En tournée au Moyen-Orient, la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a une nouvelle fois appelé à un cessez-le-feu à Ghaza. «Le week-end dernier a montré de façon dramatique que l’approche militaire pure n’était pas une solution pour la situation à Ghaza», a estimé Mme Baerbock. Elle faisait allusion aux six otages israéliens retrouvés morts il y a une semaine à Rafah.
Alors que la guerre contre Ghaza est sur le point de boucler son 11e mois d’atrocités, la communauté internationale ne sait toujours pas comment obliger Israël à mettre un terme à sa campagne dévastatrice en Palestine occupée.
Jeudi, les Etats-Unis, pays médiateur dans les négociations entre le Hamas et Israël, négociations qui sont, faut-il le souligner, au point mort depuis les derniers rounds de Doha et du Caire, ont appelé une nouvelle fois les deux parties à accepter le projet d’accord dit de «compromis» proposé par les Américains.
Un deal que l’administration Biden présente comme celui de la dernière chance, avec la mention «take it or leave it» (à prendre ou à laisser). «Il incombe vraiment aux deux parties de parvenir à un accord sur les questions restantes», a insisté le secrétaire d’Etat, Antony Blinken, jeudi, en conférence de presse à Haïti où il était en déplacement.
Blinken maintient que des progrès ont été réalisés dans le sens d’un rapprochement des positions palestinienne et israélienne et a même «confirmé les évaluations américaines selon lesquelles 90% de l’accord était prêt», affirme l’AFP.
«Même si je pense que nous sommes près d’obtenir un accord de cessez-le-feu, chaque jour qui passe sans qu’il ne soit finalisé ni que les parties ne disent ‘oui, point final’ est un jour lors duquel quelque chose d’autre se produit (...) qui repousse simplement les choses et risque de faire dérailler une bien fragile affaire», a prévenu le chef de la diplomatie américaine, rapporte l’AFP.
53% des Israéliens favorables au retrait du couloir de Philadelphie
Il faut dire que le drame des six otages retrouvés morts dans un tunnel à Rafah samedi dernier a fait prendre conscience aux Israéliens qu’ils avaient tout intérêt à faire un effort dans le sens d’un retour à la paix à Ghaza. Jusqu’à présent, Netanyahu est resté intransigeant sur l’avenir de l’enclave.
Pour lui, il ne saurait y avoir d’accord sans le maintien des forces sionistes dans le couloir de Philadelphie et l’axe Netzarim, ainsi que le contrôle du point de passage de Rafah. Une exigence que le Hamas rejette catégoriquement et même l’Egypte qui, à juste titre, considère que cela constitue une atteinte à sa souveraineté, sachant que ces zones ont toujours été sous son autorité.
La mort des six otages souligne donc pour beaucoup d’Israéliens l’urgence de sceller un accord, sans quoi, d’autres otages risquent de connaître le même sort, soit du fait des bombardements israéliens aveugles, comme cela s’est produit plusieurs fois, soit du fait d’une exécution en cas d’opération militaire pour essayer de les libérer, comme l’a laissé entendre Abou Obeida, le porte-parole des brigades Azzeddine Al Qassam dans son dernier message.
Cette nouvelle donne explique le fait que la pression soit montée d’un cran sur le gouvernement d’extrême droite israélien, que ce soit de la part des familles des otages et de la société civile israélienne, d’un côté, ou bien de la part de leur allié américain. Un récent sondage révèle que 53% des Israéliens sont favorables au retrait du couloir de Philadelphie «si cela signifiait parvenir à un accord avec le Hamas pour libérer les otages israéliens restants, détenus à Ghaza», rapporte Middle East Eye.
Khalil El Hayya, le chef des négociateurs côté palestinien, a appelé les Etats-Unis à faire davantage pression sur Israël. «Si l’administration américaine et son président, M. Biden veulent vraiment parvenir à un cessez-le-feu et conclure un accord d’échange de prisonniers, ils doivent abandonner leur parti pris aveugle pour l’occupation sioniste et exercer une véritable pression sur Netanyahu et son gouvernement», a-t-il déclaré dans un communiqué du Hamas, jeudi.
Khalil El Hayya a précisé une fois de plus que le seul accord sur lequel le Hamas est prêt à négocier est celui de mai dernier, dit «plan Biden», qui a été soumis aux deux parties le 31 mai et a été approuvé par le Conseil de sécurité le 10 juin.
Ce projet prévoit un plan en trois phases, de six semaines chacune, et qui doit conduire dans sa phase finale à un arrêt total des combats, une libération de tous les otages en échange d’un grand nombre de prisonniers palestiniens et un retrait complet de l’armée israélienne de Ghaza. «Nous n’avons pas besoin de nouvelles propositions», a encore précisé le haut cadre du bureau politique du Hamas.
«La pression militaire met en danger la vie des otages»
Mais Netanyahu reste inflexible comme il l’a rappelé à maintes reprises. «Aucun accord n’est en cours de négociation», a-t-il tranché jeudi dans un entretien à Fox News. «Ce que nous devons faire : premièrement, faire sortir les otages (...)
Deuxièmement, maintenir les lignes rouges qui sont nécessaires à la sécurité et à la survie d’Israël, et les deux passent par le maintien (sous contrôle israélien) du couloir de Philadelphie, car cela met le Hamas sous pression, l’empêche de se réarmer et empêche Ghaza de redevenir une enclave terroriste iranienne», a-t-il expliqué, d’après l’AFP.
Devant cet entêtement mortifère, l’Allemagne a appelé l’entité sioniste à renoncer à «l’approche militaire pure». La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, en visite en Israël, a plaidé hier depuis Tel-Aviv pour un cessez-le-feu durable à Ghaza.
«Le week-end dernier a montré de façon dramatique que l’approche militaire pure n’était pas une solution pour la situation à Ghaza», a-t-elle essayé de raisonner le gouvernement Netanyahu devant la presse. Allusion aux six otages israéliens tués à Ghaza. «La pression militaire (...) met en danger la vie des otages, alors que rien n’est aussi urgent que le sort des otages restants », a-t-elle souligné selon des propos cités par l’AFP. «Il est clair qu’il faut (...) un cessez-le-feu, maintenant», a insisté la cheffe de la diplomatie allemande.
Réagissant à la vaste opération militaire lancée par l’armée israélienne le 28 août en Cisjordanie, et qui a fait 36 morts, Mme Baerbock estime que ce type d’intervention «ne doit pas entraîner une insécurité et des violences nouvelles».
Annalena Baerbock a envoyé dans la foulée une pique aux ministres israéliens d’extrême droite, dont le très belliqueux Itamar Ben-Gvir, ministre de la Sécurité nationale.
«Des membres du gouvernement israélien eux-mêmes exigent que soit utilisée en Cisjordanie la même approche qu’à Ghaza», a-t-elle déploré. Mercredi, le gouvernement allemand a exhorté les deux parties à se montrer «extrêmement flexibles et disposées à faire des compromis».