Kinshasa veut le départ de la force de l’ONU : Armées étrangères et miliciens «proxy» prospèrent en RDC

17/10/2023 mis à jour: 16:12
AFP
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Les discours hostiles se sont multipliés, ces deux dernières années, contre la Monusco présente en RDC depuis 1999

Kinshasa veut un départ de la force de l’ONU et une montée en puissance de son armée, mais en attendant, armées étrangères, miliciens «proxy» et contractants privés prospèrent dans l’est du pays, où des combats viennent de reprendre contre la rébellion du M23. 

Des dizaines de milliers de personnes sont à nouveau contraintes de fuir leurs maisons, rejoignant les plus de six millions de déplacés que compte la République démocratique du Congo.
 

La Monusco vers la sortie  

«Il est temps pour notre pays de prendre pleinement son destin en main et de devenir le principal acteur de sa propre stabilité», déclarait en septembre devant l’Assemblée générale des Nations unies le président congolais Félix Tshisekedi. Il estimait que l’ONU n’avait pas réussi «à faire face aux rébellions et conflits armés qui déchirent» la RDC depuis près de 30 ans ni à «protéger les populations civiles». Ces deux dernières années, les discours hostiles se sont multipliés contre la Monusco, la mission onusienne présente en RDC depuis 1999. Le message est clair, les 14 000 Casques bleus doivent commencer à quitter le pays avant la fin de l’année. Le secrétaire général de l’ONU estime pour sa part que la situation est «en forte détérioration» et que «les tensions régionales se sont encore aggravées».    

Armées régionales  

Fin 2021, l’armée ougandaise, qui a soutenu des rébellions par le passé en RDC, est invitée par Kinshasa à l’aider à lutter contre le groupe armé d’origine ougandaise ADF (Allied Democratic Forces), qui sévit dans l’est et a fait allégeance au groupe Etat islamique. Ce rapprochement avec Kampala marque l’explosion des tensions avec le voisin rwandais et le retour des rebelles du M23 (Mouvement du 23 mars), majoritairement tutsi.

 Ces derniers, soutenus par Kigali, mettent en déroute l’armée congolaise dans le Nord-Kivu et s’emparent de larges pans de territoire. Plus d’un million de personnes fuient les affrontements, la situation humanitaire est catastrophique. La communauté des Etats d’Afrique de l’Est (EAC) décide alors le déploiement d’une force régionale. Fin 2022, début 2023, des contingents du Kenya, de l’Ouganda, du Burundi et du Soudan du Sud débarquent à Goma, la capitale provinciale. Les troupes de l’EAC-RF (East African Community-Regional Force) se déploient au nord de la ville, dans les zones contrôlées par les rebelles. Elles mettent en place une zone tampon, au grand dam de Kinshasa qui souhaite les voir chasser le M23. Début mai, le président Tshisekedi attaque publiquement l’EAC-RF, l’accusant de «cohabitation (...) avec les terroristes du M23».

 Au même moment, il appelle les pays de la SADC (communauté des pays d’Afrique australe) à déployer leurs armées dans l’est avec, entre autres, des contingents sud-africain, zambien et namibien. Pour l’instant, selon des sources diplomatiques, ce déploiement est au point mort. Le mandat de l’EAC-RF est toutefois reconduit en juin, puis en septembre, jusqu’au 8 décembre, date à laquelle le gouvernement congolais veut la voir partir. L’EAC a dénoncé jeudi dernier une «propagande négative» à l’encontre de sa force et démenti toute «collaboration avec des groupes armés».
 

Militaires européens  

Depuis fin 2022, environ un millier d’anciens militaires européens, repartis dans deux sociétés, sont arrivés à Goma. Selon des sources internes, ils sont intégrés dans le dispositif des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) contre le M23. La première société, Agemira, est dirigée par des Français, dont des retraités de l’armée. Ils assurent initialement la maintenance de la Force aérienne congolaise. Ils sont aujourd’hui intégrés au commandement des opérations et ont pris part à des bombardements sur des positions du M23.

 La deuxième société, Congo Protection, est gérée à Goma par un Roumain, ancien de la légion étrangère française. Ses soldats, venus principalement d’Europe de l’est, forment des unités des FARDC, participent à la sécurisation de Goma et, selon les mêmes sources, ont combattu au sol contre les rebelles. Après six mois de calme précaire, les affrontements ont repris début octobre. Les contractants militaires d’Europe de l’est ont été vus mercredi dernier arrivant à bord de véhicules armés dans la zone proche des combats, en soutien aux FARDC.
 

Groupes armés «patriotes»  

L’armée affirme respecter le cessez-le-feu et n’être concernée «ni de près, ni de loin» par la reprise des combats. Mais, sur place, des habitants et des sources sécuritaires indiquent que les FARDC sont à l’offensive, en appui aux groupes armés qui affrontent le M23. L’action de ces miliciens a été saluée par le porte-parole du gouvernement, qui les a qualifiés de «jeunes Congolais braves». 

De nombreux rapports font également état de collaboration, de fourniture d’armes, de munitions et d’uniformes par les FARDC à ces groupes armés, dont certains commandants sont sous sanctions internationales et sous mandat d’arrêt de la justice congolaise. «De nombreux groupes armés impliqués dans les affrontements actuels (...), sous l’étiquette Wazalendo, semblent opérer de plus en plus comme des supplétifs de l’armée congolaise», précisait début octobre un rapport interne de la Monusco.
 

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