Espace : L’imagerie médicale aussi se prépare pour la Lune et pour Mars

08/01/2024 mis à jour: 01:59
AFP
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Depuis 2020 la Société Française de Radiologie développe avec le CNES et le MEDES des solutions d’imagerie médicale adaptées aux vols dans l’espace

Les voyages prévus sur la Lune et un jour peut-être sur Mars sont bien trop lointains pour que les astronautes puissent être rapatriés sur Terre en cas de souci de santé. A défaut de chirurgie, impossible dans l’espace, la radiologie adapte ses outils pour intervenir en microgravité. 

«La chirurgie dans l’espace n’est pas possible, alors la seule technique qu’on a pour traiter des patients, c’est la radiologie interventionnelle», avec des techniques mini-invasives et peu encombrantes, explique le Pr Vincent Vidal qui a développé une «boîte à outils» d’imagerie médicale, la «Mars IR Tool Box» (Mitbo).  Seule technique d’imagerie dans l’espace, les échographes sont utilisés dans la Station spatiale internationale (ISS) à des fins de diagnostics. Mais pour les missions astrales lointaines, l’enjeu est de s’en servir pour traiter la rétention d’urine, évacuer un calcul biliaire ou le pus d’un abcès autour d’une appendicite. 

Avec les industriels, «on met au point des dispositifs qui nous permettent, sous guidage échographique, de rentrer dans le corps pour aller drainer», à l’aide de sondes, de drains, de cathéters, détaille le Pr Vidal. «Il faut autonomiser les astronautes dans la gestion de complications éventuelles», sachant que le délai de communication entre Mars et la Terre peut prendre jusqu’à 45 minutes, résume Alain Luciani, secrétaire général de la Société française de radiologie.
 

Dans un bunker

Cet été, une expérimentation scientifique s’est déroulée pendant deux semaines en conditions extrêmes dans les Alpes suisses, avec le projet Asclépios III, «dans un bunker pour simuler une mission sur la Lune et développer la médecine spatiale», décrit l’un des jeunes astronautes sélectionnés, Baptiste Rubino Moyner, 25 ans. Après s’être entraîné à faire des drainages guidés par échographie sur un abdomen en plastique, il a montré sa dextérité lors des Journées francophones de radiologie cette semaine à Paris : à l’aide d’une tablette tactile et d’un échographe portable muni d’un système de guidage conçu par Canon, il a réalisé une ponction dans la vésicule biliaire. Sans perforer d’organes au passage. 

«Ces gestes-là n’ont jamais été faits dans l’espace», souligne Vincent Vidal, alors «si jamais on participe au vol parabolique l’année prochaine, ce sera la première fois que ce geste sera réalisé en microgravité». Ce sera donc la prochaine étape pour tester la faisabilité de cette pratique: être retenus en 2024 pour la campagne de vol d’automne en zéro-G, un vol qui reproduit l’effet de la microgravité pendant 22 secondes en décrivant une parabole trente-deux fois. Ce qui nécessitera de diviser la manipulation en tranches de 22 secondes, un défi de rapidité et de précision.
 

«Repenser le matériel»

«Pendant la microgravité, le corps perd ses repères et la précision des gestes est affecté», souligne Laurence Boyer, responsable de la santé sur la Lune, à l’Institut de médecine et physiologie spatiale, filiale santé du CNES, l’agence spatiale française. Depuis 2020, la société française de radiologie (SFR) est engagée avec le CNES pour adapter des solutions d’imagerie aux contraintes extra-orbitales aux côtés des industriels. «Ce ne sont pas forcément des innovatons technologiques hallucinantes mais il faut repenser le matériel», résume le Pr Vidal, du CHU La Timone à Marseille. «En microgravité, quand on met une aiguille dans un abcès, le liquide va se répandre partout dans la capsule. 

On a donc besoin d’une valve sur le drain.» Le conditionnement doit aussi être adapté. Tous les outils doivent avoir un moyen d’attache ainsi qu’une source d’alimentation en énergie autonome, énumèrent les experts qui visent un compromis sur la taille, le poids et la puissance électrique. L’objectif est d’être «capable de miniaturiser les dispositifs, automatiser les systèmes de guidage, les rendre plus légers et plus simples d’utilisation», ajoute M. Luciani, convaincu qu’il «y aura un bénéfice direct pour nos patients sur Terre», que ce soit dans des conditions de soins difficiles ou lors de missions humanitaires, par exemple sur des zones d’opération militaire. 
 

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