La ville d’Oran ne compte plus ses nombreux touristes : Profiter de l’été à la fraîche

14/08/2024 mis à jour: 00:23
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Une enfilade de terrasses, toutes bondées, apporte à la ville d’Oran et à la principale artère du quartier Akid Lotfi, son lot d’animation

 Comme chaque année, le temps d’une saison estivale, la ville d’Oran se gorge de visiteurs, partagés entre les émigrés et ceux venus de diverses wilayas du pays. Cet été 2024 ne déroge pas à la règle, loin s’en faut. 

 

Il n’y a qu’à faire un tour en ville pour constater, de visu, une affluence de «promeneurs» bien plus notable que durant les autres saisons. Cela dit, cette fois-ci encore, nous avons constaté combien le centre-ville peut être à la traîne comparativement à Oran-Est, cette partie de la ville qui prend la part belle des activités touristiques et accueille, tous les soirs, des flots de visiteurs. 

Le centre historique d’Oran, avec ses rues Larbi Ben M’hidi, Khemisti, son boulevard Emir Abdelkader et ses quartiers de Saint-Pierre et de Miramar, peine, lui, aux premières heures de la soirée, à attirer foule. Il n’y a que son front de mer, long de plusieurs kilomètres, qui se retrouve plus ou moins investi par les noctambules. Il y a aussi, il est vrai, la devanture du magasin Disco Maghreb, avec son rideau de fer baissé et sa cassette audio en guise d’enseigne, qui attire tous les jours, et du matin au soir, des essaims de touristes, venus se prendre en photo devant ce qu’il faut bien appeler un «monument» tant, depuis deux années maintenant, il attire des milliers de touristes. 

Plus loin, à Loubet, l’une des avenues les plus prisées d’Oran, plusieurs cafés dotés de terrasses ont vu le jour ces derniers mois, mais ces établissements, pourtant tout clinquants, peinent encore à imposer une mixité en bonne et due forme à l’image de celle qui prévaut à Akid Lotfi ou au boulevard des Lions. 

Il faut savoir que de l’avis de beaucoup, il est certes une bonne chose que la zone est de la ville soit animée et vivante mais qu’il serait tout aussi judicieux que le blason soit redoré pour le centre d’Oran, que ce dernier ne soit mis aux oubliettes. «Moi qui marche beaucoup, explique Aya, lorsque mes pas m’emmènent au centre-ville, je sens comme une incommodité, un inconfort. Sauf le boulevard du front de mer, les trottoirs du centre-ville, particulièrement ceux de la rue Larbi Ben M’hidi, laissent drôlement à désirer !» 

Effectivement, ces trottoirs ont été aménagés en 2010, cette année où Oran avait abrité les travaux de la GNL16, mais force est d’admettre que 14 années après, il est grand temps de les changer tant ils n’ont de cesse - ces trottoirs soi-disant antidérapants mais en vérité gorgés de malfaçons ! -, à faire trébucher tout un chacun. Si, durant le jour, la principale place d’Oran, celle du 1er Novembre, attire plus ou moins de monde, à l’heure où le crépuscule tombe, elle n’a d’yeux que pour les usagers du transport public, ceux du tramway et des bus de la ligne 34 et 37. 

 

Contraste frappant

Là aussi, il aurait été judicieux de repousser les horaires des dernières rotations à après-minuit, de sorte que les gens puissent profiter de la ville en nocturne sans se soucier du moyen par lequel ils rentreront, la nuit, chez eux. «J’habite à Hai Nour et je passe mes après-midis au centre-ville. Je trouve dommage que le dernier tramway démarre en été à 21h50 pour arriver au terminus à 23h. Ça aurait été bien qu’il continue jusqu’à 1h du matin. Et puis, je le dis à chaque fois : en été ou durant le Ramadhan, comme les gens changent leurs habitudes et sortent plus souvent la nuit, les taxis doivent s’y conformer et ne pas imposer un tarif de nuit à partir de 21h !»

 Même topo pour le téléphérique, celui qui mène du quartier El Derb jusqu’au plateau de Moulay Abdelkader en passant par les Planteurs : le guichetier nous a précisé que la dernière rotation était fixée à 20h et lorsque nous nous sommes enquis des horaires estivaux, il nous a répondu que c’est justement parce que c’est l’été que le téléphérique reste fonctionnel jusqu’à cette heure, autrement il s’arrête à 19h. 

Pourtant, les autorités locales avaient lancé, dernièrement, des travaux d’embellissement du plateau de Moulay Abdelkader, en gazonnant ses allées et en aménageant des aires de jeux pour les enfants et des terrains de sports. 

Ça en aurait «jeté» que cet espace, sur les hauteurs, qui donne une vue imprenable sur la baie d’Oran, ait reçu, durant l’été, chaque soir, des foules de noctambules, à l’image du jardin méditerranéen ou de Sidi M’hamed. Au surplus, ça aurait permis au quartier El Derb de renaître quelque peu de ses cendres ou du moins de retrouver des couleurs. Hamid, qui fait souvent l’aller-retour entre Oran et Alger, nous explique pour sa part : «A Alger, ils ont certes des points de chute intéressants extramuros, où les familles et les bandes d’amis y vont en grand nombre, mais ce n’est pas pour autant qu’ils négligent leur centre-ville. Y a qu’à se promener à Audin pour s’en rendre compte : des terrasses partout, des jeunes grattant leurs guitares, etc. Il y en a pour tous les goûts ! A Oran, on gagnerait à suivre l’exemple de la capitale et ne pas jeter son dévolu seulement sur El Akid, Millenium et autres quartier de l’Est.» 

Justement, dans cette zone de la ville, le contraste est frappant : des rues, devenues piétonnes pour la circonstance, sont investies, jusqu’au petit matin, par des foules de noctambules, entre visiteurs venus d’autres wilayas, émigrés ou gens d’Oran. A Akid Lotfi, une enfilade de terrasses, toutes bondées, apporte à la principale artère de ce quartier son lot d’animation. Pareil du côté du boulevard des Lions où familles, couples et bandes d’amis traînent leurs guêtres, faisant du lèche-vitrine ou s’asseyent sur un brin d’herbe pour voir passer le temps. Pour ce qui est de la restauration, le choix est éclectique, allant de la street-food proprement algérienne aux spécialités étrangères. 

Le boulevard des Lions compte également un centre commercial, de moindre envergure que Senia Center, mais tout de même assez imposant, ainsi qu’une grande surface de jeux, proposant toute sorte d’attractions, du cinéma 3D et 9D, au trampoline, en passant par le patin à glace et autres. Cela dit, s’il y en a pour tous les goûts, les prix pratiqués peuvent être perçus par certains ménages comme prohibitifs. Autre impair à la zone est d’Oran : les gens peinent toujours à se tisser des repères ! «Si un ami me donne rendez-vous dans un nouveau café situé à Millenium, c’est la croix et la bannière pour le trouver étant entendu que ce boulevard est long de plusieurs kilomètres... certes, il y a le GPS, mais ce n’est pas toujours évident. A contrario, si on me donne rendez-vous dans une nouvelle pizzeria du centre-ville, à Khémisti par exemple, je la retrouve aisément.» Et un chauffeur de taxi de renchérir : «Ça fait dix ans que je travaille en tant que chauffeur de taxi et je ne fais toujours pas de différence entre Haï Yasmine 1, Haï Yasmine 2, Haï Nour et Haï Salem. Pour moi, ces cités appartiennent à la même agglomération.» 


Espaces verts aménagés

Et un habitant de Haï Nour justement, Oussama de son prénom, de témoigner, avec son air ironique et persifleur : «J’habite Haï Nour, dans une cité populaire. Cela dit, on n’est pas loin du boulevard des Lions, avec ses magasins clinquants et ses cafés huppés. Avec mes amis du quartier, on s’amuse à dire que du côté de notre cité, c’est ‘el sayi’aate’ et du côté du boulevard des Lions, c’est ‘el hassanate’» 


Pour ce qui est de la verdure, notons que cette année, un nouvel espace est venu grossir les rangs de ceux qui existent déjà, à l’image du jardin de Sidi M’hamed, jardin Méditerranéen et celui de Akid Lotfi. Il s’agit de l’espace de Seddikia, aménagé à la place des anciens ‘batimate taliane’, ces bâtiments fortement amiantés qui ont été détruits en 2022 quand leurs occupants ont été relogés ailleurs. Le voilà à présent transformé en une belle esplanade où les familles s’installent dès le coucher du soleil pour y rester des heures et des heures, pique-niquer même, et surtout profiter de l’été à la fraîche. 

A ce propos, il serait tout aussi bien que les jardins de la roseraie, au centre-ville, et le jardin municipal, de M’dina J’dida, bénéficient d’éclairages et de quelques retouches à même de pouvoir, en nocturne, attirer les visiteurs. Oran étant une ville «chaude» et où le taux d’humidité atteint chaque été des records, les gens, de facto, cherchent le moindre petit bout de verdure pour aller s’y prélasser. Il n’y a qu’à se rappeler, il y a une quinzaine d’années de cela, bien avant l’aménagement de ces espaces de verdure, quand les Oranais avaient créé un phénomène de mode en se ruant d’abord sur le vaste rond-point de l’hôtel Sheraton, puis sur celui de l’hôtel Méridien, qui avaient la particularité d’être gazonnés à souhait et munis de systèmes de jets d’eau performants. 


C’est dire combien la verdure ne relève pas de la simple gâterie et qu’il est nécessaire de «verdoyer» sa cité pour le bien-être de celles et ceux qui l’habitent. Pour ce qui est de l’hébergement, une idée ingénieuse a été prise cette année, celle d’exploiter le village olympique, construit pour les besoins de la 19e édition des Jeux méditerranéens de 2022, en permettant au grand public d’en profiter. 

Situé à Belgaïd, ce village a été ouvert en vérité partiellement au public, 1000 chambres leur ont été alloués et à des prix défiant toute concurrence. Enfin, qui dit saison estivale à Oran, dit forcément la Grande Bleue, les plages de la Corniche et toute l’ambiance qui est de mise. Mais ça, nous y reviendrons dans un second reportage ! 


Reportage réalisé à Oran par Akram El Kébir

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