Une longue histoire lie l’Algérie et la Coupe d’Afrique des nations (CAN). La grande épreuve continentale se résumait à sa naissance à la présence de trois sélections africaines. Il s’agissait de l’Egypte, le Soudan et l’Ethiopie. Les trois premières fédérations africaines affiliées à la FIFA respectivement en 1923 (Egypte), 1948 (Soudan) et 1953 (Ethiopie).
L’Afrique du Sud était la 4e nation du continent qui avait rejoint la FIFA en 1952. Le grand pays de l’Afrique australe faisait partie des membres fondateurs de la Confédération africaine de football (CAF) avant d’en être exclu la veille du premier tournoi organisé au Soudan en 1957. Une année plus tard, il était banni de la FIFA en raison de sa politique d’apartheid.
A l’époque, l’Algérie était sous colonisation française et la guerre de libération nationale entrait dans sa phase décisive. Malgré cela, l’Algérie n’était pas absente sur le plan footballistique. La glorieuse équipe nationale mise sur pied en avril 1958 a porté très haut la voix et le combat libérateur contre le colonialisme français.
Les Algériens n’avaient pas le cœur au football même si ce dernier fait partie de leurs gènes. Une fois le pays libéré du joug colonial, il était temps de préparer l’entrée du football algérien dans le concert continental.
D’abord, il a fallu faire redémarrer les compétitions intra-muros, réorganiser la pyramide du football, mettre le train sur de bons rails avant de se lancer à l’assaut de l’Afrique du football. Cela a pris cinq longues années durant lesquelles la Fédération algérienne de football (FAF) s’est structurée.
La FAF a inscrit l’équipe nationale dans le tournoi éliminatoire de la 6e édition de la CAN, c’est-à-dire la CAN de 1968 qu’allait organiser l’Ethiopie. La Tunisie, pays frère et voisin, avait organisé avec bonheur la 5e édition en 1965. Les dirigeants algériens se sont dit : «C’est bon, nous disposons d’une belle génération de footballeurs qui ne nous décevra pas en 1968».
En 1967, durant les éliminatoires de la CAN 1968 les Verts réalisent un sans-faute. Ils ont étrillé le Burkina Faso (à l’époque la Haute Volta), 2-1 et 3-1, le Mali 1-0 et 3-0. Pour l’histoire, le premier but de l’Algérie en coupe d’Afrique des nations à été l’œuvre du regretté Hassan Ouahdi Achour, l’ailier gauche du grand Chabab Belouizdad contre le Burkina Faso.
Donc, l’Algérie a abordé sa première aventure africaine en 1968 à l’occasion de la CAN qu’a organisée l’Ethiopie. Pour cette première participation la sélection était drivée par le Français Lucien Leduc. A l’époque, l’Afrique et son football était une inconnue. La sélection s’était préparée à Sidi Moussa dans des conditions qui n’ont rien à voir avec celles d’aujourd’hui.
Le nec plus ultra c’était les visites que le chef de l’Etat, le regretté Houari Boumediene, rendait aux joueurs sur place. Il n’était question ni de primes, ni d’avantages matériels. Comme encouragement, ils ont bénéficié d’une «prime» de 200 dinars, d’un costume et chemise et rien de plus.
Avant de s’envoler pour Addis Abeba, la sélection a effectué un stage à Seraïdi (Annaba) pour permettre aux joueurs de s’acclimater à l’altitude au pays du Négus (Hailé Sélassié). Le stage s’est en plus déroulé en plein Ramadhan. En Ethiopie, les joueurs ont trouvé beaucoup de difficultés à faire des efforts et récupérer. Les conditions sur place étaient vétustes. Les camarades du regretté Ahcène Lalmas avaient hâte d’entrer dans la compétition.
Ils ne savaient pas ce qui les attendait en interne et en externe. En interne d’abord. Des interférences sur le plan technique ont perturbé la sérénité du groupe. Le coach Lucien Leduc n’aurait pas eu les coudées franches pour composer l’équipe qui allait débuter la CAN 1968. Par exemple, le meilleur joueur de l’époque, Ahcène Lalmas (CRB), a été écarté de l’équipe type sans motif.
Le résultat ne s’est pas fait attendre. La Côte d’Ivoire de Laurent Pokou s’est bien amusée (3-0) devant une équipe algérienne méconnaissable et sans ressort.
Le soir de la lourde défaite, le sélectionneur s’est ouvert à notre ami et confrère Mokhtar Chergui (El Moudjahid) dans le jardin de l’hôtel : «On m’a forcé la main pour ne pas faire jouer Lalmas. Voilà le résultat. Contre l’Ouganda j’alignerai mon équipe. Je suis prêt à rentrer chez moi après le match».
Il n’aura pas à le faire. Ahcène Lalmas a réalisé un hat-trick (3 buts) et son coéquipier Kalem Mokhtar clôtura la marque (victoire 4-0). Le dernier match de la poule, Ethiopie-Algérie, était celui de la mort. Le pays hôte bénéficie d’un grand coup de pouce de l’arbitre congolais (Brazzaville) pour que les partenaires du grand Luciano se qualifient aux dépens de l’Algérie (3-1 avec une expulsion de Djillali Salmi).
A la fin du tournoi, la commission technique de la CAF désigna Ahcène Lalmas meilleur joueur du tournoi en compagnie de Luciano (Ethiopie) et Laurent Pokou (Côte d’Ivoire).
L’Algérie ne reviendra en coupe d’Afrique des nations que 12 ans plus tard. C’est-à-dire en 1980 avec une brillante équipe qui atteindra la finale contre le Nigeria et s’est qualifiée, pour la première fois en Coupe du monde deux ans plus tard (1982). L’histoire était en marche.