Le bilan effarant des accidents de la circulation, survenus durant l’été 2022, est venu rappeler les limites de la stratégie de la sécurité routière jusqu’alors de mise. L’arithmétique macabre, comme à chaque fois, interpelle les pouvoirs publics afin d’agir efficacement contre ce fléau.
On ne gère pas les situations critiques par l’émotion ou les professions de foi. Les statistiques de la Gendarmerie nationale font état, pour les mois de juillet et août, de respectivement 301 et 350 morts. Face à pareille hécatombe, le discours circonstanciel, et surtout anachronique, doit céder le terrain à une vision pragmatique. Pour mieux sévir, le ministère de la Justice a annoncé récemment l’entrée en vigueur prochainement de nouvelles mesures coercitives. Les partenaires impliqués dans la sécurité routière dressent des listes de propositions. Celles dont il est fait écho n’ont rien d’inédit. Elles ont été soumises aux décideurs il y a plusieurs années déjà.
A l’exemple de l’installation du chronotachygraphe «mouchard» sur les véhicules «poids lourds» ou de transport en commun. Cet appareil électronique enregistre avec exactitude la durée de service assuré par le conducteur, soit la vitesse, les temps de conduite et d’arrêt. Une mine d’informations pour déterminer les responsabilités, sans autre garantie sur le fléchissement de la courbe des accidents. Idem pour le permis à points, attendu depuis la mise en service du permis biométrique, quatre ans auparavant.
En février dernier, le nouveau code de la route a acté l’annulation des procédures de suspension et de retrait de permis, ainsi que l’application d’amende forfaitaire avec présentation du conducteur devant la justice en cas de délit. Sept mois plus tard, le bilan de cette période est effarant : 1552 personnes ont perdu la vie dans des acidents.
Dès lors, il devient légitime de s’interroger sur la portée de l’action anti-délinquance routière en matière de prévention et répression ! L’approche du phénomène doit être impérativement systémique, puisque l’accident est un fait multifactoriel qui nécessite la recherche des causes et non de coupable, soutiennent les experts. Leur voix est restée inaudible en dépit des résultats probants de leurs recherches. Ils préconisent de repenser la stratégie de la sécurité routière, rendre les campagnes de prévention visibles, et agir sur les interactions des variables – usager, véhicule, infrastructure – pour anticiper les accidents. Les dispositions obsolètes sans incidence majeure sur les données de l’accidentologie sont vouées à s’effacer devant d’autres, plus percutantes.
L’heure est au recours à l’intelligence artificielle. Via des radars fixes sophistiqués, cette dernière traque les attitudes à risque, tel l’usage du téléphone. Car l’objectif premier de la sécurité routière réside dans la préservation de la vie humaine. Partant du constat que la responsabilité dans 97% des accidents incombe à l’humain, misons alors tout sur cet élément.
A commencer par une réforme des auto-écoles. Conduire n’est pas seulement une maîtrise du volant ou une parfaite connaissance des panneaux signalétiques. C’est avant tout un comportement, une tenue de route.