Farid Taleb. Luthier : La passion chevillée à l’âme

25/05/2022 mis à jour: 03:07
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Photo : D. R.

Le luthier algérien Farid Taleb a représenté, dernièrement, l’Algérie au 1er Festival international de la guitare Show à Montreux en Suisse.

En effet, du 29 avril au 1er mai, s’est tenu le 1er Festival de la guitare show à Montreux en Suisse. 80 exposants, dont l’Algérie, ont participé à ce rendez-vous, dédié à la guitare.

Pour les organisateurs, le but de ce rendez-vous est de «mettre en relation des guitaristes professionnels, amateurs ou des gens simplement intéressés par l’instrument avec des artisans, avec des gens qui travaillent les instruments à la main». En effet, des luthiers, venus du monde entier, ont présenté leurs instruments musicaux et les ont fait testés aux nombreux visiteurs.

Parmi les guitares exposées, figuraient les mandoles, les mandolines, les guitares folk, électrique ou encore à résonateur. Une manière singulière de représenter tous les styles musicaux. De même que des masterclass ont été organisées au grand bonheur des intéressés.

Seul africain à participer au festival

Farid Taleb est un jeune luthier algérien trentenaire qui détient un atelier réputé à Bab Hassen, à Alger. Ce passionné de guitare a décidé de participer à ses propres frais au 1er Festival international de la guitare en Suisse. Il a postulé dans un premier temps pour être retenu par la suite.

Bien décidé à promouvoir certains instruments traditionnels typiquement algériens, Farid Taleb a emporté dans ses bagages deux mandoles, un banjo et une guitare. Notre interlocuteur nous confie que sa participation au Festival international de la guitare lui a offert des opportunités intéressantes et l’a fait connaître à l’échelle internationale. «Il était curieux de découvrir que j’étais le seul africain participant avec mes instruments traditionnels.

Le public fut émerveillé par le son de mes instruments à chaque fois que je faisais des démonstrations. Certains visiteurs ont même essayé certains d’entre eux. J’ai constaté qu’il y avait une véritable industrie des cordes et du bois. Une marque canadienne connue m’a contacté pour une commande de mandole. J’ai été aussi sollicité pour d’autres commandes».

Mais comment ce jeune ingénieur en système industriel a pu s’intéresser à la lutherie ? Sur un ton très passionné, il confesse qu’il s’est intéressé depuis son jeune âge au bois. A l’âge de 13 ans alors qu’il est au collège, il fabrique une guitare.

A 18 ans, il confectionne un mandole qu’il écoulera facilement. Par la suite, pour s’initier et se perfectionner à la théorie et à la pratique musicale, il opte pour les différents navigateurs internet. Aujourd’hui, cet autodidacte joue à presque tous les instruments musicaux avec une facilité déconcertante.

L’âme d’un perfectionniste

Farid Taleb a l’âme d’un perfectionniste. Il se plaît avec une détermination inouïe à trouver l’équilibre et la richesse du son, pour ensuite laisser place à l’esthétique de l’instrument. Il faut dire que cet amour pour ce métier est la résultante de sa passion du bois et de la musique.

Depuis 2012, il s’est spécialisé dans le mandole, le banjo, la mandoline, la guitare basse et la guitare électrique, modulables à l’infini. Pour lui le mandole incarne l’Algérie, la nostalgie et les chouyoukh d’antan. Comme il le dit si bien, à travers les différents instruments musicaux que je réalise. «J’assure à mes clients la noblesse du bois et la garantie de l’instrument.»

A la question de savoir si le marché de la lutherie existe en Algérie, Farid Taleb estime que l’on peut vivre de ce métier de luthier mais qu’hélas la matière première de bonne qualité fait souvent défaut sur le marché national. «A titre d’exemple, on trouve des cordes sur la marché mais après pour le choix, c’est un autre débat», note-t-il. Notre interlocuteur reconnaît qu’il fait face à beaucoup de contraintes.

Il avoue que si la main-d’œuvre est algérienne, il est obligé d’acheter des devises sur le marché parallèle pour pouvoir s’approvisionner à l’étranger en bois, en colle et en accessoires «C’est un peu compliqué. Il n’y a pas non plus d’outillage. J’ai été obligé d’importer une machine de l’étranger. Cette dernière demande, également, de l’entretien».

De ce fait, il préconise l’installation de tout un écosystème pour que le luthier puisse travailler. «D’abord il faut une production et une industrie musicale. Forcément, l’artiste travaillera en investissant son argent sur les meilleurs instruments. Je pense qu’il faut instaurer une véritable politique de la lutherie en Algérie», recommande-t-il.

Concernant le temps de création et de fabrication d’un instrument donné- sachant qu’il est difficilement quantifiable tant les exigences varient- il souligne que généralement, il met trois mois pour fabriquer un mandole, mais il fait dans la série. Ainsi, à plein temps, il peut élaborer entre 18 à 20 mandoles avec des heures à créer.

Reconnu dans le milieu

Si le métier de luthier demande dextérité manuelle et aptitude, il reste difficile à exercer. Farid Taleb a compris qu’au fil du temps, expérience aidant, les instruments créés ont pu acquérir une renommée, donnant la possibilité de les vendre à des musiciens professionnels.

On l’aura compris, Farid Taleb a toujours mis son savoir-faire à la disposition des musiciennes et des musiciens de tous horizons. Parmi ces derniers, citons entre autres Petit Moh, Meriem Beldi, Nazim Kri, Athmane Bendaoud, Nazim Bakour, Nazim Mohammedi, Nadjib Gamoura ou encore Redo alias Redouane Nahar.

Ce métier lui a permis également de rencontrer d’autres luthiers connus sur la place d’Alger, à l’image de Mouloud Chabane, Chafa Khaled et Mustapha Mouhoub.

Ce professionnel voit dans la lutherie un travail complet et épanouissant, à la fois, auréolée par une relation humaine face au potentiel client. Les instruments prennent vie sous les mains expertes de ce luthier algérois.

Un métier d’art traditionnel, oserons-nous dire, à la limite de l’orfèvrerie. Farid Taleb s’impose déjà comme un des luthiers les plus recherchés de l’Algérie. Il entend bien percer dans ce métier si passionnant mais exigeant beaucoup de patience. Il compte participer, prochainement, à d’autres manifestations similaires au Festival international de la guitare de Suisse, notamment en France et en Italie.

 

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