Alors que l’Algérie a réalisé des progrès, où de nombreuses pathologies ont été diagnostiquées grâce à des techniques innovantes, des obstacles persistent et entravent le déroulement de la recherche.
L’Algérie a récemment connu des progrès remarquables dans le domaine de la génétique moléculaire, une discipline biologique qui explore la structure et la fonction de l’ADN et de l’ARN au niveau moléculaire, avec des applications considérables dans le domaine de la santé. Ce domaine constitue une priorité majeure pour l’État algérien, en particulier dans le contexte de la santé publique.
Afin d’évaluer les avancées et les défis rencontrés dans ce domaine crucial, la faculté des sciences de la nature et de la vie de l’université Frères Mentouri - Constantine 1 a organisé le premier séminaire national intitulé «Génétique moléculaire et santé : où en est l’Algérie ?». Cette rencontre d’envergure, étalée sur deux jours, a réuni 160 participants, 13 institutions et 84 communications, dont 22 présentations orales.
«La question de - Où en est l’Algérie ?- est posée pour faire l’état des lieux de la recherche menée dans les laboratoires de recherche publics et privés», a déclaré à El Watan, Djalila Chellat, professeure à la faculté des sciences de la nature et de la vie de l’université Frères Mentouri. Elle a exprimé sa surprise face aux progrès réalisés en Algérie, où de nombreuses pathologies ont été diagnostiquées grâce à des techniques innovantes telles que le séquençage de nouvelle génération (NGS) et d’autres.
Cependant, des obstacles persistent et entravent le déroulement optimal de la recherche. Ces contraintes sont d’ordre financier et procédural, selon de nombreux participants. Les laboratoires de recherche sont souvent contraints de mener des formations doctorales corrélées à des projets de recherche dotés d'un financement insuffisant, ne permettant même pas l'achat de consommables et de réactifs essentiels.
Un autre intervenant lors du débat a évoqué la lenteur de l’approvisionnement en réactifs, qui peut prendre jusqu’à six mois ou plus après la demande. «Certains fournisseurs ne respectent pas les conditions de transport, ce qui peut altérer les réactifs, faute de conditions de conservation adéquates», a souligné Mme Chellat.
D’innombrables applications
Pour sa part, le Pr Idir Bitam, spécialiste en maladies transmissibles et pathologies tropicales émergentes et responsable au centre de recherche en agropastoralisme à Djelfa, a plaidé pour l’exploitation des avancées technologiques dans le domaine du diagnostic et de la biodiversité. Son intervention a mis en lumière quatre axes majeurs de l’application de la génétique en santé, notamment le diagnostic des maladies génétiques, le développement de nouveaux traitements et la prédiction des risques de maladies.
Il a notamment évoqué le virus de la Covid-19, qui a connu 7600 mutations depuis décembre 2019. Heureusement, ces mutations ne sont pas toutes dangereuses, d’autant plus que l’Algérie a déjà traversé cinq vagues de la pandémie. Il a également souligné la diversité virale, en particulier des virus aériens hautement mutables, capables de s’adapter à l’environnement.
«C’est là qu’interviennent les technologies émergentes telles que la PCR, le séquençage et le NGS, qui permettent de confirmer l’existence de nouveaux variants», a-t-il précisé à El Watan en marge de la rencontre. En matière de prévention, il a souligné la prévalence des maladies à transmission hydrique en Algérie.
La biogenèse moléculaire, notamment le NGS, peut être utilisée pour identifier le sérotype d’un virus afin de purifier l’eau. Il a également mentionné les virus transmis par les moustiques et la médecine spécialisée permettant de prédire le risque de cancer chez un individu. Son intervention s’est conclue par l’accent mis sur l’importance des technologies de pointe miniaturisées.
En Algérie, cette nouvelle technologie «est mal commandée». Bien que cinq appareils NGS soient disponibles à l’échelle nationale, ils ne répondent pas à la demande actuelle. Le Pr Bitam a appelé à la création de plateformes technologiques régionales.
Chaque région devrait disposer d’un système ouvert de spectrométrie de masse Maldi-Tof, permettant de créer des bases de données, ainsi que de séquenceurs, de PCR et de NGS. Notre interlocuteur a souligné l’importance de restaurer la visibilité scientifique de l’Algérie dans les publications internationales, les conférences et les brevets.
L’un des obstacles majeurs à cet objectif est le manque de laboratoires adéquats pour l’isolement des pathogènes hautement sécurisés. L’Institut Pasteur, bien qu’estimable, ne suffit pas. «L’Algérie manque d’un centre de recherche capable d’isoler des échantillons présentant un risque sanitaire élevé.
Lors de l’épidémie de Covid-19 en 2024, nous n’avons pas pu isoler le virus. Nous avons réussi à le séquencer et à le détecter, mais pas à obtenir la souche», a-t-il révélé. Et de plaider pour une formation accrue en biosécurité, soulignant la menace toujours présente des pathogènes hautement sécurisés, tels que le virus Ebola qui peut toucher des ressortissants de certains pays africains.