La fin des chimères

13/02/2022 mis à jour: 06:47
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La rupture avec l’ancien régime politique passe également par la fin des chimères qui l’avaient caractérisé, dont celle qui promettait une voiture neuve pour chaque citoyen disposant d’un salaire et un véhicule utilitaire pour tout demandeur d’emploi.

 Cette sortie de piste économique était rendue possible par la rente pétrolière aujourd’hui réduite à sa plus simple expression. Le mirage des véhicules flambant neufs, dotés de tous les équipements de sécurité exigés dans le monde, mis à la disposition du commun des citoyens, est en train de se dissiper à l’heure où l’économie productive dépasse péniblement le stade des vœux pieux. La réponse, à ce sujet, du ministre de l’Industrie, jeudi dernier à l’APN, est édifiante sur les progrès qui restent à accomplir en matière d’industrialisation avant d’envisager un retour aux importations dans ce registre. 

Le cahier des charges est en cours de révision, dira-t-il, à propos des véhicules neufs, avant d’évoquer le plan de relance des entreprises industrielles à l’arrêt ou en difficulté financière. Il citera, entre autres, une unité de production du fil à coudre à Sétif et une société de fabrication de verre à Jijel. Le dur retour à la réalité, celle d’un pays qui a laissé en jachère son tissu industriel, tout en promettant une prospérité clé en main et hyper subventionnée à l’ensemble de la collectivité, n’est pas encore totalement accepté. L’on continue à s’accrocher au rêve d’une voiture fabriquée par d’autres mains expertes et qui, aux prix annoncés, ne sera accessible qu’à une infime partie de la population, pas nécessairement celle qui vit de son labeur. 
 

La classe moyenne, qui a déjà un pied dans la précarité, avant de mettre le second dans la misère, si des secteurs entiers sont emportés par la crise, ne peut pas mobiliser un demi-milliard, même en passant par les banques, aux fins de rouler en carrosse neuf comme au début des années 2000. Les autorités peinent à tenir le discours de la vérité. Un ancien ministre s’y était essayé, mais à ses dépens. Il déclarait, il y a près de deux ans, que «le véhicule touristique n’est pas une priorité, ce n’est pas un produit social qui peut nous amener à faire des sacrifices fiscaux et en devises». 

Il sera brocardé et son esprit cartésien ne lui permettra pas de durer au gouvernement. Aujourd’hui, le discours officiel est arrondi aux angles et l’on a volontiers recours aux atermoiements. Le réexamen sans fin du «cahier des charges» est tout aussi inopérant que la lutte contre la spéculation quand c’est le manque de production qui fragilise la vie socioéconomique du pays. 
 

Si le but était d’atteindre un niveau de vie proche de celui des pays développés, il faudrait réaliser que, sous ces latitudes, le véhicule touristique reste au garage durant la semaine et le progrès y est surtout visible dans la modernisation des transports. Ce dossier est plus simple à prendre en charge dans le contexte national, avec la contribution des assemblées élues qui s’accommodent trop vite de l’inaction durant leurs mandats. 

La réalisation ou la réhabilitation des gares routières, la réorganisation des transports en commun et leur attribution à des opérateurs professionnels pour mettre fin à l’anarchie qui règne notamment dans les villes, et l’extension du réseau ferroviaire sont des chantiers qui méritent d’être remis à l’ordre du jour.

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