La progression de la consommation domestique menace les exportations des hydrocarbures : Quelles énergies de substitution ?

27/06/2022 mis à jour: 21:45
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Photo : D. R.

L’Algérie devrait arbitrer entre les exportations et la consommation interne d’énergie, qui a atteint en 2019, 66,9 milliards de tonnes d’équivalent pétrole (tep) représentant 43% de la production totale, alors qu’en 2007, cette consommation était de 39,39 milliards de tep (21,8% de la production).

Avec une consommation en produits énergétiques conventionnels sans cesse en hausse ces dernière années, qui a augmenté de 83% en 2019 par rapport à 2007, le modèle énergétique algérien a montré ses limites et menace même les engagements du pays vis-à-vis du marché international.

Un point de rupture est même prévu en 2028 si cette tendance haussière se maintient et si le développement des énergies renouvelables continue à enregistrer des retards. A ce stade, l’Algérie devrait arbitrer entre les exportations et la consommation interne d’énergie, qui a atteint, en 2019, 66,9 milliards de tonnes d’équivalent pétrole (tep) représentant 43% de la production totale, alors qu’en 2007, cette consommation était de 39,39 milliards de tep (21,8% de la production).

C’est dire que le taux de croissance de la consommation énergétique (de 7 à 8% annuellement) par rapport à celui des réserves et des capacités de production est en déséquilibre. Un déséquilibre qui tend à s’accentuer sans pour autant assurer en parallèle une contribution dans la création de richesses.

Les chiffres présentés hier par l’expert en énergie et ancien ministre du secteur, Abdelmadjid Attar, dans son étude sur les enjeux de la sécurité énergétique, lors d’une conférence organisée à l’initiative de la Confédération algérienne du patronat citoyen (CAPC), le montrent clairement.

69% de la consommation gazière sont dans le secteur résidentiel et les services communs. Aussi, 79% de la consommation d’électricité ont lieu dans les mêmes secteurs et usages alors que 70% de la consommation en carburants se font dans le transport routier.

D’ailleurs, l’étude en question fait ressortir une augmentation annuelle de 6% en matière de consommation en produits pétroliers, dont la part en carburants atteint les 80%. A ce rythme, en 2033, l’Algérie ne pourra exporter qu’à peine 10% de gaz naturel, contre 80% en 1980, 79% en 2005 et 58% en 2019.

Ce modèle énergivore devrait pousser les pouvoirs publics à accélérer le processus de transition énergétique. Et ce, d’autant que les réserves, certes renouvelées, notamment en pétrole au cours des années 1990, ont entamé une chute depuis le milieu de la première décennie des années 2000, avec une forte production gazière de manière particulière.

L’étude relève en effet, concernant les productions et les découvertes réalisées depuis 2015, un total de 4,5 milliards de tep, dont 1,7 milliard de tep prouvées en hydrocarbures liquides (y compris les réserves probables non encore développées) et 2,5 milliards de tep en gaz naturel, alors que les besoins en gaz naturel à l’orée 2050 s’évaluent à 6 milliards de tep, soit 6000 milliards de mètres cubes, pour garder le même rythme de consommation interne et d’exportation.

Le débat sur le gaz de schiste relancé

«Donc, il y a 3500 milliards de mètres cubes à assurer d’ici là. Si on prend en considération les futures découvertes qui tablent, selon l’étude, sur 1700 milliards de mètres cubes, on n’aura que la moitié», explique Ahmed Mechraoui, expert en énergie et ancien directeur à Sonatrach. «D’où proviendraient les 50% restants ?» s’est-il interrogé.

En réponse à cette question, il dira lors des débats en panel : «Nous n’avons pas le choix, nous devons aller vers l’économie d’énergie et l’efficacité énergétique. Il y a lieu aussi de mettre en application le programme de développement des énergies renouvelables.» Les scénarios ne s’annoncent guère rassurants et l’Algérie pourrait même, selon l’expert, «être obligée d’acheter du gaz en 2046».

«Au-delà de 2030, une période qui verra la baisse en demande pétrolière, et si aucune mesure n’est prise, notamment en matière de modèle de consommation énergétique, il est très peu probable que la production d’hydrocarbures conventionnels, particulièrement le gaz, puisse satisfaire en même temps les besoins de consommation interne et le même niveau absolu de rentre financière», avertit, pour sa part, Abdelmadjid Attar.

Quelles solutions face à une telle situation ? L’expert propose dans ce cadre l’élaboration d’une loi sur la transition énergétique, parallèlement à l’amendement de la loi sur la protection des ressources pour préserver les gisements actuels, en plus du développement de la recherche et de la formation. Mais au-delà d’une nouvelle politique énergétique, il serait nécessaire, selon l’ancien ministre, de ne pas négliger l’apport des hydrocarbures non conventionnels. «Une réalité à laquelle il faudra se préparer pour au moins compenser le soutirage des réserves actuelles durant la prochaine décennie», dira-t-il.

Et c’est le cas pour le gaz de schiste, une option que défend Abdelmadjid Attar, qui rappellera : «Toutes les analyses récentes placent l’Algérie à la troisième place du point de vue réserves, après la Chine et l’Argentine, avec près de 24 800 milliards de mètres cubes de gaz et environ 7 milliards de barils de pétrole techniquement récupérables.»

Pour Attar, les réticences vis-à-vis de cette énergie peuvent être estompées avec le recours aux progrès technologiques appelant à associer la société civile dans ce cadre, sous le contrôle des différentes agences de régulation. A travers cette sortie donc, l’expert relance le débat sur le gaz de schiste et sur ses risques environnementaux. Qu’en sera-t-il de ce dossier ?

 

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