Le plasticien algérien Kamel Yahiaoui a tiré sa révérence : La grandeur de cet homme de l’humanité

02/08/2023 mis à jour: 01:48
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Né en 1966, le regretté artiste peintre Kamel Yahiaoui est le neveu du plasticien M’Hamed Issiakhem. Il était prédestiné, dès son jeune, aux arts plastiques. 

C’est tout naturellement qu’il transite dans un premier temps de 1985 à 1989 par l’Ecole des Beaux-arts d’Alger et dans deuxième temps par celle de Nantes de 1990 à 1991. Doué pour l’art, il réussi à organiser sa toute première exposition personnelle à Paris en 1990. 

Suivront d’autres expositions régulières en France et à l’étranger. Ayant plus d’une corde à son arc, en plus de sa passion pour la peinture, le défunt Kamel Yahiaoui aimait ciseler les vers pour mieux témoigner de ses préoccupations humanistes.

 En effet, il se plaisait à dénoncer et surtout à rappeler que l’histoire a tendance à se répéter. Ainsi, il estimait qu’il ne faisait pas de la politique mais «je la dénonce quand elle incarne la brume». Sa poésie avait cette puissance d’exprimer son for intérieur, permettant à «son esprit tourmenté d’exulter les horreurs que l’Homme peut infliger à autrui». 
 

L’œuvre

Outre son excellente maîtrise pour la peinture, Kamel Yahiaoui s’est remarquablement illustré dans la sculpture. Preuve en est : son œuvre s’est développée sur les supports et les matériaux les plus divers, objets usuels, toiles de jute ou plaques d’ardoise, tronçons de poutre ou madriers, tapis, cartes téléphoniques, planches à laver ou éléments d’appareils ménagers, serpillères ou valises.

Pour rappel, l’exposition Rideau d’interrogation que réalise Kamel Yahiaoui en février 2006 au Centre culturel algérien de Paris provoque une polémique. Kamel Yahiaoui y dénonce en effet «trois grandes déportation : celle des Africains par les négriers, celle des Algériens en Nouvelle-Calédonie et en Guyane après la révolte de 1871, et celle des juifs durant la Seconde Guerre mondiale. 

La série Déportation, l’extincteur de dignité est ainsi peinte sur des jerrycans d’essence datant 1943 et 1945. «Il est vrai que je suis le premier artiste appartenant par éducation à la culture berbéro-arabo-musulmane à traiter de ce sujet. Je lutte contre toutes les formes de racisme d’antisémitisme et contre tous ceux qui minimisent la dimension universelle des génocides et la non-reconnaissance de tous les crimes contre l’humanité». avait déclaré à cette époque le regretté artiste Kamel Yahiaoui. 
 

Kamel Yahiaoui a illustré Le Voyage des exils de Nabil Farés (Éditions de la Salamandre, 1996) et Crépuscule de Printemps de Si Mohand (Enag/Zynab Éditions, Alger, 2002). De même qu’on retrouve ses œuvres dans des collections publiques dont l’Institut du Monde arabe à Paris : La Mer des tyrannies, 2020, installation en matériaux divers, diamètre 420 cm (Donation Claude et France Lemand), La Main du secours, 2020, sculpture en matériaux divers, 107 x 40 x 40 cm (Donation Claude et France Lemand). Dès l’annonce du décès du plasticien Kamel Yahiaoui, la toile a été assaillie par de poignants et bouleversants témoignages. En effet, ses amis de l’art et proches ont raconté des souvenirs et certaines anecdotes qui dessinent le portrait d’un être jovial mais très exigeant dans le travail.

Omar Flici rend un bel hommage à son ami de cœur : «Trop triste mon ami, l’artiste peintre, le poète et sculpteur algérien, ‘‘l’Africain de la condition humaine’’, l’enfant terrible de La Casbah, celui des 5000 œuvres et 70000 poèmes authentifiés, qui a vu mille et une injustices… dédiées à la condition humaine parce qu’il voulait appartenir à la manufacture de l’histoire de l’humanité, nous a quittés ce matin. Kamel Yahiaoui l’artiste contemporain travaille les thématiques mémoires, émigration, colonisation, l’identité post-coloniale, le racisme, la domination, l’injustice, l’exil… Kamel Yahiaoui fait partie de ces artistes contemporains innovants. 

Mon défunt frère Laadi était son médecin traitant. Kamel, jeune adolescent offrait un dessin sur une ordonnance à mon frère pour régler sa consultation. Kamel à Paris, était mon voisin dans le XIIe arrondissement où il habitait. Que de souvenirs… Son œuvre, exalte surtout l’angoisse, la peur du lendemain et la mort. Kamel vient de rendre son dernier souffle après une longue maladie. Sincères condoléances à Nathalie sa femme, toute sa famille et ami (es).Kamel Yahiaoui, c’est uniquement : ‘‘Algérie mon amour’’. Tu vas nous manquer, cher frère et ami». De son côté, l’artiste peintre Mohamed Belkhorissat atteste que «Kamel Yahyaoui un homme noble et a un artiste intègre et courageux. Tu es parti si tôt mon ami, que Dieu t’accueille dans Son Vaste Paradis». 

Une autre personne certifie que Kamel Yahiaoui était d’une sensibilité et d’une force, «avec du tact et beaucoup de courtoisie, même lorsque les moments étaient difficiles. Parmi les immortels de l’histoire vous resterez».

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