Dans ses notes mensuelles sur l’évolution de l’indice des prix à la consommation, l’Office national des statistiques (ONS) relève à chaque fois que la hausse des taux est principalement tirée par l’augmentation des prix des produits agricoles frais. C’est en effet cette catégorie de biens alimentaires qui porte l’inflation vers le haut, même si des tendances à la baisse sont enregistrées parfois.
En juillet dernier par exemple (la note du mois d’août n’étant pas encore rendue publique), les prix des produits agricoles frais ont connu par rapport au mois précédent une hausse de 0,3% jugée «modérée». Comparativement à juillet 2023, l’évolution des prix des biens alimentaires, de cette catégorie de produit, ont connu une hausse de 10,9%, avec essentiellement +15,9% pour la viande et les abats de mouton.
Il y a eu certes, au cours de ce mois, une baisse des 9,2% des prix des légumes, mais parallèlement les augmentations étaient au rendez-vous pour le reste des produits relevant de ce chapitre. L’accroissement le plus important a touché la viande de poulet (+9,7%) et avec des degrés moindres la viande rouge (+1,7%) et les fruits (+1,9%). Cela pour dire que c’est le couffin des ménages (par rapport aux autres catégories de produits) qui subit le plus les hausses des prix. Ce qui se répercute lourdement sur le pouvoir d’achat des consommateurs en dépit des mesures prises pour réguler le marché. Cette tendance étai également perceptible en 2023. Au cours de cette période, les prix des biens alimentaires inscrivent une hausse de 13,3% en 2023, due essentiellement à l’accélération du rythme de hausse des prix des produits agricoles frais qui sont passés de 12,9% en 2022 à 22,1%.
Ce que l’ONS explique par la hausse sensible des viandes et abats de mouton qui à travers une variation de +34,9%. Aussi, après une baisse de 3,5% en 2022, la viande de poulet a marqué un croissement important de 26,0% en 2023. Actuellement, le poulet est cédé à plus de 480 DA le kilogramme sur le marché. L’importation du poulet brésilien n’a pas contribué à faire baisser les prix. La pomme de terre, fortement consommée par les ménages, connaît par ailleurs en cette rentrée sociale une hausse dépassant les 130 DA/kg. Idem pour les fruits qui sont en majorité loin d’être à la portée des consommateurs.
Ce sont autant d’indicateurs qui illustrent l’ampleur du travail à faire pour assurer un certain équilibre des prix sur un marché assujetti à des crises cycliques dans plusieurs filières : des légumes, aux fruits en passant par les viandes et les poissons. Certes, les produits frais dépendent directement de leur caractère saisonnier, de leur disponibilité et des conditions de leur commercialisation, mais leur poids pèse de plus en plus lourd dans les dépenses des ménages. D’où l’urgence de solutions adéquates pour améliorer les rendements et réguler le marché. Comment ?
«Protéger le revenu des agriculteurs et préserver le pouvoir d'achat»
En réponse à cette question, l’expert agricole Aissa Manseur nous dit : «La hausse de la production agricole est tout à fait envisageable et peut être le résultat de notre engagement et de notre volonté à déployer les efforts nécessaires pour y parvenir.» A très court terme, il s’agit pour notre spécialiste de respecter les conditions de production.
C’est-à-dire suivre l’itinéraire technique de chaque culture. «Cela concerne essentiellement la fertilisation, la protection phytosanitaire et l’irrigation. Ce qui conduira inéluctablement à améliorer les rendements, donc la production», nous explique encore Aissa Manseur. Pour ce dernier, cela peut induire probablement des frais supplémentaires pour les agriculteurs. Mais, suggère-t-il, «l’Etat peut intervenir en instaurant un soutien ciblé, direct ou indirect».
A moyen terme, la hausse de la production peut être réalisée par l’extension des surfaces cultivables. «Il y a une grande volonté chez beaucoup d’opérateurs pour investir dans diverses filières agricoles, mais il faut reconnaître qu’il existe toujours des entraves bureaucratiques qui retardent ou empêchent carrément d’atteindre cet objectif», regrette M. Manseur. Et de préciser qu’en terme de production maraîchère, le problème ne se pose pas à l’exception de deux ou trois qui subissent des perturbations durant des périodes bien précises. «Pour les produits arboricoles, on constate qu’il n’y a pas suffisamment de production.
Ce qui se répercute sur les prix qui connaissent des flambées, pour certains produits durant toute l’année !» poursuit M. Manseur. Et de conclure : «Il ne suffit pas de penser uniquement à la hausse de la production, mais également au système de régulation : un système de régulation performant qui protège le revenu des agriculteurs et préserve le pouvoir d’achat des consommateurs.» Pour cela, faudrait-il avoir des données fiables en identifiant les producteurs et en planifiant les besoins. «Ce qui permettra de maîtriser tout le circuit de production et de commercialisation.»
Sur ce dossier, les résultats du troisième recensement général de l’agriculture seraient d’un grand apport.