La junte au pouvoir en Guinée a mis «sous observation» les principaux partis déjà grandement réduits à l’impuissance, et en a dissous 53 autres dans une grande entreprise de nettoyage politique, a rapporté hier l’AFP citant un rapport officiel.
Les résultats de cette «évaluation» sont publiés dans un contexte de répression continue exercée par la junte, et deux mois avant le terme de fin 2024 qu’elle a initialement accepté sous la pression internationale pour rendre le pouvoir à des civils élus.
Le régime en place depuis le putsch de 2021 a depuis lors fait savoir qu’il ne respecterait pas cet engagement. Le ministère de l’Administration du territoire, auteur du rapport, justifie les mesures prises par une série de manquements à la législation sur les partis, par exemple sur l’existence d’un bureau en Guinée, la validité de l’agrément ou la transparence de la comptabilité. Il parle de la nécessité d’«assainir l’échiquier politique».
Mais il écrit aussi dans le rapport que les défauts de régulation ont eu «pour conséquences de nombreux dérapages constatés dans l’exercice des libertés publiques par les responsables et militants, et des risques pour l’équilibre social de la Guinée». Le ministère a dénombré 211 partis. Cinquante-trois sont dissous, 54 suspendus pendant trois mois, 67 mis «sous observation» pour trois mois pendant lesquels ils devront se mettre en conformité, faute de quoi ils seront suspendus. Trente-sept ne sont pas évalués.
Parmi les partis placés «sous observation» figurent les principaux partis, dans l’opposition à la junte: le Rassemblement du peuple de Guinée d’Alpha Condé, président civil renversé par les militaires, l’Union des forces démocratiques de Guinée et l’Union des forces républicaines. Les dirigeants de ces partis sont en exil.
Le rapport ne dit rien sur un retour des civils à la tête de ce pays pauvre malgré des ressources naturelles considérables, dirigé pendant des décennies par des régimes autoritaires.
Des personnalités du pouvoir ont ouvert la voie à une candidature du général Mamadi Doumbouya, à la tête du pays depuis son putsch de 2021, malgré sa promesse initiale de ne pas se présenter à une future présidentielle.
La junte a fait arrêter, mis en cause ou contraint à l’exil de nombreux opposants. Elle a interdit les manifestations, dissous un collectif qui réclame le retour des civils au pouvoir, et retiré leur agrément à certains des principaux médias privés.
La répression de manifestations non autorisées a causé la mort de dizaines de personnes, selon les défenseurs des droits et la société civile.