Israël a frappé la bande de Ghaza avec plus de 70 000 tonnes d’explosifs, soit une puissance de feu plus de trois fois supérieure à celle de la bombe nucléaire américaine qui a détruit Hiroshima.
Plus de 70 000 tonnes de bombes ont été lancées sur Ghaza depuis octobre dernier, dépassant largement le total des bombes larguées pendant la Seconde Guerre mondiale, sur une période de six mois entre le 7 octobre et le 24 avril, selon l’Observatoire euro-méditerranéen des droits de l’homme.
«On estime qu’Israël a largué plus de 70 000 tonnes d’explosifs sur Ghaza en plus de ses opérations de bulldozer, entraînant la destruction de tous les bâtiments jusqu’à un kilomètre à l’est et au nord de la bande de Ghaza afin de créer une prétendue zone tampon», annonce l’organisation basée à Genève.
Rien que durant les trois premiers mois de la guerre, l’armée israélienne avait bombardé la bande de Ghaza avec plus de 45 000 missiles et bombes, pesant 2000 livres (907 kilogrammes).
Le Bureau des médias de Ghaza a indiqué que «les deux tiers des bombes et missiles... sont non guidés et imprécis, communément appelés bombes stupides». Cela révèle, selon cette source, «le ciblage délibéré de tueries indiscriminées et injustifiées par l’occupation, une violation claire et explicite du droit international et de diverses conventions internationales».
Une évaluation du renseignement américain avait également confirmé que près de la moitié des munitions air-sol utilisées par Israël étaient des bombes «stupides» non guidées. Cette évaluation estime qu’environ 40-45% des 29 000 munitions air-sol utilisées par Israël étaient non guidées, le reste étant des munitions guidées de précision, selon CNN.
Le Bureau des médias de Ghaza a documenté l’utilisation par Israël d’environ neuf bombes et missiles internationalement interdits contre les civils, les enfants et les femmes. Parmi ces armes, figuraient des bombes anti-bunker de types BLU-113, BLU-109, (SDBS), du type américain GBU-28, guidées par des systèmes GPS pour détruire les infrastructures, du phosphore blanc, des bombes intelligentes et des missiles Halberd Gudum, selon les informations du Bureau des médias.
Certaines bombes larguées sont capables de tuer ou de blesser des personnes à plus de 300 mètres, selon une analyse menée par CNN et l’entreprise d’intelligence artificielle Synthetaic. Des images satellites des premiers mois de guerre révèlent plus de 500 cratères de plus de 12 mètres de diamètre, caractéristiques des bombes de 2000 livres. Ces bombes sont quatre fois plus lourdes que les celles larguées par les Etats-Unis en Irak.
Missiles non explosés
Marc Garlasco, ancien analyste du renseignement de la Défense américaine et ancien enquêteur des crimes de guerre pour l’ONU, a déclaré à CNN que la densité des bombardements israéliens était «inégalée depuis le Vietnam». Les bombes lourdes, principalement fabriquées aux Etats-Unis, peuvent provoquer des pertes massives, avec un rayon de fragmentation létal de 365 mètres.
Les images satellites révèlent d’ailleurs l’étendue de la dévastation à travers l’enclave assiégée. Il y a près d’un mois, Joe Biden a suspendu la livraison des munitions les plus dévastatrices de l’arsenal américain à Israël, reconnaissant ainsi que ces armes avaient causé des pertes civiles à Ghaza. Les experts en armement et en guerre attribuent le nombre élevé de victimes à l’utilisation extensive de munitions lourdes comme les bombes de 2000 livres.
La population de Ghaza est densément regroupée, ce qui amplifie l’impact de ces armes. «L’utilisation de bombes de 2000 livres dans une zone aussi densément peuplée que Ghaza signifie qu’il faudra des décennies pour que les communautés s’en remettent», a déclaré John Chappell, avocat chez Civic, une organisation basée à Washington DC.
Un autre danger mortel plane sur les Palestiniens de Ghaza : celui des munitions non explosées. Les restes explosifs de guerre (REG) désignent les munitions qui n’ont pas explosé à l’impact en raison d’un dysfonctionnement technique ou volontaire, ou qui ont été abandonnées. «Missiles, roquettes, obus d’artillerie, armes à sous-munitions…
Ce sont des munitions qui n’ont pas explosé au moment de leur utilisation, ou qui sont programmées pour exploser plus tard et piéger des personnes ou des véhicules, comme les mines antipersonnel et antichars», explique Anne Héry, directrice du plaidoyer à Handicap International.
Ces restes explosifs de guerre, extrêmement dangereux pour quiconque s’en approche, continuent de tuer et mutiler. Pehr Lodhammar, haut responsable du Service de lutte antimines des Nations unies (Unmas), indique que la guerre a laissé environ 37 millions de tonnes de débris dans l’enclave palestinienne.
Bien qu’il soit difficile de déterminer le nombre exact de munitions non explosées, le déblaiement des débris, y compris ceux des bâtiments détruits, pourrait prendre 14 ans. Le Service de lutte antimines estime que des millions de dollars seront nécessaires pour nettoyer Ghaza des bombes non explosées.