Lors d’une exposition à Alger en 1979, le cinéaste Jean Pierre Lledo écrira sur le livre d’or: «Continue à t’exprimer». «Ç’a été un déclic pour un débutant comme moi», reconnaitra Kamel Khalfallah durant la rencontre intime et privée, organisée, mercredi dernier, par l’association «Jijel antique» pour l’honorer à l’occasion de la célébration de la Journée nationale de l’artiste.
C’est en présence des membres de l’association et quelques photographes, que le photographe est revenu sur la genèse de cette éclosion artistique qui le liera d’amitié avec notamment le regretté Nacer Medjkane, Halim Zenati et Amirouche, des acteurs d’une «période pionnière», comme l’écrira Ameziane Ferhani.
Natif de Jijel en septembre 1954, Kamel Khalfallah entame en 1975 des études à l’Institut des arts dramatiques de Bordj El Kiffan dans la spécialité audiovisuel.
Après sa formation, il a préféré prendre un appareil photo, «le seul moyen pour moi de m’exprimer tel que je le voudrais pour en faire un sujet artistique». En 1979, il organise sa première exposition à la salle El Mougar d’Alger sous le titre «Banalités». Une année plus tard, il présente dans la même salle sa série de photographies intitulée «Les ombres du midi» suivie en 1981 par les «Petites photos en prose» exposées à la salle El Mougar et au Centre culturel français d’Alger.
En 1983, il participe au XVIIe Salon international d’art photographique d’auteurs à Reims (France) puis après son retour à Jijel en 1990, il expose en 1992 à la bibliothèque communale Salah Abdelbaki «dans un hall désert» et, en 1993 à la maison de jeunes Rachid Bounab. Il réalisera dans les années 2000 une série de cartes postales, très appréciées «qui avaient bien marché», représentant la Corniche vue de mer, depuis Ziama Mansouria jusqu’aux Falaises, prises depuis une embarcation de 7 mètres. Mais avec l’arrivée du numérique, remarquera-t-il, les gens préfèrent désormais photographier eux-mêmes.
Il reviendra sur les thématiques qu’il aimait figer dans son objectif et, nous parlera des portraits, des scènes de rue prises sur le vif, et surtout de qui a marqué les esprits à Alger, c’était sur «les dormeurs» : qu’est-ce qui se passe, tout le monde dort. Des commentaires du livre d’or, il retiendra particulièrement celui qui a écrit : «Avec tout ce que tu as photographié, tu aurais pu photographier ceux qui dorment dans les bureaux et ceux qui dorment sur des millions.
C’était déjà le début d’une Révolution qui couvait et tout le monde le savait, et là je me suis dit, peut-être que je suis allé trop loin, et on me l’avait fait savoir.» Il ne manquera pas, à l’occasion, de rendre hommage au travail de son ami disparu, Nacer Medjkane «qui est pour moi le Raymond Depardon algérien. Il avait une approche de la photo de façon particulière. Il ne photographiait que les instants privilégiés, il ne prenait la photo qu’au moment approprié.»