La section Snapap de l’Ecole dénonce un certain nombre d’«abus» et autres «décisions arbitraires» émanant de la direction de l’Ecole.
Depuis plusieurs mois maintenant, un conflit social couve à l’Ecole supérieure des Beaux-arts d’Alger (ESBA). La section Snapap de l’Ecole dénonce un certain nombre d’«abus» et autres «décisions arbitraires» émanant de la direction de l’Ecole.
Ce syndicat, convient-il de le souligner, active exactement depuis le 29 juin 2021. En amont de la création de cette section Snapap, un collectif de fonctionnaires de l’ESBA a commencé à saisir diverses instances pour alerter sur la dégradation du climat de travail aux «Beaux-arts». Nous avons à notre disposition des copies des courriers adressés par ce collectif de travailleurs à ces différentes institutions.
La première de ces lettres de doléances, datée du 18 mai 2021, a été adressée au ministère de la Culture et des Arts, du temps de Malika Bendouda. Une autre, datée du 20 mai 2021, a été envoyée aux services du Premier ministre. A la même date, le directeur général de la Fonction publique a été également saisi. La nouvelle ministre de la Culture, Wafa Chaâlal, a été destinatrice à son tour d’une lettre de doléances le 16 septembre 2021.
A travers les correspondances que nous avons consultées, les auteurs dénoncent des «différences de traitement» entre travailleurs, de la part de la direction. Ces disparités portent sur les attributions de congés, les affectations, les autorisations de sortie pendant les heures de travail, et même les congés de maladie. Les auteurs contestent, par ailleurs, la «notation des primes de rendement».
Autre point litigieux : les reliquats de congé qui ne sont plus accordés. «Le directeur a supprimé les reliquats du congé annuel 2018 ainsi que les congés d’hiver et de printemps», peut-on lire. Un des principaux griefs faits à la direction des Beaux-Arts : «La commission des œuvres sociales est complètement gelée», relève une déléguée syndicale.
Elle explique : «Il y a eu un vote par l’assemblée des travailleurs le 26 octobre pour élire la commission des œuvres sociales. Il y a eu 5 membres titulaires qui ont été élus et 3 membres suppléants. Après, il fallait élire le président et le vice-président de la COS. Les textes là-dessus sont très clairs : ils disent que ceux-ci sont élus à l’intérieur de la commission, entre les membres titulaires. Mais il (le directeur) s’est immiscé dans l’affaire et a dit : les suppléants aussi votent. Suite à quoi les membres titulaires ont transmis un courrier au directeur déclarant qu’ils rejetaient cette procédure. Et jusqu’à maintenant, la commission est bloquée.»
Un volet important des doléances exprimées par les membres de la section Snapap porte sur le traitement réservé au syndicat. Les représentants syndicaux dénoncent ainsi le fait de se voir «adresser des questionnaires» et «sanctionner par des retenues sur salaire pour des absences liées à notre activité syndicale».
Pour eux, c’est le signe d’une non-reconnaissance du partenaire social. Ils en veulent pour preuve que depuis sa création, aucune rencontre formelle n’a réuni le syndicat avec le directeur de l’ESBA, Djamel Larouk. Des courriers lui ont été adressés le 1er juillet, le 8 juillet, le 14 octobre… «Mais nous n’avons reçu aucune réponse».
Devant cette situation de blocage, la section syndicale a organisé une demi-journée de grève qui a eu lieu le 26 septembre à l’intérieur de l’Ecole des Beaux-Arts. Sans résultat. «On lui a transmis encore une demande d’audience le 21 novembre accompagnée d’une plateforme de revendications. Nous avons été orientés vers le sous-directeur de l’Administration et des Finances qui nous a déclaré : je n’ai pas de délégation de signature pour traiter avec vous», témoignent des membres de la section Snapap.
«Nos portes sont ouvertes et le syndicat est un partenaire social»
Sollicitée pour nous livrer sa version des faits, la direction de l’Ecole supérieure des Beaux-Arts, par la voix du sous-directeur de l’Administration et des Finances, Nabil Amraoui, se dit parfaitement favorable au dialogue. M. Amraoui précise d’emblée que le directeur de l’ESBA, M. Larouk, n’était pas en mesure de nous recevoir, étant souffrant depuis plusieurs mois.
«Nous, on applique la politique des portes ouvertes», lance Nabil Amraoui dans un sourire. Il affirme dans la foulée qu’il est continuellement en contact avec les membres du syndicat, qu’il les reçoit sans protocole. «Mais eux tiennent à être reçus par le directeur et je leur ai maintes fois expliqué que le pauvre est vraiment malade. Il souffre d’une hernie discale.
On lui apporte le parapheur à domicile» Il répète à plusieurs reprises : «Les revendications du syndicat sont les objectifs que poursuit le directeur. Il considère la section syndicale comme un partenaire social».
En guise de preuve, M. Amraoui rapporte : «S’il ne reconnaissait pas la section, comment aurait-il signé des autorisations d’absence pour activité syndicale ?» Il exhibe à l’appui une demande présentée par une représentante du syndicat pour une activité, et qui a reçu l’avis favorable du SDAF et du directeur. «J’ai dit aux délégués syndicaux : vous avez droit à 10 heures d’absence par mois pour vos missions syndicales. C’est la loi qui vous l’accorde». Et de nous lire l’article 46 de la loi 90-14 relative aux modalités d’exercice du droit syndical.
S’agissant des syndicalistes qui ont été soumis à un questionnaire ou même vu infliger une sanction financière, le responsable administratif invoque «le non-respect de la réglementation». Il cite l’article 208 de l’ordonnance 06-03 portant statut général de la Fonction publique qui détaille les cas où le fonctionnaire «peut bénéficier, sous réserve de justification préalable, d’autorisations d’absence sans perte de rémunération».
Et parmi les situations énumérées : «Pour s’acquitter d’une mission liée à une représentation syndicale». «Je leur ai dit vous avez droit à 10 heures à condition d’apporter une justification : soit tu as une réunion, une formation, un congrès, un séminaire. En l’absence de justificatif, on applique la réglementation», argue M. Amraoui.
S’agissant de la commission des œuvres sociales, le sous-directeur reconnaît qu’elle est effectivement bloquée mais renvoie la balle au syndicat. «Nous avons sollicité le ministère du Travail qui nous a confirmé que ce sont tous les membres de la commission des œuvres sociales, à savoir les 8 titulaires et les 3 suppléants, qui ont le droit de voter (pour élire le président et le vice-président de la COS). On leur a dit : choisissez une date et organisez le vote. Mais une des membres titulaires est en congé. L’élection n’a donc pas pu avoir lieu», dit-il.
Concernant les autres points, M. Amraoui dément l’ingérence du directeur dans la notation de la prime de rendement. Et pour les reliquats de congé refusés aux cadres administratif, il indique que «seuls les enseignants ont droit aux congés d’hiver et de printemps». Il poursuit : «Le congé annuel est un droit absolu. Tu n’as le droit ni de le reporter ni de le fractionner».
Et si, pour nécessité de service, un fonctionnaire est privé de son congé annuel, «celui-ci doit être impérativement consommé dans un délai n’excédant pas deux ans». Une disposition, précise-t-il, de l’article 206 du statut général de la Fonction publique.