La bureaucratie semble bien enracinée dans les rouages de l’administration à Boumerdès. Ce mal si profond a retardé l’essor de plusieurs secteurs d’activité. A commencer par le tourisme, un secteur pourvoyeur de richesse et d’emplois, qui peine à décoller en dépit des potentialités que recèle la région.
En effet, sur un total de 66 projets touristiques agréés depuis plusieurs années par le ministère de tutelle, seulement 6 ont démarré, 9 sont bloqués tandis que 49 projets n’ont pas encore été lancés, a-t-on appris de source locale.
Ces projets devraient augmenter les capacités d’accueil de la wilaya de 6862 lits et créer 3290 emplois. Mais les entraves bureaucratiques ont tout retardé, décourageant les plus téméraires des investisseurs. Karim Rezik, gérant de Sarl Sapci, est un promoteur qui a fait ses preuves dans l’immobilier et l’investissement agricole.
En 2019, il obtient un terrain de 7000 m2 à Dellys, localité balnéaire par excellence où les structures hôtelières font énormément défaut. M. Rezik ambitionne d’y réaliser une résidence touristique de 48 appartements, avec 2 piscines, 2 salles polyvalentes, un centre spa, une salle des fêtes, un grand restaurant, 2 cafétérias, etc. Le coût de son investissement est estimé à plus de 80 milliards de centimes. «Nous avons engagé un bureau d’études algéro-tunisien. Et il a tout fait dans les délais. N’étaient les blocages de l’administration, notre résidence serait entrée en exploitation début 2022», dira-t-il.
Cet opérateur a obtenu, au même titre que d’autres investisseurs, l’arrêté de concession du terrain en mars 2019. Pour obliger les bénéficiaires à entamer les travaux dans les meilleurs délais, l’ex-wali, Mohamed Salamani, avait limité la durée de validité dudit document à six mois. M. Rezik dépose l’étude et tous les dossiers nécessaires en juin 2019, soit trois mois avant l’expiration du délai.
Malgré cela, il n’a toujours pas obtenu le permis de construire pour pouvoir entamer son projet. «La DUC refuse à ce jour de nous délivrer ce document au motif que nous ne disposons pas de l’acte de concession.
Mon dossier a été examiné puis approuvé récemment à l’issue d’une réunion du conseil de wilaya. La DUC a été instruite pour nous octroyer le permis. Cette dernière n’a alors émis aucune réserve, mais quand je suis allé la voir, on m’a dit qu’elle doit d’abord avoir l’accord de la tutelle», relate M. Rezik avec dépit, ajoutant que son projet devrait créer une centaine d’emplois directs.
Le gérant de la Sarl Sapci n’est pas le seul à subir les aléas d’une administration dont le fonctionnement est aux antipodes des orientations du gouvernement. De nombreux autres promoteurs se plaignent du manque de financement et autres difficultés pour obtenir le permis modificatif ou les documents de conformité de leurs projets.
Les carcasses d’hôtels à l’abandon depuis les années 1990 à cause de divers litiges sont nombreuses aussi bien à Boumerdès et Figuier, qu’à Zemmouri et Dellys. Marmaât Ali a eu l’aval du ministère pour transformer sa grande villa à Figuier en résidence touristique en 2018. «Mon projet est à 85% d’avancement. Il comprend 54 appartements et devra donner un plus au secteur du tourisme dans notre wilaya. Mais la DUC ne m’a pas encore attribué le permis d’investir pour achever les travaux alors que la décision d’exploitation m’a été délivrée en 2021», s’indigne-t-il.
Au front de mer de Boumerdès, cinq projets d’hôtels 5 étoiles peinent à voir le jour. Des hôtels haut standing de plus de 15 étages, qui devaient transformer radicalement la façade maritime de l’ex-Rocher noir. Leur réalisation, hélas, n’est pas pour demain.
Aujourd’hui, la wilaya n’a pas grand-chose à offrir à ses touristes, ses capacités d’accueil ne dépassant pas 7000 lits et la plupart de ses plages étant juste dotées du minimum vital. Les opérateurs, eux, prennent leur mal en patience et espèrent que leurs déboires finiront bientôt avec l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l’investissement.