La recette de Kaïs Saïed pour sortir la Tunisie de la crise

19/01/2022 mis à jour: 03:45
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Le président tunisien, Kaïs Saïed, recevant le responsable de l’UGTT, Noureddine Taboubi / Photo : D. R.

Mise en route d’une consultation populaire en Tunisie. Elle s’étend du 15 janvier au 20 mars et servira de source aux réformes socioéconomiques à entreprendre. Le président Saïed veut que ce soit le peuple qui fait les choix économiques et politiques. Il y a, par ailleurs, des prémices de négociations avec le Fonds monétaire international (FMI).

Le président tunisien, Kaïs Saïed, cherche à mettre en œuvre des choix populaires dans les grandes options socioéconomiques du pays, afin de réaliser les objectifs de la révolution, «trahis par les gouvernements successifs», selon lui.

Dans cet objectif, le président Saïed a ordonné le 13 décembre dernier une consultation populaire, en ligne, accessible à tous les Tunisiens sur la plateforme https://www.e-istichara.tn.

Cette consultation a été lancée le 15 janvier et se poursuivra jusqu’au 20 mars, elle est accessible à tous les citoyens disposant d’une ligne téléphonique, via le code *1712* suivi du numéro national. Un comité d’experts fera ensuite la synthèse de cette consultation et soumettra ses grandes revendications au peuple dans un référendum le 25 juillet. Des questions sont toutefois posées sur l’efficacité du processus et la traduction des choix populaires.

Le téléphone mobile est présent dans la quasi-totalité des foyers en Tunisie, y compris dans l’arrière-pays et les patelins les plus reculés. Et c’est pour cette raison que ce mode de communication a été choisi par le président Saïed. Il s’agit du même mode d’emploi que les examens nationaux.

La consultation a été développée par le Centre national d’informatique (CNI), elle comporte six axes, la politique et les élections, l’économique et les finances, le développement et la transition numérique, le social, la santé et, finalement, l’éducation et la culture.

Chaque axe comprend des questions et un espace de libre expression, selon les précisions de Chawki Chihi, directeur général au ministère des Technologies de la Communication à l’agence TAP.

Pour les Tunisiens à l’étranger, un autre numéro sera dédié et annoncé incessamment par le même ministère, selon Chihi. L’universitaire constitutionnaliste Amine Mahfoudh a précisé sur la chaîne Ettassiaa qu’un comité académique indépendant veillera à la transformation des résultats de la consultation populaire en question  pour le référendum du 25 juillet 2022.

«Oui, le référendum pourrait changer le régime politique en Tunisie», a souligné l’universitaire, tout en précisant qu’il ne fait pas encore partie dudit comité. Le professeur Mahfoudh a également exprimé son refus de l’idée de «retirer le choix des urnes, lorsqu’une proportion des électeurs découvre la trahison de l’élu», synonyme de chaos pour l’universitaire.

Mahfoudh a assuré que lui et ses deux collègues, Sadok Belaïd et Mohamed Salah Ben Aïssa, sont là pour «aider le Président dans l’établissement de l’Etat de droit, l’un des principaux objectifs de la révolution de 2011». Les trois universitaires sont régulièrement consultés, ces derniers mois, par le président Saïed. Au-delà de la consultation, il y a l’amnistie pénale et une loi, annoncée depuis 2012 et jamais mise en place, sur l’amnistie des hommes d’affaires ayant bénéficié du régime déchu.

Choix

Il s’agit, selon le président Saïed, de faire un compromis avec eux, consistant à investir dans les zones démunies du pays, proportionnellement avec ce qu’ils ont «gagné». Saïed considère que «c’est un moyen de rendre l’argent au peuple».

Les patrons et leur centrale syndicale (Utica) sont d’accord sur ce principe. Ils attendent les détails pratiques de cette loi pour passer à l’acte et tourner la page de cette décennie d’extorsion de fonds, selon les termes d’un homme d’affaires préférant garder l’anonymat. Les hommes d’affaires financeront donc les projets choisis par le peuple lors de la consultation populaire.

Et le gouvernement de Najla Bouden s’occupera des grands dossiers financiers. Des négociations avec le FMI finaliseront cette problématique. Côté soutien institutionnel, le président Saïed a rencontré, avant-hier, le secrétaire général de la centrale ouvrière, l’UGTT, pendant trois heures et demie.

La durée de la rencontre traduit l’importance des discussions. L’UGTT n’a jamais rompu les ponts avec la présidence de la République, elle a toujours cherché, depuis le 25 juillet, à garder attache avec Saïed, qui a permis de «dégager Ennahdha du pouvoir», selon les termes de Sami Tahri, porte-parole de l’organisation syndicale, qui se reconnaît dans ce mouvement.

L’UGTT cherche uniquement à avoir sa place dans cette Tunisie de l’après-25 juillet. Les partis de l’opposition, notamment les islamistes d’Ennahdha, Ettayar de Mohamed Abbou, ou encore le Parti des travailleurs de Hamma Hammami, sont déçus du réchauffement des relations entre l’UGTT et Saïed. Le président Saïed est, semble-t-il, en voie de gagner la partie en Tunisie.

 

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