Les concepteurs de voitures sportives ont un problème : si certains se mettent à l’électrification de leurs impétueux bolides, ceux-ci perdent au passage un élément cher aux oreilles des aficionados et aficionadas comme aux ORL chargés de réparer les dégâts de ces infernales pétarades : le bruit.
Ce fut d’ailleurs l’une des polémiques les plus fortes des dernières années en Formule 1. Avec l’arrivée de leurs moteurs hybrides en 2014, le son dantesque qu’elles produisaient à l’ère des V10 ou des V12 était mis sous étouffoir, une sourdine qui a déplu à un grand nombre de fans, déçus que la discipline abandonne l’une de ses caractéristiques les plus folles et les plus brutales.
La question du bruit des autos électriques et du plaisir – ou sentiment de fougue et de puissance – qu’il est supposé offrir à la personne derrière le volant est si sérieuse que les constructeurs cherchent et trouvent des solutions quelque peu exotiques.
C’est par exemple le cas de Huyndai, dont les prochaines sportives électriques seront dotées d’un système reproduisant des bruits d’échappement ou de changement de vitesses, et de Dodge, qui a ajouté un bon vieux «vroom!» à ses voitures à batteries.
Des entreprises se sont même spécialisées dans le tuning sonore de voitures à la base plutôt silencieuses: quand on paie cher, c’est apparemment par la nuisance sonore qu’on souhaite le faire savoir.
Ferrari prend également la question très au sérieux. Il y a quelques semaines, la presse italienne, reprise par Bloomberg notamment, rapportait que la marque au cheval cabré cherchait à inventer un système offrant à ses prochains bolides 100% électriques, dont la construction devrait commencer en 2025, un son à la hauteur de leurs performances, de leurs prix et de la nostalgie des grosses cylindrées pétaradantes qu’évoquent leurs lignes.
Fusées à roues
Il n’est pas impossible qu’elle ait une solution plus radicale encore sous le coude. Comme l’a rapporté The Drive, la firme de Maranello a récemment rendu public un brevet, initialement déposé en 2019, imaginant une solution très étonnante – mais pas complètement loufoque – pour des bolides du futur. Ferrari songe ainsi à croiser l’automobile et l’aviation de chasse, ou la technologie des fusées de SpaceX comme l’avait autrefois proposé Elon Musk pour Tesla, en ajoutant à ses autos des réacteurs. Tout simplement.
Situés à l’avant, à l’arrière, sur les côtés voire sur le-dessus de l’engin, ces véritables petits jets permettraient à une voiture d’amplifier la propulsion mécanique fournie par son moteur, de lui offrir un plus grand appui aérodynamique en amplifiant l’effet venturi, de corriger sa trajectoire ou d’augmenter sa tenue de route en virage, ou de ralentir et freiner plus efficacement.
L’inventeur du système présenté par Ferrari se nomme Fabrizio Favaretto. Comme l’explique The Drive, il est question de jets –plus précisément des pulsoréacteurs– propulsant un gaz maintenu à très haute pression, entre 700 et 900 bars (10 000 et 13 000 PSI). C’est colossal mais pas inimaginable. C’est ce que réussissent déjà les cellules de stockage d’hydrogène, par exemple mais, surtout, le même Favaretto est l’auteur d’un autre brevet pour Ferrari concernant, comme les choses sont bien faites, un véhicule doté d’un réservoir de gaz maintenu sous haute pression.
Comme le détaille le brevet, les jets dont serait doté le véhicule-fusée de Ferrari disposeraient chacun de cinq tailles différentes d’éjection, qui pourraient adapter la poussée (il est question de 5000 newtons) à la pression encore disponible dans le réservoir de gaz. Et c’est ici que nous revenons à la question initiale du bruit: vu la pression et la puissance nécessaires pour atteindre les effets recherchés, le brevet annonce des flux supersoniques, donc extrêmement bruyants. De quoi inventer un nouveau son de fusées des routes pour ces supercars électriques ou hybrides, le brevet précisant que ces réacteurs et gaz sous pression seraient alimentés par un carburant classique.