La note secrète du ministère français de l'intérieur : Des contraintes insensées contre l'Algérie

03/03/2025 mis à jour: 18:21
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(Dessin le Hic )

L’ultimatum a été exposé mercredi par un Premier ministre un peu désordonné et assoiffé dont on ne sait quel breuvage machiavélique, lui qui cherchait fébrilement un verre d’eau et s’emmêlait dans ces fiches… 

La réponse claire et nette du gouvernement algérien aura vite remisé son catalogue de revendications au classement vertical. Sauf pour les détenteurs de passeports diplomatiques ou de service qui auront et vont faire les frais de la ligne dure impulsée par le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau. Avec notamment la mésaventure de l’épouse de l’ambassadeur algérien au Mali refoulée… Cas auquel le gouvernement algérien a répondu via l’APS dimanche. 

Cette suite de dispositions malveillantes envers l’Algérie exposées par François Bayrou n’est rien par rapport à ce que révèle une note, dite secrète, mais qui a fuité dans La Tribune du dimanche. Elle est censée reprendre ce qui était soumis au conseil interministériel sur le contrôle de l’immigration convoqué la semaine dernière.

Pas cascadeur pour autant, l’hebdomadaire dominical met de côté ce qui relève dans cette note du secret-défense. C’est bien dommage. Mais cependant, on y traite d’une opération d’envergure, face à ce que les autorités françaises appellent la mauvaise volonté d’Alger. On décrit un inventaire lunaire dans lequel il ne manque que le service des affaires interstellaires : «La riposte dépendrait du pêle-mêle des ministères de l’Intérieur, des Finances, des Transports et des Affaires étrangères.» Cette réaction anti-algérienne «inclurait des restrictions massives de visas ciblant la nomenklatura algérienne». 

Cela on le savait déjà, mais la note va plus loin, souhaitant que ces restrictions s’appliquent, «le cas échéant, à l’encontre de l’ensemble de la population», avec un «élargissement aux cercles militaires et économiques». 


                                               (Le ministère de l'Intérieur français)

 

Suspendre l'activité des compagnies aériennes et maritimes algériennes

De plus en plus inquiétant, on y établit la possibilité d’une «liste des dignitaires algériens se voyant déchus de leurs droits de circulation en France», ainsi que «des mesures patrimoniales à l’endroit des intérêts» de ces personnes. Ce qui voudrait dire spolier leurs biens. La colonisation en a acquis l’expertise depuis 1830… Une spoliation dont, entre parenthèses, ont déjà fait les frais les Russes et que certains voudraient utiliser pour financer la guerre en Ukraine dont le président des USA souhaite se désengager. 

La note voudrait aussi établir une liste d’Algériens à expulser du territoire français et suspendre l’activité des compagnies aériennes et maritimes algériennes dans l’Hexagone… Les aéroports, dont celui de Marseille, mais pas seulement, qui vivent pour une bonne part sur le flux d’Air Algérie vont apprécier.

Et enfin, la note souhaiterait que les consuls généraux d’Algérie en France soient convoqués non seulement par les Affaires étrangères mais aussi par l’Intérieur, pour leur rappeler qu’ils doivent réadmettre leurs nationaux expulsés par la France. C’est vrai qu’il n’y pas plus d’ambassadeur en France… La Tribune du dimanche ne le souligne pas et ne discute pas le bien-fondé d’une telle convocation, sachant que toute autorité nationale a le droit de s’assurer de la pertinence juridique de certaines expulsions arbitraires. 
La note souhaite également l’ouverture, à ce sujet, un «contentieux international sur la violation par l’Algérie de ses engagements». 

Et à ce titre, voudrait «une surveillance des manœuvres entreprises par les services de renseignements algériens en France». Évidemment, le journaliste ne s’interroge par sur cette proposition, comme si cette surveillance n’existait pas déjà entre tous les services d’où qu’ils soient et dont personne n’a… le secret.  

Dernière précision rapportée par la note, le nombre de visas de court et long séjour attribués par la France à des Algériens. Ils s’élèvent en 2024 à 245 000 visas. Par contre, 25 000 OQTF ont été prononcées avec 2999 éloignements, alors que dans les centres de rétention administrative, 40% des personnes retenues sont des Algériens, le plus fort contingent. 

A ce sujet, il faut préciser que nombre d’étrangers (toutes nationalités confondues) sortent libres du commissariat ou de la gendarmerie avec une OQTF qu’ils doivent d’eux-mêmes respecter. Ne respectant pas les délais d’un auto-éloignement, ils restent malgré tout clandestins. Ceux-là ne figurent pas dans la statistique énoncée ci-dessus. 

Un appel a l’européanisation du dossier «Algérie»

Sur l’ouverture internationale du «contentieux» algérien, l’autre journal dominical, Le Journal du dimanche (Galaxie Bolloré comme Cnews) a obtenu des informations à la source de ses réseaux dans l’administration. Il affirme que le modèle Trump fait des émules en France : «D’après nos informations, Paris a envoyé des signaux à Bruxelles pour que l’accord d’association entre l’Algérie et l’UE actuellement discuté soit renégocié : il prévoit en effet la suppression totale des droits de douane en faveur de l’Algérie. Autre levier évoqué, à l’échelle européenne toujours, une réforme de l’article 25-bis du code communautaire des visas de Schengen qui prévoit des sanctions financières en cas de refus de réadmission par des pays tiers. Paris aimerait aller plus loin en proposant notamment la possibilité de réduire la quantité des visas de court séjour accordés aux pays non coopératifs.» 

Le JDD reconnaît que la realpolitik l’emporte, qu’un «consensus idéologique» au sein des 27 serait compliqué, citant un diplomate : «Des pays vont bloquer, l’Italie notamment qui a fait de l’Algérie son nouveau partenaire gazier.» 

Il ne dira pas que la France serait en bien mauvaise posture économique sans le gaz algérien ! 
 

France 
De notre correspondant Walid Mebarek

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