La Cisjordanie, longtemps contrôlée par l’Autorité palestinienne dirigée par le Fatah, finira-t-elle par basculer et à rallier les combattants du Hamas ? Car les crimes horribles que continue de commettre l’occupant israélien à Ghaza, additionnés à la «libération» de la violence des colons depuis octobre dernier, massivement et lourdement armés par le Cabinet de guerre conduit par Netanyahu, pousse inexorablement cette partie des Territoires occupés à l’affrontement armée.
Au cours des quarante derniers jours, les exactions menées par l’occupant en Cisjordanie vont en s’accentuant. Environ 200 personnes ont été tuées par des colons et des soldats israéliens depuis le 7 octobre, selon le ministère palestinien de la Santé. Plus de 2 600 Palestiniens ont été interpellés, «à titre préventive» pour beaucoup d’entre eux. Et la tension est encore montée d’un cran ces dernières 48 heures.
L’armée israélienne a, en effet, annoncé, hier, avoir tué sept Palestiniens dans deux opérations distinctes effectuées dans la nuit, cinq à Jénine et deux à Hébron. A Jénine, ce bilan de cinq morts était contesté à la mi-journée, a souligné l’AFP. Le mouvement Hamas n’a confirmé la mort que de «trois de ses combattants», selon la même source, alors que le ministère palestinien de la Santé a rapporté, de son côté, «trois morts et 15 blessés, dont quatre sont dans un état critique».Des témoins présents dans le camp de Jénine ont, selon l’agence Wafa, indiqué qu’un drone israélien a bombardé un rassemblement de civils dans le quartier Hawashin, faisant trois morts et neuf autres blessés, dont plusieurs sont dans un état grave.
Vagues d’arrestations
Des unités spéciales de l’armée israélienne et des bulldozers blindés ont également pris d’assaut plusieurs quartiers de la ville et le camp de réfugiés voisin, a ajouté l’agence palestinienne. L’agression militaire s’est étendue par la suite aux quartiers de Jabal Abu Duhair, Khallet Al Soha et à la périphérie du camp de Jénine. L’armée d’occupation a assiégé l’hôpital Ibn Sina de Jénine et procédé à des interrogatoires parmi le personnel soignant et les équipes d’ambulanciers, selon Wafa.
En outre, les campagnes d’arrestation se sont poursuivies, jeudi soir, en Cisjordanie. L’armée israélienne a interpellé au moins 36 Palestiniens lors d’une série de raids dans des villes, villages et camps de réfugiés palestiniens, a indiqué hier l’agence Wafa. À Ramallah, au centre de la Cisjordanie, l’occupant a procédé à l’arrestation d’au moins 28 Palestiniens dans la ville de Ni’lin. Cinq autres Palestiniens ont été interpellés dans la province d’Hébron, au sud de la Cisjordanie. Dans le village de Jalqamous, dans la province septentrionale de Jénine, et à Tukarem, trois autres personnes ont été embarquées par l’occupant.
La Commission palestinienne des affaires des prisonniers et ex-détenus a, elle, avancé un bilan faisant état de 47 Palestiniens interpellés en Cisjordanie. «Les campagnes de détention ont été accompagnées de tortures, de coups violents, de menaces à l’encontre des détenus et de leurs familles, et d’actes de vandalisme des habitations», a indiqué la Commission sur Telegram, citée par le site de RFI.
Ils veulent «en découdre»
L’envoyée spéciale de ce média a expliqué qu’il y a eu d’abord des raids très violents de l’armée israélienne dans les villes de Cisjordanie. «Cette nuit, une incursion a eu lieu à Jénine, le bilan est encore incertain. Il y a trois jours, c’était à Tulkarem où il y a eu sept morts. Et puis, il y a les tensions avec les colons, comme à Huwara où l’armée israélienne a décidé de fermer la rue principale avec tous ses commerces pour protéger les colons», a-t-elle écrit. «C’est une question de temps, avant que la population de Cisjordanie n’explose, a confié un habitant de Naplouse à RFI. Nous sommes sous pression de l’armée israélienne, des colons.
La population est constituée à 60% de jeunes, (…) ils ne voient que des combats. Ils voient leurs familles mourir, l’armée israélienne tue n’importe qui pour rien.» Même s’ils ne sont pas organiquement liés à la branche armée du Hamas, ces jeunes disent qu’ils sont prêts à «en découdre», fait observer la journaliste de RFI. Une option que dit craindre Washington.
Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, a d’ailleurs exhorté, jeudi, Israël à «mettre fin à la violence extrémiste» des colons contre les Palestiniens en Cisjordanie occupée, d’après Wafa. Le Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires (OHCA) a indiqué que la violence des colons israéliens a considérablement augmenté depuis le 7 octobre, passant d’une moyenne de trois incidents à sept par jour. Hier, des policiers israéliens ont, une fois de plus, réprimé, à Jérusalem, les fidèles qui tentaient d’atteindre l’enceinte de la mosquée Al Aqsa pour les prières hebdomadaires du vendredi, marquant le sixième vendredi consécutif de telles restrictions, a fait rappeler l’agence Wafa.