Les fêtes libyennes du 11e anniversaire de la révolution du 17 février contre El Gueddafi ont été marquées par un nouveau différend surgissant entre les belligérants libyens suite au limogeage, par le Parlement libyen, du chef du gouvernement Abdelhamid Dbeyba et son remplacement, jeudi 10 février, par Fathi Bach Agha.
Ce dernier a été cautionné par 54 membres du Conseil de l’Etat, ainsi qu’à l’unanimité des présents au Parlement. L’institution a approuvé auparavant un amendement constitutionnel, accordant 14 mois aux nouvelles autorités pour mettre à jour le projet de Constitution de Salala (Oman) et organiser les élections générales en Libye.
Le chef du gouvernement Abdelhamid Dbeyba et les autres membres du Conseil de l’Etat ont rejeté ces décisions. Ils rejettent une nouvelle phase intérimaire ; la Libye court le risque d’une nouvelle dérive. Le chef de la délégation de l’Union européenne en Libye, José Antonio Sabadell, a affirmé avant-hier dans un post sur Twitter, vendredi dernier, qu’il soutient les efforts de Stéphanie Williams, la représentante du secrétaire général de l’ONU en Libye, dans ses démarches pour la stabilité dans ce pays et le rapprochement des positions des belligérants en vue d’avancer vers la tenue des élections.
L’ambassadeur américain a, lui aussi, exprimé son soutien à Stéphanie Williams, accusée par Mohamed Hammouda, le porte-parole du gouvernement Dbeyba, d’adopter ce «genre d’alignement ne devant pas entacher les efforts de l’ONU en Libye».
Les posts de l’ambassade américaine ont été publiés suite au communiqué de Hammouda, accusant Mme Williams d’alignement. La représentante du secrétaire général de l’ONU en Libye a appelé tous les belligérants au calme. Les deux chefs de gouvernement, Dbeyba et Bach Agha, le destitué et le nommé, appartiennent à la ville de Misrata, qui a tissé le cessez-le-feu Est-Ouest avec Haftar en juin 2020.
Pourtant, la représentante onusienne a rencontré mercredi 16 février le président du Parlement, Salah Aguila, à Kobba, dans l’Est libyen, qui l’a informée des dernières décisions du Parlement, lors de sa dernière réunion du 10 février. Il s’agit surtout de l’entente entre le Parlement et le Conseil supérieur de l’Etat concernant l’amendement constitutionnel prévoyant la révision du projet de Constitution d’Oman et son adoption, soit par référendum, ou une entente sur une loi électorale.
Il s’agit aussi d’établir une feuille de route de 14 mois durant lesquels le socle constitutionnel des élections sera établi et des élections générales seront tenues. Suite à cette rencontre, Stéphanie Williams a tweeté les propos de Aguila Salah, provoquant la colère du clan Dbeyba et le communiqué du porte-parole du gouvernement Mohamed Hammouda.
Pourtant, et bien avant cette rencontre, Mme Williams avait rencontré Khaled Mechri, le président du Conseil supérieur de l’Etat, Younes El Menfi, le chef du Conseil présidentiel libyen, les chefs de gouvernement démis et nommé, Abdelhamid Dbeyba et Fathi Bach Agha. Mme Williams a eu une entrevue avec Aguila, alors qu’elle savait tout. Que s’est-il passé entre-temps ?
Dessous
Les observateurs s’interrogent sur la récente volte-face de certains membres du Conseil de l’Etat, notamment son président, Khaled Mechri, après sa rencontre avec Stéphanie Williams. Pourtant, ils avaient exprimé leur accord sur l’harmonisation du projet de la Constitution, préalable aux élections, comme ils l’avaient régulièrement réclamé.
Mechri n’avait de cesse de répéter que «les questions constitutionnelles étaient fondamentales, qu’importe le chef du gouvernement». 54 membres du Conseil de l’Etat ont validé la destitution de Dbeyba. La plateforme politique exige juste 50 signatures. Les clans Aguila, Bach Agha, Haftar avaient donc fait cette proposition pour destituer Dbeyba. C’était leur principal objectif.
La question constitutionnelle était secondaire pour eux. Après la destitution de Dbeyba, la mouvance des Frères musulmans, très fortement représentée au Conseil supérieur de l’Etat, s’est sentie dépossédée de tout pouvoir. Une chose est certaine, l’appartenance à Misrata de Fathi Bach Agha a bousillé les cartes des Frères musulmans. Bach Agha ayant également tissé des relations avec toutes les forces paramilitaires de l’Ouest libyen, alors qu’il était ministre de l’Intérieur avec Al Sarraj. Le limogeage de Dbeyba par le Parlement est passé par un appel à candidature, suite à sa décision de déclarer «vacant» le poste après le report des élections générales, prévues le 24 décembre 2021. Il y a eu au départ sept candidats.
Cinq candidatures ont été rejetées, alors que le candidat Khaled Bibas a retiré sa candidature lors de la plénière, selon les propos du président du Parlement. Seul restait le candidat Fathi Bach Agha, qui a été retenu à l’unanimité. Une vidéo de 30 secondes, circulant sur les réseaux sociaux, a montré Aguila demander aux députés de voter à main levée, comme lors de la validation de la candidature de Dbeyba en mars 2021 à Syrte. Quant au nombre de votants, il n’a pas été précisé. L’unique information disponible concerne le vote de l’amendement constitutionnel effectué durant la même séance ; il a été approuvé par 127 députés sur les 147 présents. Lequel nombre (127) dépasse les deux tiers des 180 membres du Parlement libyen.
Une nouvelle page de différends s’est ouverte en Libye. Mais cette fois, Haftar dispose de puissants soutiens dans l’Ouest libyen, en la personne de Fathi Bach Agha et Ahmed Myitigue.
Noureddine Taboubi reconduit à la tête de l’UGTT
Noureddine Taboubi vient d’être reconduit à la tête de l’organisation syndicale ouvrière tunisienne (UGTT) aux termes des travaux du 25e congrès national ordinaire de l’union tenu les 16, 17 et 18 février courant à Sfax. La liste de Taboubi a raflé les 15 sièges du bureau exécutif ; elle comprend huit nouveaux visages, dont deux femmes, et sept anciens membres. Noureddine Taboubi a gardé le poste de secrétaire général. Sami Tahri, le secrétaire général adjoint en charge des médias et des publications, a conservé le poste de porte-parole de l’UGTT. De lourdes tâches attendent la centrale syndicale en cette phase délicate traversée par la Tunisie.
Tunis
De notre correspondant Mourad Sellami