépendance. C’est dire combien le contentieux est lourd entre les deux pays. Malgré le fait que l’Algérie ait été victime d’une agression, que son peuple ait subi des actes génocidaires et que ses richesses aient été spoliées par l’envahisseur, elle n’ouvre pas droit, aux yeux de Macron, à un pardon de l’Etat français. Pour le chef de l’Etat français, «une France s’est construite dans une forme d’impératif d’oubli, comme après la guerre entre Sparte et Athènes… On s’est refusé le droit d’évoquer cette période. Toute une génération politique française a participé à l’oubli et s’est construite autour». Sauf que les Algériens ne sont pas près d’oublier le passé colonial qui a causé des blessures profondes dans la société. Ils ont été atterrés d’apprendre que des crânes de résistants algériens étaient entreposés dans les caves d’un musée en France. Une partie a été rapatriée pour être enterrée en Algérie. Plusieurs autres attendent de faire le même chemin. Emmanuel Macron pense qu’il y a une réelle volonté de la part du président Abdelmadjid Tebboune d’entamer une nouvelle étape entre les deux pays. Il est absolument nécessaire de faire en sorte que le sang des martyrs devienne le «sang de l’espoir», pour paraphraser un ancien discours de Jacques Chirac. 

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