Invitation de Benyamin Netanyahu par le congrès américain : 500 universitaires israéliens dénoncent

18/07/2024 mis à jour: 17:15
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Le Premier ministre israélien est contesté autant en Israël qu'aux Etats-Unis - Photo : D. R.

500 universitaires israéliens ont condamné, dans une lettre adressée au président du Congres américain, l’invitation par ce dernier, du  Premier ministre Benyamin Netanyahu, pour un discours devant les membres de la Chambre, prévu le 24 juillet courant. Ils qualifient la décision de «geste politique et diplomatique dangereux qui met en danger non seulement Israël, mais l’ensemble du monde libre» et permettra à Netanyahu de «promouvoir les fantasmes qu’il partage avec ses partenaires messianiques au sein du gouvernement israélien (…) le tout dans un anglais parfaitement courant, dans le but de manipuler les membres du Congrès et le public américain». Une première qui dénote la grave crise interne que vit l’Etat hébreu depuis neuf mois.

A la veille son envol vers Washington, à l’invitation du président républicain du Congrès, Mike Johnson,  pour prononcer un discours devant les membres de la Chambre des représentants,  le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, est violemment pris à partie par non seulement l’opposition, mais aussi ses propres ministres ainsi que par les familles des «otages» israéliens.

Mardi dernier, 500 universitaires ont signé une lettre ouverte adressée au président du Congrès, dans laquelle, ils condamnent la décision des Etats-Unis «d’inviter un Premier ministre sournois qui continue de poursuivre, sous couvert de guerre, un coup d’Etat judiciaire, en espérant que personne ne le regarde, dans le but d’établir une nouvelle dictature sous le couvert de la loi, c’est accélérer cette érosion dans l’ensemble du monde libre».

Dans cette lettre publiée par le journal israélien The Jérusalem Post, les signataires et après avoir qualifié l’invitation de Benyamin Netanyahu, pour le 24 juillet, de «geste politique et diplomatique dangereux qui met en danger non seulement Israël, mais l’ensemble du monde libre»,  ont estimé que celle-ci (invitation), «donne un soutien et une tribune importante à un dirigeant qui a abandonné son peuple et refuse d’assumer la responsabilité du plus grand désastre qui est arrivé au peuple juif depuis l’Holocauste».

Ils accusent le Premier ministre de «provoquer des conflits et de monter les citoyens israéliens les uns contre les autres pour ses propres intérêts politiques et personnels. Son seul intérêt est de préserver son propre pouvoir et de transformer un Israël démocratique en une nouvelle dictature», ajoutant que «Netanyahu a démontré son indifférence à l’égard de l’enfer que vivent les «otages» détenus par le Hamas. Il a provoqué une grave détérioration du conflit israélo-palestinien et a porté préjudice aux intérêts américains au Moyen-Orient, tout en poursuivant le désastre en cours».

Ces violentes critiques rejoignent celles des familles des «otages» qui occupent la rue régulièrement afin d’exiger la conclusion d’un accord avec la résistance, qui permettra la libération des leurs. Ces manifestations deviennent de plus en plus imposantes et se terminent à chaque fois par des heurts violents avec les services d’ordre et des arrestations.

Dans leur lettre, les 500 académiciens déclarent au président du Congrès que  Netanyahu «va promouvoir les fantasmes qu’il partage avec ses partenaires messianiques au sein du gouvernement israélien (qui célèbrent ouvertement les opportunités offertes par la guerre, à Ghaza et en Cisjordanie), le tout dans un anglais parfaitement courant, dans le but de manipuler les membres du Congrès et le public américain», avant de se poser les questions suivantes : «Le Congrès des Etats-Unis souhaite-t-il soutenir un tel modèle de leadership cynique et manipulateur en ces temps-ci ? Ses membres souhaitent-ils entendre le discours acrobatique et trompeur d’un Premier ministre qui ne respecte pas la plupart de ses promesses ou des accords signés ?»

«Nous ne laisserons pas Netanyahu diffuser son faux récit»

Les 500 universitaires rappellent au président du Congrès qu’«une nette majorité de citoyens israéliens, issus d’un large spectre politique, estime qu’Israël doit organiser des élections maintenant.

Le public israélien doit pouvoir décider de son avenir – un choix entre la voie de la guerre et de la destruction de Netanyahu et de ses partenaires messianiques ou un accord régional qui comprend une normalisation avec l’Arabie Saoudite et d’autres Etats arabes et musulmans modérés (…)», puis l’exhortent de «soutenir ce message», en précisant que «tant que le peuple israélien n’aura pas la possibilité de s’exprimer dans le cadre d’un processus électoral démocratique, Netanyahu et son gouvernement doivent parvenir à un accord basé sur le schéma le plus récent proposé – la libération progressive des otages en échange d’un cessez-le-feu» tout en exprimant leur «crainte que l’invitation de Netanyahu puisse mettre en danger l’accord sur la prise d’otages».

Le journal révèle en outre, lors d’une réception annuelle de l’ambassade israélienne à Washington, à l’occasion de la fête du jour de l’Indépendance, le président du Congrès américain, Mick Jonson, a déclaré, à propos de l’invitation de Netanyahu, qu’il s’agirait d’une «démonstration forte de soutien au gouvernement israélien dans cette période de plus grand besoin».

Pour leur part, les familles des otages ont entamé une collecte de fonds pour pouvoir rejoindre les Etats-Unis en même temps que Netanyahu, affirme le journal israélien, en relevant qu’elles partagent les mêmes positions sévèrement critiques, avec les universitaires à l’égard du Premier ministre.

Cité par le même journal, un membre de la famille d’un des otages a déclaré dans une vidéo, que «des représentants du groupe Begin se rendront aux Etats-Unis samedi prochain. Nous ne laisserons pas Netanyahu diffuser son faux récit dans les médias internationaux. Nous devons faire entendre notre voix, lui servir de contre-argument et lui rappeler qu’il est nécessaire de signer un accord, d’arrêter la guerre et de renvoyer les otages chez eux ».

Hier, les familles des otages ont exprimé leur grande colère contre les propos de Netanyahu, selon lesquels «les otages souffrent mais ne meurent pas» et ont exigé «en urgence des explications». «Les déclarations de Netanyahu suscitent notre grande colère. C’est un mensonge qui veut dire, dans la pratique, l’abandon des otages.

Certains ont été tués et nous ne savons pas si d’autres l’ont été. Il faut que Netanyahu et son gouvernement fassent tout ce qui est possible pour conclure un accord dans les plus brefs délais au lieu de mettre les bâtons dans les roues». Pendant toute la semaine écoulée, des échanges acerbes de déclarations entre Netanyahu et son ministre de la Défense Yoav Gallant ont alimenté le contenu des médias locaux.

Selon le journal israélien Yedioth Ahronot, Gallant a accusé hier Netanyahu d’empêcher la conclusion d’un accord avec le Hamas, en déclarant : «Les conditions pour parvenir à un accord avec le Hamas ont mûri, mais Netanyahu durcit ses positions. Il rend difficile l’accord pour ne pas perdre les ministres de sa coalition Ben Gvir et Smotritch.» 
 

 

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